Mythologie haïtienne
/ Maximilien Laroche. - Sainte-Foy (Québec) :
GRELCA, 2002. - 233 p. ; 20 cm. - (Essais,
18).
ISBN 2-922736-00-8
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En feignant d'entretenir ses
lecteurs d'évènements qui, au premier regard,
sembleraient anodins ou, au mieux, dignes d'alimenter les
spéculations de spécialistes, Maximilien Laroche
suggère discrètement un art de vivre en
société ; relevant ici
« ce qui [pourrait] passer pour une simple mise en
scène », là
« un détail
insignifiant », s'intéressant ailleurs
à un saurien « qui devrait même
passer inaperçu tellement il est
inoffensif », il donne à voir le monde
sous un angle inusuel et incite à pressentir une utopie
à portée de main.
Le détour
imposé par la « mythologie
haïtienne », par la
« zoopoétique », par
les Mémoires de Toussaint Louverture ou
par les règles du jeu de kay
— ici opposées à celles des
échecs — ancre le discours dans une
expérience intime, vécue douloureusement, celle
d'un peuple quotidiennement confronté à
« l'imprévisibilité de la
subjectivité et [à] l'irrationalité de
l'Histoire ». Comme alternative à la
« tentation du
néo-marronnage » ou de
« l'auto-zombification »,
Maximilien Laroche préconise une haute et patiente
exigence : « la sortie haïtienne
de l'esclavage prouve qu'il faut parier sur le
futur ».
La leçon
s'adresse-t-elle prioritairement aux compatriotes de
l'auteur ? On peut en douter à la lecture du
parallèle entre la cérémonie
célébrée par Robespierre en l'honneur
de l'Être suprême le 20 prairial de l'an II et
celle du Bois-Caïman qui eut lieu dans la nuit du 14
août 1791 aux environs du Cap-Français, capitale
de la colonie française de Saint-Domingue. De part et
d'autre de l'Atlantique les mêmes ressorts sont
tendus : « ces
célébrations […] n'avaient et n'ont
toujours pas d'autre fonction que de servir à une guerre,
celle des images qui opposaient les adversaires de 1791 et continue
d'opposer ceux qui ont pris leur relève ».
Une pressante invite, une
« mission », est
adressée au lecteur de bonne volonté, celle de
« partir, d'aller voir ailleurs, pour rapporter des
exemples ; d'apprendre non pas d'Eux seuls mais par Eux
tous ». De quoi amplement justifier une escale en
Haïti avec Maximilien Laroche.
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EXTRAIT |
Le Bizango, caméléon volant,
représente […] moins le danger qui nous menace
qu'un défi à relever. En d'autres termes, du fait
qu'il peut être vaincu, le Bizango ne se
révèle dangereux que si nous ne parvenons pas
à relever le défi qu'il représente.
[…] Le Bizango est un illusionniste. Il ne faut pas se
laisser embobiner par ses tours de passe-passe. Ou plutôt il
faut savoir le saisir, la main dans le sac, entre deux tours de
prestidigitation.
La vie, comme tour de magie !
Voilà quand même une approche pour le moins
optimiste de la réalité ! Certains
diraient même : une approche réaliste
magique !
☐ Zoopoétique, p. 174
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- « Bizango :
essai de mythologie haïtienne », Sainte-Foy
(Québec) : GRELCA (Essais, 14), 1997 —
« les articles de Bizango: essai de mythologie
haïtienne (…) ont (…)
été intégrés dans un
bouquin plus volumineux intitulé Mythologie haïtienne »
Lionel Péan sur son blog.
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- « Le
miracle et la métamorphose : essai sur les
littératures du Québec et
d'Haïti »,
Montréal : Éditions du Jour, 1970
- « L'image
comme écho : essai sur la littérature et
la culture
haïtiennes »,
Montréal : Nouvelle optique,
1978
- « La littérature
haïtienne : identité, langue,
réalité »,
Ottawa : Leméac (Les Classiques de la
francophonie), Bruxelles : Louis Musin,
1981 ; Port-au-Prince :
Éd. Mémoire, 2001
- « Idem de Villard
Denis » in [coll.], Littérature et
société en Haïti : Davertige,
Philoctète, Phelps, Montréal :
CIDIHCA, 1987 ; Port-au-Prince : Henri Deschamps, 1991
- « Le
patriarche, le marron et la dossa : essai sur les figures de
la
gémellité dans le roman
haïtien »,
Sainte-Foy (Québec) : GRELCA (Essais, 4), 1988
- « Dialectique
de l'américanisation », Sainte-Foy
(Québec) : GRELCA (Essais, 10), 1993
- « La double scène de
la représentation : oraliture et
littérature dans la Caraïbe »,
Port-au-Prince : Éd. Mémoire, 2000
- « L'avènement de la
littérature haïtienne »,
Port-au-Prince : Éd. Mémoire, 2001
- « Prinsip
Marasa » texte en créole et en
français,
Sainte-Foy (Québec) : GRELCA (Essais, HS1), 2004
- « Littérature
haïtienne comparée »,
Québec : GRELCA (Essais, 19), 2007
- « Se
nan chimen jennen yo fé lagé »
texte en
créole et en français, Sainte-Foy
(Québec) :
GRELCA (Essais, HS2), 2007
- « Nan
kalfou espastan, sa k ap pase ? » texte en
créole haïtien, Sainte-Foy
(Québec) : GRELCA
(Essais, HS3), 2013
- « Le
poids des mots », Sainte-Foy
(Québec) : GRELCA (Essais, 20), 2013
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mise-à-jour : 17
août 2017 |
Maximilien
Laroche,
né en 1937 au
Cap-Haïtien, est mort le 16 juillet 2017
au Québec
— où il a enseigné pendant
plus de 40 ans. |
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