Dictionnaire
créole martiniquais-français / Raphaël Confiant. -
Matoury (Guyane) : Ibis rouge, 2007. - 2 vol.
(1427 p.) ; 24 cm.
ISBN 978-2-84450-307-7
|
Raphaël
Confiant a présidé
le jury du 5e Prix
du Livre Insulaire (Ouessant 2003)
|
RAPHAËL CONFIANT
: Le présent ouvrage est le premier dictionnaire du
créole martiniquais jamais publié à ce jour.
[…] [Il] paraît à un moment crucial pour la langue
créole puisque même le plus néophyte en la
matière peut constater un recul, tant quantitatif que
qualitatif, de la pratique de celle-ci depuis environ trois
décennies. Ce phénomène a un nom : la décréolisation.
Il s'agit d'un processus, d'allure inexorable, qui s'attaque à
tous les plans de la langue (phonétique, lexical, syntaxique,
rhétorique) et qui met en danger son existence même, en
tant qu'idiome nettement différencié du français.
Ce que l'on entend trop souvent sur certaines radio-libres, pour ne
prendre que ce seul exemple, radios pourtant sincèrement
dévouées à la défense et illustration du
créole, est plus proche d'une sorte de dialecte du
français 1, voire parfois d'un baragouin, que ce
ce que nous appelons, pour notre part, le « créole
stabilisé ». Il s'agit de cette langue qui s'est
formée, consolidée et développée pendant
trois siècles à travers l'archipel des Antilles et la
Guyane, entre le milieu du XVIIe siècle (moment où débute la culture de la canne à sucre) et celui du XXe
(moment où prend fin la « société
d'habitation » fondée sur cette même canne
à sucre). Ce créole consolidé est parfaitement
identifiable à travers les différentes grammaires qui ont
été publiées ici et là, depuis celle du
Trinidadien John Jacob Thomas (1869) jusqu'à celles de Jean
Bernabé (1983) et Robert Damoiseau (2003), en passant par les
études grammaticales d'Alfred de Saint-Quentin (1874) pour le
créole guyanais, René de Poyen-Bellisle (1890) pour le
créole guadeloupéen ou encore d'Elodie Jourdain (1951)
pour le créole martiniquais. C'est cet édifice
linguistique qui, aujourd'hui, menace de s'écrouler sous nos
yeux.
☐ Avant-propos, p. 11 1. | Plus loin, Raphaël Confiant évoque « le flot de francisation qui assaille le créole » (Avant-propos, p. 12), et désigne une des causes du reflux en regrettant que le créole, qui « s'est
formé à partir d'un phénomène
d'héritage lexical généralisé …
ne créolise plus ses emprunts, qu'il ne sait plus ou ne peut
plus le faire » (ibid., p. 33). |
|
En
soutien à son travail d'écrivain et d'enseignant,
Raphaël Confiant a consacré plusieurs décennies
à l'élaboration de ce dictionnaire.
Destiné prioritairement aux créolophones
— simples pratiquants ou spécialistes —,
l'œuvre peut et doit intéresser tous ceux qu'interpellent
la Martinique, les Martiniquais, leur langue, leur culture et leur
littérature. Ce « Dictionnaire créole
martiniquais - français » constitue en effet une
magnifique ouverture sur la vie intime d'une île de la mer des
Antilles autant qu'un support de réflexion sur la langue, ses
racines, ses ressorts et ses métamorphoses.
|
EXTRAIT |
lapawol
(abs.) parole
An tan lé zannimo té ni lapawol. (J. Laurent et I. Césaire, Contes de vie et de mort aux Antilles, 1976)
A l'époque où les animaux avaient le don de la parole.
lapay
(abs.) paille
Sé asou lapay i ké fini vié jou'y. (T. Léotin, Lavwa égal — La voix égale, 2003)
Elle finira ses vieux jours sur la paille.
lapé
paix
Sa i lé sé an lapé ki dirab.
Ce qu'il veut c'est une paix durable.
lapech
pêche
pvb. Pou sa lapech ka bay, otan lésé kanno-a pouri (lit. Pour ce que donne la pêche, autant laisser pourrir le canot) : Quand le résultat ne vaut pas la peine, autant ne rien tenter.
la pèlé
montagne Pelée (la Pelée en F.R.A. [français régional antillais])
… é pa té lé yo té ritounen pran fè anba volkan la-Pèlé a ankò.
… et ne voulait pas qu'ils recommencent à subir les foudres du volcan de la Pelée.
lapèmission
(abs. permission)
Nenpot ki téren ou fouyé èvek lapèmiwion di Dié. (F. Marbot, Les Bambous, fables de La Fontaine travesties en patois martiniquais, 1846)
N'importe quel terrain que vous avez fouillé avec la permission de Dieu.
lapen 1
lapin
Sè konsidéré an sel disparet pwan sé lapen-an. (D. Boukman, Migannaj, 2005)
C'est comme si les lapins s'étaient volatilisés.
pvb. Tout lapen ni gran zorey (lit. Tous les lapins ont de grandes oreilles) : Qui se ressemble s'assemble.
lapen 2
compère Lapin (personnage des contes créoles)
Konpè Lapen ka wè Konpè Tig ka pasé anba piébwa-a oti i maré a. (L. Hearn)
Compère Lapin voit Compère Tigre en train de passe sous l'arbre auquel il était attaché.
lapen 3
verge
syn. kal, koko, lolo, penpen
☐
tome 2, pp. 809-810
|
|
COMPLÉMENT BIBLIOGRAPHIQUE | - « Aimé Césaire, une traversée paradoxale du siècle », Paris : Stock, 1993 ; Paris : Écriture, 2006
- « La
Vierge du Grand Retour », Paris : Grasset,
1996
- « Dictionnaire des
Titim et Sirandanes », Petit-Bourg (Guadeloupe) :
Ibis Rouge, 1998
- « Régisseur
du rhum », Paris : Écriture, 1999
- « Jik
dèyè do Bondyé », Petit-Bourg
(Guadeloupe) : Ibis rouge, 2000
- « Le
Galion » photographies de David Damoison, Petit-Bourg
(Guadeloupe) : Ibis Rouge, 2000 — Prix du Livre Insulaire,
Ouessant 2000 (catégorie beaux-livres)
- « Nuée
ardente », Paris : Mercure de France, 2002
- « Le
Barbare enchanté », Paris : Écriture,
2003
- « La
panse du chacal », Paris : Mercure de France,
2004
- « Adèle
et la pacotilleuse », Paris : Mercure de
France, 2005
- « Rue des Syriens », Paris : Mercure de France,
2012
- « L'enlèvement du mardi gras », Paris : Écriture, 2019
| Sur le site « île en île » : dossier Raphaël Confiant |
|
|
mise-à-jour : 19 mars 2019 |
| |
|