La
Tempête [suivie de]
Henry VIII et de l'Œuvre lyrique [Œuvres
complètes, tome XII]
/ William Shakespeare ; éd. bilingue sous la dir.
de Pierre Leyris et Henri Evans. - Paris : Le Club
français du livre, 1968. - 932 p. ;
21 cm.
|
Dans La Tempête,
les rêveries utopiques se juxtaposent sans se confondre,
alimentant de ce fait la tension dramatique. Caliban porte, et exprime,
le souvenir et l'âpre nostalgie d'une utopie
originelle : « Tu
m'as enseigné le langage, et le profit / Qui m'en
revient,
c'est de savoir comme on
maudit » 1.
À quoi répond le
projet utopique de Prospéro : humaniser et
civiliser « cette île [qui] n'avait pour
l'honorer nulle présence humaine » 2 ; ou l'ambition colonisatrice
plus triviale des comparses, comme Stephano qui rêve de se
tailler un royaume en exploitant le ressentiment de Caliban envers
Prospéro : « je tuerai cet
homme. Sa fille et moi, nous serons roi
et reine » 3.
Le dénouement
introduit un dernier espoir, ce brave new world salué
par Miranda
— « Nouveau …
pour toi » lui répond Prospero 4. On connait l'écho
donné par Aldous Huxley
à la surprise émerveillée de Miranda.
Avant ou après Huxley,
écrivains et penseurs n'ont cessé d'interroger La
Tempête : W.H.
Auden, Robert Browning, Aimé
Césaire, Lawrence Durrell, Octave Mannoni, Ernest
Renan, etc.
1. |
Acte I, scène 2 |
2. |
Acte I, scène 2 |
3. |
Acte III, scène 2 |
4. |
Acte V, scène 1 |
|
JAN
KOTT : Les commentateurs de La
Tempête aiment à retrouver ici
l'atmosphère idyllique de l'Arcadie. Apparemment, ils
déchiffrent Shakespeare à l'aide de bien
mauvaises représentations. Celles
à ballerines et décors
à transparence. Ils ne veulent voir que
féerie et ballet. Mieux vaut faire confiance à
ceux qui, sur cette île, ont été soumis
à l'épreuve de la folie :
Lieu de tourments,
d'anxiétés, de prodiges et de
stupeurs ! Qu'un pouvoir céleste nous
mène hors de ce terrible pays ! — (V, 1)
Et c'est pourquoi il est vain
de chercher l'île de Prospéro 1
même parmi les taches blanches des anciennes cartes,
là où s'interrompt le tracé des
côtes, pâlit le bleu de l'océan
et apparaissent des formes d'animaux fantastiques ou bien
l'inscription ubi leones. Là-bas non
plus, elle n'existe pas. L'île de Prospéro est
soit le monde, soit la scène. Pour les
élisabéthains, cela revenait du reste au
même ; la scène était
le monde et le monde était une scène.
Sur l'île de
Prospéro se déroule, extrêmement
raccourcie, l'histoire shakespearienne du monde. Elle
est lutte pour le pouvoir, meurtre, révolte et
violence.
☐ « Shakespeare
notre contemporain », Paris : Payot, 1978
(pp. 260-261)
1. |
On a toujours cherché à
situer géographiquement la scène de La Tempête
— en Méditerranée, comme le texte le
suggère, ou à proximité du
continent américain récemment
découvert au temps de Shakespeare ; les
récits de navigateurs ont
alimenté d'ingénieuses
hypothèses : les Bermudes, ou parmi d'autres, la
petite île de Cutty
Hunk à proximité de Martha's Vineyard. |
|
COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- «
The Tempest », in Comedies,
Histories, & Tragedies, London : Isaac Iaggard,
and Ed. Blount, 1623
|
- «
La Tempête » trad. par Dorothée
Zumstein, Paris : Nouvelles éditions Place, 2017
- «
La Tempête » texte établi par
Gisèle Venet,
traduit par Jean-Michel Déprats,
présenté et annoté par Margaret
Jones-Davies, in Œuvres
complètes vol. 7, Paris :
Gallimard (La
Pléiade), 2016
- « La Tempête »
trad. et notes de François-Victor Hugo, Paris : RBA France,
Le Monde, 2015
- « La
Tempête » éd. bilingue, trad.
de Pierre Leyris, préface de J.D. Jump, Paris :
Flammarion (GF, 668), 2014
- « La
Tempête » éd. et traduction de
François
Laroque, Paris : Librairie générale
française
(Le Livre de poche, 31267), 2011
- «
La Tempête » trad. de Jean-Michel
Déprats, Montreuil : Éd.
Théâtrales (Des
Classiques), 2007
- «
La Tempête » trad. de l'anglais par
André
Markowicz, Besançon : Les Solitaires intempestifs (Traductions du XXIe
siècle), 2004
- « La
Tempête » éd. bilingue,
préface, traduction et note d'Yves Bonnefoy,
Paris : Gallimard (Folio théâtre, 43),
1997
|
- W. H. Auden,
« The sea and the
mirror : a commentary on Shakespeare's The Tempest »,
Princeton : Princeton university press, 2003
- W. H. Auden,
« La mer et le
miroir, commentaire de La
Tempête de Shakespeare »
éd. bilingue, Paris : Le Bruit du temps, 2009
- Aimé
Césaire, « Une
tempête », Paris :
Seuil (Points, 344), 1997
- Marie-Thérère
Jones-Davies (éd.), « Shakespeare :
cosmopolitisme et insularité »,
Paris : Les Belles lettres, 1994
- Jean-Michel
Racault, « Insularité,
théâtralité et pouvoir dans La Tempête de
Shakespeare », in Robinson
& compagnie : aspects de l'insularité
politique de Thomas Moore à Michel Tournier, Paris :
Petra (Des îles), 2010
|
|
|
|
mise-à-jour : 2
janvier 2018 |

|
|
|