MURATA Kiyoko

Fille de joie, trad. du japonais par Sophie Refle

Actes sud

Arles, 2017

bibliothèque insulaire

   
Autour du Japon
des femmes et des îles
parutions 2017
Fille de joie / Murata Kiyoko ; traduit du japonais par Sophie Refle. - Arles : Actes sud, 2017. - 270 p. ; 22 cm.
ISBN 987-2-330-07568-2
Sur mon île
Mon père à moi ma mère à moi
Ils vont pieds nus
Ici j'mets des sandoles
Faut des sandoles pour être humain ?


p. 19

NOTE DE L'ÉDITEUR
:
À
quinze ans, Ichi est vendue au tenancier d'une maison close par ses parents — seule possibilité de survie pour cette famille de pêcheurs. Pas vraiment belle, sauvageonne, l'adolescente parle une langue insulaire proche du chant des oiseaux, mais elle est néanmoins placée dès son arrivée sous la tutelle de la courtisane la plus recherchée du quartier réservé. Devenue l'une de ses suivantes, Ichi reçoit de la part de cette dame des leçons d'élégance, de savoir-vivre, elle est initiée aux rites de la séduction, à ceux de la soumission. Et malgré la violence de leur condition, il se trouve néanmoins en ces lieux une chance inestimable pour les prostituées, une possibilité d'échappées qu'Ichi va saisir : la loi oblige les tenanciers de maison close à envoyer leurs filles de joie à l'école.

Assidue, Ichi apprend à lire, à compter, à écrire, elle peut ainsi consigner sa nostalgie, décrire ses peurs quotidiennes. Avec le temps et soutenue par une institutrice, elle prend conscience du pouvoir que lui procure le savoir et, comme d'autres autour d'elle, décide de se rebeller.
       
Murata Kiyoko est née en 1945 à Yahata, au nord de l'île de Kyūshū, En 1987, elle reçoit le prix Akutagawa pour Nabe no naka (Le chaudron dans la traduction d'Anne-Yvonne Gouzard), qui sera adapté au cinéma par Akira Kurosawa sous le titre de Rhapsodie en août.
EXTRAIT    La fumée blanche de la cheminée du bain public, qui montait doucement dans le ciel où flottaient quelques nuages, rappelait à Ichi celle du volcan de son île qui cachait son sommet.
   — Quand je vois cette fumée, je pense à chez moi.
   Comment se faisait-il qu'elle s'en souvienne si nettement alors qu'elle en était si loin ?
   — Ah oui ? C'est où, chez toi ?
   — Une île 1 au sud de Satsuma, où il y a un volcan qui crache le feu.
   — Moi, je suis de Kumamoto, je viens d'un village au pied du mont Asō, un grand volcan qui en crache aussi, répondit vivement Takenoha.
   Ichi n'avait jamais entendu parler du mont Asō et Takenoha ne connaissait pas plus le nom d'Iōjima. Elles étaient aussi ignorantes du monde l'une que l'autre.
   — La fumée, ça me rappelle les tortues. Il y en a de grosses dans la mer chez nous. Elles sont comme des dieux pour nous, annonça-t-elle fièrement.
   — Moi, la fumée me rappelle les vaches qui paissent sur les flancs du volcan. Ça fait dix ans que j'en ai pas vu. En hiver, leurs cornes sont chaudes. On peut se réchauffer les mains dessus quand on a froid.
   Elle montra le geste à Ichi en serrant sa serviette entre ses mains fines. Elles se quittèrent devant la maison Kagetsu.

pp. 39-40
   
1. Iōjima dans l'archipel d'Ōsumi, au sud de l'île de Kyūshū et au nord d'Okinawa et des îles Ryūkyū.
COMPLÉMENT BIBLIOGRAPHIQUE
  • « ゆうじょこう (Yūjokō) », Tōkyō : Shinchōsha, 2013

mise-à-jour : 23 mai 2017
MURATA Kiyoko : Fille de joie
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