8ème
édition du Prix du
Livre Insulaire (Ouessant 2006)
ouvrage sélectionné |
La sagaie d'Henderson
/ Ronald Wright ; traduit de l'anglais par Henri Theureau ;
postface d'Alberto Manguel. - Arles : Actes sud, 2005. -
430 p. ; 22 cm. - (Le Cabinet de lecture).
ISBN 2-7427-5566-7
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Ronald Wright déroule
le fil d'une histoire tortueuse où s'articulent les lettres
— contemporaines — d'une mère à sa fille
et les fragments rescapés du journal tenu pas un de leurs
parents — officier au temps de la reine Victoria. Au terme
du parcours, les liens unissant les deux époques du récit
sont dévoilés éclairant, au-delà
des péripéties d'une histoire familiale ou des
errements prêtés à un rejeton de la famille
royale, la persistance de relations profondément déséquilibrées
entre les métropoles européennes (ici le Royaume-Uni
et la France) et certains pays ou territoires éloignés
d'Afrique et d'Océanie.
L'intrigue se tend à la
fin du XIXe siècle, au cours d'une croisière qui
de Tasmanie conduit à Raiatea en passant par les îles
Fidji ; et c'est à Nuku Hiva aux îles Marquises
que la trame en est dévoilée, un siècle
plus tard.
L'auteur prend appui sur des
faits avérés et cite ses sources, comme pour mieux
brouiller les pistes ; de même, les parages où
se meuvent ses héros lui pemettent de fréquentes
allusions aux meilleurs textes de la « littérature
de voyage », ceux de Melville notamment (en l'occurence
« Moby Dick »
et « Taïpi ») ou
de Loti qui sont à l'occasion l'objet d'amusantes parodies
— Tiurai emprunte à Rarahu … et plus encore
à Fayaway quand elle pousse Henderson à partager
son bain.
Références et clins
d'œil ne sont pas absents dans la partie du roman qui se déroule
à l'époque contemporaine ; ainsi se devine, derrière
Lars Lindqvist, silhouette confucéenne et claquettes
vert citron, une personnalité qui fut familière
à Tahiti, mais la tonalité dominante reste grave
— il est question des expériences nucléaires
et des dérives qui y sont liées, du sabotage du
Rainbow Warrior en Nouvelle-Zélande, …
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EXTRAIT |
La grande rade de Taiohae était
autrefois un cratère dont le mur extérieur, il
y a des millions d'années, s'effondra pour laisser entrer
l'océan. Le résultat est une baie de deux miles
de large, en fer à cheval. La plus grande partie du mur
est encore debout et s'élève depuis une plage en
croissant jusqu'à un pain de sucre noir de trois mille
pieds de haut, couvert d'une mousse de fougères et d'une
dentelle de minuscules cascades qui s'effilochent dans le vent.
Depuis cette pointe centrale, les bords du cratère embrassent
la baie de falaises abruptes qui, vers l'entrée, se rejoignent
comme les pinces d'un crabe. Détail final qui est presque
« trop », des aiguilles rocheuses d'élèvent,
droites dans l'eau, au bout de chaque pince.
« Eperdu d'admiration
devant sa beauté (écrit Melville), j'eus un pincement
de regret à penser qu'une scène si envoûtante
fût dissimulée aux yeux du monde. »
J'éprouvai le sentiment
exactement opposé : Dieu merci cet endroit était
inaccessible ! Sinon il aurait fini comme Rio, ou comme
Acapulco. Et il n'y aurait aucune chance qu'un Anglais ait pu
s'y cacher trente six ans.
☐ p. 294
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- « Henderson's spear »,
Londres : Doubleday, 2001
- « La sagaie d'Henderson », Arles : Actes sud (Babel, 747), 2006
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mise-à-jour : 8 avril 2014 |
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