L'Îlienne,
roman de l'île de Sein / Jeanne Nabert. - Cesson-Sévigné :
La Découvrance, 1996. - 237 p. ; 21 cm.
- (L'amateur averti).
ISBN 2-84265-013-1
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Souvent présentée
dans la littérature comme un lieu obscur et rude, l'île de
Sein prend des couleurs avec Jeanne Nabert, et ses contours
s'adoucissent. Au pied du phare — comme aujourd'hui —
fleurissent des pavots jaunes ; le vent tombe parfois, la mer
se calme — « mais ces voluptueux soupirs,
cette lente pamoison de l'océan, cet imperceptible mouvement
d'étreinte des algues autour de l'île, étaient
plus terribles, plus despotiques que les fureurs cahotiques de
l'ouragan » (p. 25).
Ce
nouveau regard porté sur l'île permet à Jeanne
Nabert d'accuser le trait, en soulignant par contraste la violence des
passions qui animent des îliens comme enfermés dans leurs
traditions.
A.-P. Segalen pense que
Jeanne Nabert est la première à utiliser l'adjectif
« sénan(e) » dans une œuvre
littéraire. Cf. Les Cahiers de l'Iroise, n° 4,
octobre-décembre 1983. À noter également que
Jeanne Nabert introduit dans son roman un personnage réel, le
peintre Charles Cottet.
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NOTE DE L'ÉDITEUR : Dans le cadre fracassé, et
vaguement étrange, de l'île de Sein, où,
dit-on, l'on peut travailler sans être dérangé
par aucune tentation, un intellectuel nourrit pour
une îlienne, belle créature qui s'ignorait elle-même, des
sentiments que les naïfs habitants de l'île de Sein
ne perçoivent pas. Elle-même les comprend elle ?
Lui rêve d'amours, elle
parle d'éternités mystiques … Elle se refuse
mais, pour avoir simplement côtoyé un étranger,
et accepté son platonique hommage, elle est bannie de
son île.
Et elle quitte cette ténébreuse
lumière marine qui donnait la même âme, ou,
si l'on veut, la même absence d'âme, aux pierres
et aux visages.
Et elle rejoint la capitale.
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EXTRAIT |
La tempête s'était
[…] apaisée. Sous le ciel circulaire maintenant sans
nuages, la mer couleur tourterelle poussait autour des grèves
ses roucoulements alternés. La Baie des Trépassés
au loin semblait élyséenne. Mais ces voluptueux
soupirs, cette lente pamoison de l'océan, cet imperceptible
mouvement d'étreinte des algues autour de l'île,
étaient plus terribles, plus despotiques que les fureurs
cahotiques de l'ouragan. Le ciel et la mer vous prenaient par
le vide ; une sorte de mort par la douceur vous annihilait
mieux que le tonnerre des vagues, vous absorbait comme un grain
de sable, comme une goutte d'eau, si bien que j'en vins, au bout
de quelques jours, à désirer le retour de la pluie
rageuse, du vent démoniaque, du soulèvement monstrueux
des houles, de tout le dynamisme de la tempête.
☐ pp. 25-26
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE
- « L'Îlienne »,
Paris : Librairie celtique, 1946
- « Le Cavalier de
la mer et autres romans : Les Termagies, L'Îlienne »,
Spézet : Coop Breizh, 2003
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mise-à-jour : 15 juin 2005 |
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