La contrainte
de l'inachevé / Anthony Phelps. - Montréal :
Leméac, 2006. - 204 p. ; 22 cm.
ISBN 2-7609-3279-6
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9ème édition du Prix du Livre Insulaire : Ouessant 2007 |
livre
en compétition |
Comme Anthony Phelps Simon
Nodier est écrivain, et comme lui il a du fuir Haïti en
proie à la dictature. Le roman s'ouvre quand, après
vingt-cinq ans d'exil en Amérique du nord puis au Mexique, Simon
se décide à passer quelques mois sur sa terre natale.
Tribulations et déceptions attendent celui
qui tente de reconquérir un pays perdu ; elles forment la trame
première du récit à laquelle fait écho la
fiction — bribes de roman dans le roman — qu'élabore
Simon comme pour élucider ou, au contraire, esquiver les ombres
qui se lèvent au fil de sa remontée du temps : « quel
serait l'intérêt d'un roman qui, tout en racontant une
histoire d'amour inachevée, dirait, sur fond de
déchéance de ses élites, la
décrépitude d'un pays ? »
Anthony Phelps orchestre, sous le signe de l'inachèvement,
une histoire d'amour grave et dure — amour d'une terre, amour
d'une femme. Dans sa brièveté, la chute laisse une place
à l'espoir.
❙ | Poète,
romancier et conteur, Anthony Phelps est né en Haïti en
1928. Après avoir goûté aux prisons de Duvalier, il
s'exile en 1964 à Montréal où il fait du
théâtre, de la radio et de la télévision.
Deux fois récipiendaire du Prix de poésie Casa de las
Americas à Cuba, Anthony Phelps a vu certains de ses ouvrages
être traduits en allemand, anglais, espagnol, italien, russe et
ukrainien. |
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EXTRAIT |
Il
tira une cigarette du paquet posé sur le tableau de bord,
l'alluma à son briquet. Secouant la tête, il regarda Simon
tassé contre la portière et se remit à rire.
— Tu es ici depuis combien de temps ?
— Bientôt trois mois, pourquoi ?
— Je sais que tu n'es pas resté enfermé chez
Tante Alice. Tu as fait des balades à Kenscoff, au Cap et
ailleurs. Il ne s'agissait que de très courts séjours,
mais dis-moi, à Port-au-Prince ou à Pétionville
où tu vis, combien de fois les gens t'ont-ils pris pour un
touriste ? Je veux dire, les gens de la rue, les marchandes ou
certaines vendeuses dans les boutiques.
— Bof ! ça m'est arrivé souvent. Mais plus maintenant.
— Pourtant, au bord de la rivière, cela t'a
blessé qu'une paysanne te perçoive comme un
étranger. Tu pensais retrouver ton pays, et tu te rends compte
que les gens, les petites gens, ceux qui représentent la
très grande majorité, ne te connaissent pas, ne te
reconnaissent pas. Pire, ils te prennent de prime abord pour
l'étranger que tu es devenu. Plus personne ne te connaît.
Tu dis ton nom, qui est celui d'une famille ancienne d'ici, je veux
dire de la capitale et de Pétionville, mais seuls quelques
intellectuels, une centaine de lecteurs de la bourgeoisie, savent qui
tu es. Le petit peuple de la capitale, de la campagne n'a aucune
idée de ton parcours littéraire, de tes publications, de
ce que tu représentes. Moi, cela m'a pris dix ans pour me
réinsérer, pour que les gens m'acceptent sans faire de
référence à New York, Montréal ou
Tombouctou.
☐
pp. 98-99 |
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COMPLÉMENT BIBLIOGRAPHIQUE | - « Eté »,
Port-au-Prince : Imprimerie N.A. Théodore (Samba), 1960
- « Présence »,
Port-au-Prince : s.n. (Haïti Littéraire), 1961
- « Eclats de silence »,
Port-au-Prince : Art graphique presse (Haiti Littéraire), 1962
- « Points cardinaux »,
Montréal : Holt, Rinehart & Winston, 1967
- « Mon pays que voici
[suivi de] Les dits du fou-aux-cailloux », Paris :
Pierre-Jean Oswald, 1968
- « Le conditionnel »,
Montréal : Holt, Reinhart & Winston (Théâtre vivant, 4), 1968
- « Et moi, je suis
une île », Ottawa : Leméac (Francophonie vivante), 1973 ; Montréal : Bibliothèque québécoise, 2010
- « Moins l'infini
(roman haïtien) », Paris : Editeurs français
réunis, 1973 ; Montréal : CIDIHCA, 2002
- « Mémoire
en colin-maillard », Montréal : Nouvelle
optique (Caliban & Cie), 1976 ; Montréal : CIDIHCA, 2001
- « Motifs pour le
temps saisonnier », Paris : Pierre-Jean Oswald (J'exige la parole, 48)
1976
- « La bélière
caraïbe », La Habana : Casa de las Americas,
1980 ; Montréal : Nouvelle optique, 1980
- « Même le soleil
est nu », Montréal : Nouvelle optique,
1983
- « Haïti !
Haïti ! » avec Gary Klang, Montréal :
Libre expression, 1985
- « Orchidée
nègre », Montréal : Triptyque,
1987
- « Les
doubles quatrains mauves », Port-au-Prince :
Ed. Mémoire, 1995
- « Mon pays que voici »,
contribution au recueil collectif A
peine plus qu'un cyclone aux Antilles, Cognac :
Le temps qu'il fait, 1998
- Carl Hiebert (phot.), « Paroles et lumières :
Haïti : Where light speaks » textes
de Syto Cavé, Anthony Phelps et Sandy Noble Yates, Missisauga
(Ontario), Columbus (Ohio) : International Child Care, 1999
- « Immobile voyageuse
de Picas et autres silences », Montréal :
CIDIHCA, 2000
- « Femme Amérique »,
Trois-Rivières (Québec) : Ecrits des forges ;
Marseille : Autre temps, 2004
- « Paul
Laraque : vingt ans sous les drapeaux, entre Marx et
Breton », Montréal : Caliban, 2004
- « Une
phrase lente de violoncelle », Montréal :
Éd. du Noroît, 2005
- « Mon pays que voici » nouv. éd., Montréal : Mémoire d'encrier, 2007
- « Le mannequin enchanté », Montréal : Leméac, 2009
- « Une plage intemporelle », Montréal : Éd. du Noroît, 2011
- « Nomade je fus de très vieille mémoire », Paris : Bruno Doucey (Tissages), 2012
- « Le massacre de Jérémie » avec Gary Klang, Montréal : Dialogue Nord-Sud, 2014
- « Je veille, incorrigible féticheur », Paris : Bruno Doucey (Soleil noir), 2016
| Sur le site « île en île » : dossier Anthony Phelps |
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mise-à-jour : 4 janvier 2017 | |
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