Monika
de Ingmar Bergman : du rapport
créateur-créature au
cinéma / Alain Bergala. - Crisnée
(Belgique) :
Yellow now, 2005. - 108 p. : ill. ;
17 cm. -
(Côté films, 1).
ISBN
2-87340-196-6
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L'histoire
du cinéma moderne est un archipel. Elle pourrait se raconter
en
sautant d'île en île, et rien d'essentiel n'y
manquerait.
☐
Un film insulaire,
p. 15 |
NOTE DE L'ÉDITEUR
: Harry et Monika sont deux jeunes gens ordinaires de
Stockholm en
1952. Brimés dans leur travail, étouffant dans
leurs
familles, ils quittent tout pour l'utopie d'un
été de
liberté sur une île 1.
Mais leur moment édénique va être de
courte durée.
Rencontre
amoureuse et séparation : un film comme les
autres ? Non, car ici doublé par un autre
où les
protagonistes ne sont plus deux mais quatre : Monika, Harry, Bergman et
le spectateur. Pour la première fois le rapport
créateur-créature-spectateur l'emporte sur la
fiction et
en devient le véritable enjeu. Bergman ne filme pas
seulement le
scénario, mais aussi et surtout le roman du tournage.
L'histoire
du cinéma va en être changée.
1. |
Le film a été
tourné à Ornö, dans l'archipel de
Stockholm. |
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EXTRAITS |
L'île
est une bonne métaphore générale de ce
monde
à part que constitue la micro-société
d'un
tournage. Quand elle devient de surcroît le site
réel
où se tourne le film, le sentiment d'autarcie et
d'impunité imaginaire de la vie dans ce petit monde est
comme
corroboré par la réalité du lieu.
Bergman en
était tout à fait conscient pendant qu'il vivait
sa
flambée amoureuse avec Harriet Andersson : ni lui,
marié,
ni elle, engagée avec un autre homme, n'auraient
cédé à cette pulsion
réciproque s'ils
n'avaient eu le sentiment, très vif, que ce tournage
insulaire
leur offrait une parenthèse dans leur vie normale. Ce n'est
pas
autre chose que raconte le film : un couple qui vit un moment
de
grâce amoureuse loin du social, mais qui sent sourdement que
l'été prendra fin et que l'utopie à
laquelle ils
ont voulu croire avec la foi du charbonnier va se fracasser contre le
mur de la réalité au retour à la ville.
☐
Un film insulaire, pp. 16-18
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[Le]
paysage insulaire qui coïncide avec son
« paysage
mental » est pour Bergman le site
privilégié
du tomber-amoureux. Le scénario de la flambée
amoureuse
avec Harriet Andersson lors du tournage de Monika
se
répètera avec Liv Ullmann pendant celui de Comme
dans un miroir,
où le coup de foudre […] pour l'île de
Farö a
été à double
détente : pour un lieu et
pour une femme. C'est presque un cliché de relever que la
vie
insulaire, comme parenthèse dans le temps voué au
social,
est naturellement propice à la naissance de
l'état
amoureux. L'île est le paysage terrestre le plus proche de
l'imaginaire du jardin d'Eden, le site idéal des premiers
moments de la rencontre amoureuse où chacun n'a plus besoin,
provisoirement, que de la présence comblante de l'autre.
☐
Un film insulaire, pp. 22-26
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- Ingmar Bergman,
« Laterna magica »,
Paris : Gallimard, 1987 ; Gallimard (Folio, 2238),
1991
- Ingmar Bergman,
« Images », Paris :
Gallimard, 1992
- Ingmar Bergman, « Cris et
chuchotement [suivi de] Persona
[et de] Le lien », Paris : Gallimard
(Folio, 2620), 1994
- Ingmar Bergman, « Monika »,
Paris : L'Avant-scène Cinéma (567,
décembre 2007), 2007
|
- Per Anders Fogelström,
« Sommaren med Monika »,
Stockholm : Bonnier, 1951
- Jean-Luc Godard, « Les années Cahiers,
1950 à 1959 », Paris :
Flammarion (Champs arts, 740), 2007
|
→ Le
visage comme une île (Ingmar Bergman, I) :
« Un été avec
Monika » (1953), Nouvelles du front, 12
janvier 2017 [en ligne]
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LE CINÉMA SUR LE SITE DES LITTÉRATURES
INSULAIRES
En l'absence d'une sélection suffisamment
développée, la liste qui suit regroupe quelques
unes des
références dispersées sur l'ensemble
du
site. |
- Anne Akrich,
« Il
faut se méfier des hommes nus »,
Paris : Julliard, 2017
- Martin
Barnier et Pierre Beylot, « Analyse d'une
œuvre : Conte
d'été, Eric Rohmer, 1996 »,
Paris : Librairie Vrin (Philosophie et cinéma), 2011
- Ingmar Bergman, « Monika »,
Paris : L'Avant-scène Cinéma (567,
décembre 2007), 2007
- Ingmar Bergman, « Cris et
chuchotement [suivi de] Persona
[et de] Le lien », Paris : Gallimard
(Folio, 2620), 1994
- Pierre
Butin, Gilles Janin et Vincent Guigueno, « Un film
entouré d'eau : histoire et mémoire de L'or des mers de
Jean Epstein à Hoedic (1932-2005) », in
Pierre Frustier (dir.), Les identités
insulaires face au tourisme, La
Roche-sur-Yon : Siloé, 2007
- Nicolas
Chaudun, « L'île
des enfants perdus », Arles :
Actes sud, 2019
- Nicolas
Chemla, « Murnau des
ténèbres », Paris :
Le Cherche midi (Cobra), 2021
- Jean Epstein, « L'or des mers »,
Baye : La Digitale, 1995
- Jean-Luc Godard, « Les années Cahiers,
1950 à 1959 », Paris :
Flammarion (Champs arts, 740), 2007
- Jean-Luc Godard, « Les années Karina, 1960 à 1967 »,
Paris : Flammarion (Champs arts, 741), 2007
- Vincent Guigueno, « Jean Epstein,
cinéaste des îles : Ouessant, Sein,
Hoëdic, Belle-Ile »,
Paris : Jean-Michel Place, 2003
- Bernard
Judge, « Waltzing with Brando : planning a
paradise in
Tahiti », Novato (California) : Oro
editions, 2011
- Andrea de Lauris et Pat Mullen,
« Man of Aran (le film) » in
Dominique Beugras (éd.), Les îles d'Aran, le
voyage vers l'ouest, Paris : La
Bibliothèque (L'Écrivain voyageur), 2000
- Isabelle Le
Corff, « Le
cinéma breizh-îlien : îles
bretonnes et cinéma »
illustrations de Nono, Morlaix : Skol Vreizh, 2016
- Patrick Louguet, « Le
voyage vagabond au cœur de l’œuvre
cinématographique de Jacques Rozier
(Les Naufragés de l’île de la tortue,
Maine Océan et Adieu
Philippine) », in Francis Marcoin (éd.), Encore Robinson,
Arras :
Université d'Artois, Centre Robinson, 2017
- Marc-Emmanuel
Louvat, « Petite
histoire du cinéma en
Polynésie française,
Cinematamua »,
Paris : L'Harmattan, 2016
- Delos W. Lovelace, « King Kong »
d'après une histoire de Edgar Wallace et Merian C. Cooper,
Paris : Librio (Librio, 746), 2005
- Pat Mullen, « Man of Aran »,
Cambridge (Mass.) : The M.I.T. press, 1970
- Friedrich Wilhelm Murnau, « Südseebilder : Texte, Fotos und der Film Tabu »
ausgewählt, bearbeitet und kommentiert von Enno Patalas, herausgegeben
von der Friedrich-Wilhelm-Murnau-Stiftung, Berlin : Bertz+Fisher, 2005
- Marie-France Pisier, « Le bal du gouverneur »,
Paris : Librairie générale
française (Le Livre de poche, 6096), 1985
- Alyssa Goldstein Sepinwall,
« Slave revolt on screen : the Haitian Revolution in film and video
games », Jackson : University press of Mississippi, 2021
- Pierre Sorlin, « L'Avventura
(Michelangelo Antonioni, 1960) »,
Lyon : Aléas (Le Vif du sujet, 2), 2010
- Liv Ullmann, « Devenir
», Paris : Stock, 1977
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mise-à-jour : 16 septembre 2022 |
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