Pawana / J.M.G. Le
Clézio ; lecture accompagnée par Bruno
Doucey. - Paris : Gallimard, 2003. -
144 p. : ill. ; 18 cm. - (La
bibliothèque Gallimard, 112).
ISBN 2-07-042842-7
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NOTE
DE L'ÉDITEUR : Avant, il y
avait l'eau laiteuse qui reflétait le ciel, le souffle
rauque des baleines, leur immense dos noir glissant à la
surface de la mer. Avant, John, natif de Nantucket, montait sur le Léonore,
commandé par le capitaine Charles Melville Scammon. L'un
avait un désir de mer qui lui faisait les yeux brillants.
L'autre espérait trouver l'endroit, encore secret,
où se rassemblaient les cétacés.
Depuis cette découverte, les
« pawana » sont prises au
piège, la nature est souillée et les hommes ont
vieilli. Leurs souvenirs sont dans ce livre.
L'accompagnement
pédagogique étudie la construction narrative du
roman et particulièrement son incipit. Le thème
de la baleine, florissant dans la littérature (depuis la
Bible jusqu'à Luis Sepulveda), permet un travail sur
l'intertextualité. La portée éthique
de Pawana rend sensibles les enjeux
écologiques et la défense des
minorités.
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EXTRAIT |
Je me souviens, quand j'avais dix ans, avec les
garçons de Nantucket, nous avons emprunté la
barque du vieux John Nattick et nous avons navigué
à travers la lagune, jusqu'au bout, jusqu'au village de
Wauwinet, là où la bande de terre est si mince
qu'on entend l'océan gronder sur les brisants,
de l'autre côté. Nous avons
abordé sur la plage et nous avons couru
à travers les dunes jusqu'à ce que nous soyons
face à la pleine mer. C'était la
fin de l'après-midi, au mois de juin, je
m'en souviens très bien, nous avons
guetté l'horizon, pour voir revenir les navires des
chasseurs. Le ciel était vide et la mer
avançait avec ses vagues bordées
d'écume qui couraient obliquement vers nous. Nous avons
attendu longtemps, jusqu'au crépuscule, les yeux
brûlés par le vent de la mer. Puis nous sommes
rentrés à Nantucket, où nous
attendaient les coups de fouet. Il me semble
aujourd'hui qu'à peine un battement de
cœur me sépare de cet instant, quand sur
la plage j'essayais en vain d'apercevoir un navire, portant
accroché à son flanc une proie,
entouré de son nuage d'oiseaux.
Après, nous sommes
allés souvent voir le vieux Nattick sur le port. Il
nous parlait du temps où les Indiens
étaient seuls sur l'île, et chassaient
les baleines debout à la proue
des canots, le harpon à la main.
En ce temps-là, les baleines croisaient
dans le canal entre Nantucket et le cap Cod, elles
étaient si nombreuses qu'elles formaient comme une
ombre noire sur la mer, avec les jets de vapeur qui
jaillissaient au-dessus d'elles. Le vieux imitait pour
nous le cri de l'homme de vigie, quand il apercevait
le troupeau des baleines :
« Awaité
pawana ! … »
En ce temps-là, tous
les marins chasseurs de baleines
étaient des Indiens de Nantucket, tous
parlaient le nattick.
☐ pp. 11-13 (éd. 1992)
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- « Pawana »,
Paris : Gallimard, 1992
- « Pawana »
ill. de Georges Lemoine, Paris : Gallimard-Jeunesse (Lecture
junior, 52), 1995
- « Pawana »
ill. de Georges Lemoine, Paris : Gallimard (Folio junior,
1001), 1999
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- J.M.G. et
Jémia Le Clézio, « Sirandanes »,
Paris : Seghers, 1990
- J.M.G. Le
Clézio, « Eloge des
îles » in Paule Laudon (éd.), Rencontres
Gauguin à Tahiti (actes du
colloque, 20 et 21 juin 1989), Papeete : Aurea, 1992
- J.M.G. Le
Clézio, « La quarantaine », Paris : Gallimard,
1995
- J.M.G. Le
Clézio, « Raga, approche du
continent
invisible », Paris : Seuil
(Peuples de l'eau), 2006
- J.M.G. Le
Clézio, « Tempête »,
Paris : Gallimard, 2014
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Association
des lecteurs de JMG Le Clézio |
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mise-à-jour : 17 mai 2021 |
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