L'exil : entre
l'ancrage et la fuite, l'écrivain haïtien / Yanick
Lahens. - Port-au-Prince : Éd. Henri Deschamps,
1990. - 79 p. ; 21 cm.
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YANICK
LAHËNS :
Dans mon essai, j'ai voulu clarifier un
certain nombre d'idées autour de la notion d'exil surtout
dans l'espace caribéen ou haïtien si
travaillé par le souci d'appartenance. J'ai mis l'accent sur
le fait que tout créateur était un
exilé, deuxièmement que la pulsion de l'ailleurs
était fondamentale dans la culture haïtienne et
enfin j'ai essayé de comprendre pourquoi la plupart des
auteurs haïtiens, ceux de la littérature majeure,
en tout cas, ont été en exil ou ont
écrit ou publié leurs textes à
l'étranger. Les phénomènes migratoires
auxquels nous avons assisté ces dernières trente
années au moins pour un certain nombre
d'écrivains coïncidaient avec un syndrome de
départ comme je l'ai appelé dans mon essai.
☐
propos recueillis par
Catherine Le Pelletier in : « Encre noire :
la langue en liberté »,
Petit-Bourg (Guadeloupe) : Ibis rouge, 1998 (p. 38)
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GÉRARD BARTHÉLÉMY : Yanick Lahens […] a
proposé une nouvelle approche [du] destin de
l'écrivain haïtien qui se trouverait
placé en permanence entre « l'ancrage et
la fuite ». Elle reprend d'ailleurs à son
compte cette phrase de J. Carerro : « Dans
la fuite à l'étranger, c'est la fin de l'exil
(l'isolement intérieur de son propre pays) que cherche en
réalité l'écrivain des
Caraïbes ».
L'isolement ressenti face à la
réalité culturelle de la grande
majorité du pays ferait ainsi de l'écrivain
haïtien un exilé intérieur avant de le
conduire à « éviter toute
fixité qui risquerait de le consumer ».
☐ Notre Librairie, 132 | octobre-décembre 1997
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LOUIS-PHILIPPE DALEMBERT : En fait, nous explique Yanick Lahens
[…], si le thème de l'exil est devenu une
constante de la littérature haïtienne, c'est parce
qu'il correspond à la situation concrète que
connaît l'écrivain tant à
l'extérieur qu'à l'intérieur du pays.
L'exil n'est donc pas lié au seul déplacement
physique dans l'espace, volontairement ou non, du pays d'origine vers
la terre étrangère. Il se traduit aussi dans
l'isolement que vit l'écrivain dans son propre pays,
brimé par un pouvoir hostile à toute
littérature qui, de sucroît, prône un
discours collectif.
☐ Notre Librairie, 133 | janvier-avril 1998
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ANNE
MARTY :
Dans une plaquette d'environ soixante-dix
pages, Yanick Lahens nous livre un essai sur la littérature
haïtienne, véritable chef-d'œuvre de
lucidité et de concision. Le thème de l'exil, qui
caractérise la littérature haïtienne
depuis sa naissance, est enfin reconnu comme « l'une
des dimensions qui (…) donnent à la culture
haïtienne sa cohérence ».
L'écrivain qui oscille entre
« précarité de
l'ici » et
« inaccessibilité de
l'ailleurs » privilégie, souvent de
façon camouflée, l'expression du
départ, du voyage et de l'appel du grand large.
[…] Yanick Lahens analyse avec pertinence les contraintes
que l'écrivain a dû et doit surmonter :
celle de la langue évoquée avec
compétence dans une page émouvante ;
celle d'écrire dans une société
majoritaitement illettrée qui manque cruellement
d'institutions (enseignement, recherche, critique, édition)
susceptibles de porter et de favoriser le vœu de
création du poète, et enfin la faiblesse de la
« valeur tolérance »
qui a entravé le développement d'une
pensée hors des sentiers battus et la recherche d'une
création personnelle.
Mais les objectifs
fondamentaux de Yanick Lahens s'articulent autour des expressions
« avancées dans la
modernité »,
« possibilité
d'innovation »,
« pensée novatrice et
création », et
« métissage et
syncrétisme ». Toutes ces notions sont
repérables dans la création d'un certain nombre
d'écrivains. Ils montrent comment l'expiation et la
« rédemption » ont pu
adroitement résoudre l'angoisse du départ et de
l'abandon, comment J.S. Alexis, grâce à sa
théorie du « réalisme
merveilleux », a pu justifier ses tendances aux
vœux de voyage singulier, et comment les écrivains
d'Haïti littéraire, ou la
diaspora, engagés dans une démarche d'autonomie
par rapport aux idées reçues ont donné
des œuvres intéressantes. […]
Essai courageux et constructif
qui précise bien les limites de la création
jusqu'à nos jours, tout en révélant
les avancées opérées par nos
écrivains dans le sens d'une innovation. Sans
négliger la part d'interrogation, Yanick Lahens
émet des vœux pour l'avenir, souhaitant notamment
la réconciliation entre le destin collectif et
l'individualisme. […]
☐
« Haïti en
littérature », Paris :
La Flèche du Temps, Maisonneuve & Larose, 2000
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LUCIENNE
NICOLAS :
Yanick Lahens (…) montre que,
dès l'origine,
l'écrivain haïtien a été
exilé par la
langue et par le territoire, oscillant entre un ici et un
« ailleurs aussi sûr
qu'inabordable ». Il
ne saurait donc y avoir d' « antagonisme
dedans/dehors », mais une continuité et
un
élargissement de la thématique.
☐ « Espaces urbains dans le roman
de la diaspora haïtienne », Introduction, p. 20
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- «
Tante Résia et les dieux »,
Paris : L'Harmattan, 1994
- « Lettre
des Cayes » in : Bernard Magnier (éd.), À peine plus qu'un
cyclone aux Antilles, Cognac : Le
Temps qu'il fait, 1998
- « La
petite corruption », Port-au-Prince :
Éd.
Mémoire, 1999 ; Montréal :
Mémoire
d'encrier, 2003
- « Dans
la maison du père »,
Paris : Le Serpent à
plumes, 2000, 2005 ; Port-au-Prince : Éd.
Mémoire, 2000 ; Paris : Sabine Wespieser
(SW poche), 2015
- « La
folie était venue avec la pluie »,
Port-au-Prince : Presses nationales d'Haïti, 2006
- « L'oiseau
Parker dans la nuit »,
Montréal : Plume & encre (Vous m'en direz des nouvelles, 8), 2006
- « Port-au-Prince
la dévoreuse », in Une
journée haïtienne,
textes réunis et présentés par Thomas
C. Spear,
Montréal : Mémoire d'encrier ;
Paris :
Présence africaine, 2007
- « La couleur de l'aube »,
Paris : Sabine Wespieser, 2008, 2016 ; Port-au-Prince : Presses nationales
d'Haïti, 2008
- « Failles », Paris : Sabine Wespieser, 2010, 2017
- « Guillaume
et Nathalie », Paris : Sabine Wespieser, 2013 ; Paris : Points (P3309), 2014
- « Bain
de lune », Paris :
Sabine Wespieser, 2014 ; Paris : Points
(P4144), 2015
- « Douces
déroutes », Paris : Sabine Wespieser, 2018
- «
L'oiseau Parker dans la nuit », Paris : Sabine Wespieser, 2019
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Sur le site « île en île » : dossier Yanick
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mise-à-jour : 26 juillet 2021 |
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