Etincelles
/ René Depestre ; préface d'Edris St. Amand. -
Port-au-Prince : Imprimerie de l'Etat, 1945. -
XV-44 p. ; 19 cm.
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La préface d'Edris Saint-Amand 1
éclaire utilement la brève et fulgurante
plaquette qui
marque l'entrée en poésie de René
Depestre.
L'auteur avait dix-neuf ans. Relevant “ l'ardente
passion ”
qui
s'exprime, Edris St. Amand précise que la jeunesse de
l'auteur
plie les règles du genre au flux de la création
— “ un art nouveau s'exprime
nécessairement dans une forme nouvelle ”.
Le
poète chante la terre d'Haïti et dénonce
le
“ concert de souffrances ” qui
l'accable sans
oublier
d'où il vient — “ Me
voici / fils de
l'Afrique lointaine ”. Mais tout sensible qu'il soit
au
“ cri de sa race ”, il dédaigne
le repli
frileux et s'ouvre au monde, comme
en pressentiment de l'exil qui suivra de peu
l'éruption :
j'entends
déjà dans le lointain
monter la sourde clameur d'une mosaïque
de souffrances
la grondante symphonie des abandonnés.
blonds, jaunes, noirs, peu importe.
☐ Piété
filiale, p. 25
Enfin,
comme une marque qui signe la poésie de René
Depestre, irrespect, amour, tendresse
et humour
courent de page en page
— entre angoisse et colère
1. |
Edris
Saint-Amand (1918-2004) — enseignant, critique
littéraire,
poète et romancier, engagé dans tous les combats
sociaux
et politiques de la société haïtienne. |
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EDRIS
St. AMAND
: René
Depestre a dix-neuf ans. L'âge où le
cœur
déborde de toutes les vertus, de toutes les promesses.
Où
l'intelligence, non encore avilie, alourdie, mais agile comme une
flèche décochée, va droit au
cœur des
problèmes. Des problèmes qui, semble-t-il,
auraient
dû être la passion nécessaire,
consumante de tous
les esprits. Ici quelle foi, quel enthousiasme
créateur !
L'enthousiasme brûle dans chaque vers, même quand
le
poète, torturé, déborde son angoisse.
Et ce n'est
pas jeunesse ou utopie, mais un talent précoce se
révèle, attachant, lourd de promesses ;
et l'artiste
affirme aussi une prise de conscience déjà
aiguë de
sa position de classe, comme de la loi profonde de son être.
Pour
quelques hommes, la vie est impossible sans la conquête et le
dépassement de soi-même.
[…]
☐
Préface, p. IX
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EXTRAIT |
DONNEZ-MOI LA LIBERTE
A Marcel Boni
Dites aux quatre vents
des ondes
que je suis un vagabond
un
écrivassier, monstre du ridicule
dites que je me suis
embarqué
dans l'aventure du
poème
sans
diplômes (présomptions de connaissance)
sans passeports
sans aucune servitude
dites que mes soirs
s'épuisent
dans le drame des
bas-fonds obscurs.
que je
perpétue
les manèges
d'une suite de mécontents
dites que je suis laid
lépreux,
fou, révolutionnaire
mais, de
grâce,
donnez-moi la
liberté
☐
p. 29
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- « Etincelles
(suivi de) Gerbe de sang »,
Port-au-Prince : Presses nationales d'Haïti, 2005
- «
Etincelles », in Rage
de vivre : Œuvres poétiques
complètes, Paris : Seghers, 2006
|
- « Gerbe de sang »,
Port-au-Prince : Imprimerie de l'État, 1946
- « Le mât de cocagne »,
Paris : Gallimard, 1979 ; Gallimard (Folio, 3081),
1998
- « Hadriana dans tous mes
rêves », Paris :
Gallimard, 1988 ; Gallimard (Folio, 2182), 1990
- « Ainsi parle le fleuve noir »,
Grigny : Paroles d'aube, 1998
- « Le métier à
métisser », Paris :
Stock, 1998
- « Encore une mer à traverser »,
Paris : La Table ronde, 2005
- « Popa Singer »,
Paris : Zulma, 2016
- « Cahier
d'un art de vivre : Journal de Cuba, 1964-1978 »,
Arles : Actes sud (Archives privées), 2020
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Sur
le site « île
en île » :
dossier René
Depestre |
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mise-à-jour : 7 décembre 2020 |
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Frontispice de l'édition de 1945 |
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Texte en consultation sur le site dLOC,
Bibliothèque Numérique des Caraïbes
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