L'anaconda
/ Matthew Gregory Lewis ; trad. par Pauline Tardieu-Collinet.
- Le
Bouscat : Finitude, 2016. - 128 p. ;
20 cm.
ISBN
978-2-36339-070-7
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NOTE
DE L'ÉDITEUR :
Ceylan, 1780. Un homme est traqué par un Anaconda
géant,
la créature la plus dangereuse de l'île.
L'angoisse et la
terreur montent parmi ses proches, l'animal semble indestructible. Une
lutte impitoyable s'engage.
M.G. Lewis
réussit avec brio
à exporter le roman gothique anglais dans un
décor
exotique. Son récit commence dans un salon feutré
entre
gens de bonne compagnie, puis bascule vers la sauvagerie de la jungle
indienne.
Jamais
réédité depuis sa
première publication en France en 1822, ce court roman
paraît aujourd'hui dans une nouvelle traduction.
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Depuis
la Genèse, le serpent est associé au mal dans
l'imaginaire occidental ; les lieux où il
prospère
ont toujours mauvaise réputation. De nombreux
récits
célèbrent les saints qui ont purgé des
îles
de ce fléau : Saint Patrick en Irlande 1,
Saint Pol Aurélien à l'île de Batz,
Saint Amand
à l'île d'Yeu, Saint Honorat à
l'île de
Lérins, …
Hors
d'Europe, sur les terres
nouvellement colonisées, la présence de serpents
dangereux est attestée par les découvreurs les
explorateurs et les premiers colons qui sont enclins à y
voir
l'indice de la perversité naturelle de ces terres et de
leurs
habitants — une sauvagerie qui justifierait si
nécessaire l'intervention civilisatrice et morale du
colonisateur.
Le
récit de Matthew G. Lewis pourrait
s'inscrire dans cette ligne de pensée où l'on
insiste sur
les mensurations extraordinaires des monstres rampants, sur
l'extravagance de leur comportement, sur l'insatiabilité de
leur
appétit, sur les aspects les plus sinistres du danger qu'ils
représentent. Mais, des années après
la parution
de « L'anaconda », M. G. Lewis a
séjourné à deux reprises en
Jamaïque 2
où sa famille possédait des plantations. Il porte
à cette occasion un regard sévèrement
critique sur
la colonisation britannique.
1. |
Dans son premier roman — The snake's pass —,
Bram Stoker suggère que Saint Patrick n'aurait pas
totalement
réussi à chasser le serpent hors d'Irlande.
Cf. « Le défilé du
serpent »
édité et traduit par Claude Fierobe,
Rennes : Terre
de brume, 2011. |
2. |
Il existe un boa
de la Jamaïque (Chilabothrus subflavus) qui peut
atteindre deux mètres de long et qui a donné lieu
à de nombreuses descriptions fantaisistes. |
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EXTRAIT |
Tout
en conversant, nous avions continué d'avancer à
la faveur
de l'épais sous-bois, pour nous arrêter
à
guère plus de cent pas du monstre. Nous pûmes
alors
l'examiner avec précision et embrasser d'un seul coup
d'œil sa gigantesque silhouette. C'était un
spectacle qui
semblait avoir été créé
pour susciter
à parts égales l'horreur et l'admiration,
l'animal
réunissait la beauté la plus
singulière et la plus
éclatante à tout ce qui pouvait inspirer
l'appréhension. Bien que je sentisse à sa vue
chacun de
mes membres se mettre à trembler involontairement,
j'étais forcé d'admettre n'avoir jamais
assisté
à démonstration plus fascinante ni plus
captivante.
L'anaconda
s'employait à s'enrouler en un millier d'anneaux parmi les
branches des palmiers avec une vivacité extrême et
une
rapidité inconcevable, au point qu'il était
souvent
impossible de suivre ses mouvements des yeux. On le voyait un moment
s'accrocher par le bout de la queue au sommet du plus haut des arbres
et, étiré de tout son long, se balancer d'avant
en
arrière comme le balancier d'une horloge, si bien que sa
tête semblait presque effleurer la terre ; puis
l'instant
suivant, avant que l'œil ne saisisse son intention il
disparaissait totalement dans la canopée feuillue.
Tantôt
il se glissait le long du tronc en s'enroulant tout autour en de
multiples anneaux ; tantôt seule
l'extrémité
de sa queue restait entourée au bas du tronc, tandis qu'il
étirait tout son corps sur l'herbe et relevait haut sa
tête et son cou puissant et décrivait des cercles,
grands
ou petits selon son bon plaisir.
☐ pp. 55-57 |
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- « The
anaconda », in Romantic
tales, vol. II, London : Longman,
Hurst, Rees, and Orme, 1808
- « L'anaconda,
histoire indienne » trad. de l'anglais par M.
de S…, in Blanche
et Osbright, tome second, Paris : Mme Ve.
Renard, 1822
|
→ Julia M. Wright,
« Lewis's Anaconda :
gothic homonyms and sympathetic distinctions », Gothic Studies, 3,
3 (2001), pp. 262-378
|
- Matthew
Gregory Lewis, « Le
brigand de Venise », Marseille :
Laffitte, 1978
- Matthew
Gregory Lewis, « Journal de voyage à la
Jamaïque », Paris :
José Corti (Domaine
romantique, 33), 1991
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mise-à-jour : 4
août 2017 |
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