Femme en
costume de bataille / Antonio Benítez-Rojo ; trad.
de
l'espagnol (Cuba) par Anne Proenza. - Paris : Le Cherche Midi,
2005. - 507 p. ; 24 cm. - (Ailleurs).
ISBN
2-74910-352-5
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Ne
m'emmerdez pas avec l'histoire en matière de
théâtre.
Ce qui compte ici, c'est l'illusion
poétique.
☐ Alejo
Carpentier, Concert
baroque — cité
en
épigraphe |
NOTE
DE L'ÉDITEUR
: 1827. Sur un bateau qui relie La Havane à La
Nouvelle-Orléans, parmi une cohorte de femmes
déchues,
prisonnières et autres prostituées, Henriette
Faber se
souvient.
1805. Après une
enfance idyllique dans le Sud-Est de la France, elle suit son oncle,
médecin de la Grande Armée, et l'élu
de son
cœur, un hussard valeureux, dans la campagne autrichienne de
Napoléon. Entre Vienne et Austerlitz, elle se lie
d'amitié avec Maryse, directrice d'un
théâtre
ambulant.
Après de
nombreuses péripéties, Henriette se retrouve
à
Paris où, pour apprendre la médecine, science
alors
interdite aux femmes, elle se fait passer pour un homme. C'est ainsi
travestie qu'elle rejoint la Grande Armée, qui marche sur
Moscou, pour exercer, dans des conditions effroyables, son
activité de chirurgien sur les champs de bataille.
Sous le nom d'Enrique
Faber, après avoir été faite
prisonnière
par les Anglais, elle rejoint finalement Maryse à La Havane,
ou
l'attend un surprenant destin.
Dans ce roman palpitant,
inspiré de la vie réelle d'Henriette Faber,
l'auteur
dresse le portrait à la fois picaresque et tragique d'une
femme
qui toute sa vie a défié conventions et interdits
dans un
monde dominé par les hommes. Il nous offre au passage des
pages
inoubliables sur la vie quotidienne de la Grande Armée, La
Havane coloniale, ainsi que sur l'intimité d'une femme prise
dans les tourmentes de l'Histoire.
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PHILIPPE
LANÇON : L’écrivain
cubain Antonio Benitez Rojo est mort le 5 janvier à
Northampton
aux États-Unis, à l’âge de 73
ans. Il avait
quitté Cuba en 1980 (…).
Son dernier roman, Femme en costume de bataille
(…) conte l’histoire d’Henriette Faber,
née
à Lausanne en 1791, chirurgienne dans
l’armée de
Napoléon, émigrée à Cuba
où,
médecin, elle épouse une femme sous le nom
d'Enrique
Faber. On ignore comment elle finit sa vie. Tout le baroque et la
liberté narrative de l’auteur s’y
concentrent pour
finir au pays des masques, de la fête et des faux-semblants.
(…)
☐ Libération,
15 janvier 2005
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EXTRAIT |
Raconter
ce que fut ma vie l'année qui suivit revient ni plus ni
moins
à décrire La Havane, avec ses qualités
et ses
défauts : la cathédrale et la tombe de
Christophe
Colomb, le café du Lion d'or et ses
rafraîchessements
venus de Boston, l'université, le séminaire,
l'hôpital pour femmes, l'asile d'orphelins, le jardin de
l'évêque, le nouveau cimetière, la
fabrique de
tabac, les palais, les églises et les couvents, les places
et
leurs foules, les tours et les forteresses, les faubourgs hors les
murs, le fleuve Almendares ou la rivière Chorrera, la ville
proche de Guanabacoa, et d'autres lieux caractéristiques.
Nous
n'avions rien de particulier à faire, si ce n'est compatir
et
partager avec Robledo sa résignation — de moins en
moins
silencieuse. Tôt le matin, nous partions dans sa
calèche
et je prenais des notes sur ce qu'il avait à dire de sa
ville.
Il me parlait surtout de la période de l'occupation anglaise
pendant son enfance, un évènement qui
l'obsédait
et que je finis par connaître dans tous les
détails.
À midi Maryse nous attendait pour déjeuner et
après un café, un rhum et un cigare dont ni la
fumée ni le goût ne m'avaient encore conquise,
nous
faisions la sieste jusqu'à cinq heures, moites et
accablés de chaleur. C'était ensuite l'heure de
la
promenade dans le traditionnel quitrín : nous
empruntions le paseo du Prado
ou l'alameda
de Paula. Venait alors le dîner en compagnie de quelques
invités de confiance, personnes aimables et bien
éduquées qui restaient toujours prudentes dans
leurs
opinions, comme si les murs avaient des oreilles. Certains critiquaient
parfois le manque d'écoles ou l'absence d'une politique de
santé, ou encore les fléaux qu'étaient
le jeu, la
paresse et la prostitution, mais ils ne s'aventuraient jamais sur les
thèmes de l'indépendance ou de l'abolition de
l'esclavage. Les veillées se terminaient en
général avec Maryse au piano, à moins
qu'elle ne
se mît à pincer les cordes de sa guitare en
chantant une
nostalgique chanson d'amour qu'elle dédiait à
Robledo.
☐
pp. 445-446 |
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- « Mujer
en traje de batalla », Madrid : Alfaguara,
2001
- «
Femme en costume de bataille », Paris :
Points (Les Grands romans), 2006
|
- « El
mar de las lentejas », La Havane : Ed.
Letras cubanas, 1979 ; Barcelone : Ed. Casiopea,
1999 ; « Sea of
lentils » transl. by James Maraniss,
Amherst : University of Massachusetts press, 1990
- « La
isla que se repite : el Caribe y la perspectiva
postmoderna », Hanover (New Hampshire) :
Ed. del Norte, 1989 ; Barcelone : Ed. Casiopea,
1998 ; « The repeating island :
the Caribbean and the postmodern perspective »
transl. by James Maraniss, Durham (North Carolina) : Duke
university press, 1992, 1996
- « A view from the mangrove »,
Amherst : University of Massachusetts press, 1998
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mise-à-jour : 5
octobre 2007 |
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