Odyssée /
Homère ; éd.
présentée et annotée par Philippe
Brunet ; trad. de Victor Bérard. - Paris :
Gallimard, 2003. - 511 p. : cartes ;
18 cm. - (Folio classique, 3235).
ISBN 2-07-040912-0
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Ithaque, la Phéacie
— l'une appartiendrait à la géographie
du réel, parce que repérable sur les cartes et
atlas, l'autre relèverait d'une géographie
imaginaire. Mais les rives de l'une et de l'autre, dans
l'Odyssée, sont baignées par la
Méditerranée, comme l'île des
Lotophages, comme celles des Cyclopes et des Lestrygons.
Le poème
d'Homère tire une part de sa force d'un double
enracinement : ce n'est nulle part ailleurs qu'en
Méditerranée, et ce pourrait être en
toute partie du monde où se rencontrent la mer, des ports,
des îles, des marins … La
Phéacie n'est pas moins efficacement
protégée du monde extérieur que
certaines des îles hyperboréennes qui jalonnent la
navigation de Saint Brendan.
Ici et là, l'attente du navigateur n'est pas moins vive que
les forces qui tentent de contrarier son approche, comme ce dieu de la
mer qui veille — au Chant V — à
ce que l'abordage d'Ulysse se fasse attendre : « Flotte
à l'aventure ; avant qu'en Phéacie, des
nourrissons de Zeus t'accueillent, j'ai l'espoir de te fournir encore
ton content de malheur ».
Du XVIe
au XVIIIe siècles, la
littérature utopique tentera, sans réel
succès, d'insérer ses grandes projections dans
une géographie profondément renouvelée
par les découvertes maritimes ; dans l'Odyssée
coexistent sans hiatus une société
datée, localisée, et l'éternelle
aspiration à un ailleurs différent.
« Nous vivons à l'écart et le
dernier des peuples, en cette mer des houles, si loin que nul mortel
n'a commerce avec nous » peuvent affirmer
les sujets d'Alkinoos — mais tout lecteur
d'Homère, hier ou aujourd'hui, sait que l'île des
Phéaciens git à portée de
rêve, quelque part au-delà de l'horizon marin.
Ithaque, but ultime,
s'enrichit de cette certitude, comme des séductions
surmontées en l'île de Calypso, comme des dangers
parés aux bords de l'île du Soleil, à
l'approche de Charybde ou de Skylla.
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EXTRAIT |
“ Regarde avec moi le sol de
ton Ithaque : tu me croiras
peut-être … La rade de Phorkys, le
Vieillard de la mer, la voici ! et voici l'olivier qui
s'éploie à l'entrée de la
rade ; près de lui, cette obscure et charmante
caverne, c'est la grotte des Nymphes qu'on appelle
Naïades ! voici l'antre voûté,
voici la grande salle où tu vins, tant de fois, offrir une
parfaite hécatombe aux Naïades ! et voici,
revêtu de ses bois, le
Nérite ! ”
À ces mots, Athéna dispersa
la nuée : le pays apparut ; quelle joie
ressentit le héros d'endurance ! il connut le
bonheur, cet Ulysse divin. Sa terre ! il en baisait la
glèbe nourricière, puis, les mains vers le ciel,
il invoquait les Nymphes […]
☐ Chant XIII,
p. 252
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- Homère,
« L'Odyssée » trad.,
notes et postface de Philippe Jaccottet, Paris : La
Découverte, 2000, 2009
- Homère,
« Odyssée »
éd. bilingue (grec ancien et français), texte
établi et traduit par Victor Bérard, introd.
d'Eva Cantarella, notes de Silvia Milanezi, Paris : Les Belles
lettres, 2001
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- «
Le chant de l'Odyssée », enregistrement
intégral
(4 CD et livret) du spectacle créé pour
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de La Salle,
d'après la traduction de Victor Bérard, musique
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2010
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- Louis Aragon, « Les aventures
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1997
- Sophie Basch (éd.),
« Portraits
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actes du colloque international organisé à
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Athènes : Ecole française
d'Athènes (Mondes
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- Victor Bérard, « Les navigations d'Ulysse »
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- Victor Bérard, « Les
Phéniciens et l'Odyssée »,
Paris : Armand Colin, 1902-1903 (rééd.
1927)
- Victor Bérard,
« Dans le sillage d'Ulysse, album
odysséen » avec des photos de Fred.
Boissonnas, Paris : Armand Colin, 1933
- Simone Bertière,
« Le roman d'Ulysse »,
Paris : Éditions de Fallois, 2017
- Samuel Butler, « The authoress of the Odyssey »,
Exeter : Bristol Phoenix press, 2004 ;
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- Barbara
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- Botho
Strauss, « Ithaque », Paris :
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mise-à-jour : 2
juillet 2019 |
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