Les pierres de Venise / John
Ruskin ; trad. Mathilde Crémieux ;
présentation, introduction et notes de Jean-Claude
Garcias ; préface de Frédéric
Edelmann. - Paris : Hermann, 1983. -
XXXIV-254 p. : ill. ; 21 cm. -
(Savoir).
ISBN 2-7056-5950-1
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John
Ruskin (1819-1900) exprima sa passion pour
Venise dans un ouvrage en trois forts volumes ; de cet ensemble
insurpassable mais d'une grande densité et d'un style parfois
ardu, l'auteur tira en 1879 une version abrégée qui fut
traduite en français
par Mathilde Crémieux en 1906.
Le court
chapitre consacré à Torcello provient du tome II
(1853) de l'édition originale, The
Sea-stories ; y figurait
également un développement consacré
à Murano qui n'a pas été repris dans
la version abrégée.
À Torcello,
Ruskin exerce et combine ses deux disciplines de
prédilection : l'histoire et l'architecture.
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MARCEL
PROUST
: (...)
La
Venise agonisante de Barrès, la Venise carnavalesque et
posthume
de Régnier, la Venise insatiable d'amour de Mme de Noailles,
la
Venise de Léon Daudet, de Jacque Vontade, exercent sur toute
imagination bien née une fascination unique. Et, maintenant,
de
cette contemplation un peu passive de Venise, Ruskin va nous faire
sortir.
Il nous
permettra bien de glisser parfois en gondole. Il a avoué
lui-même dans Praeterita
la molle
volupté qu'il y avait trouvée. Mais il va
falloir, les Pierres
de Venise à
la main, aborder à toutes les églises et
à ces
demeures, à demi dressées, délicieuses
et roses,
hors des eaux où elles plongent, étudier chaque
chapiteau, demander une échelle pour distinguer un relief
dont
Ruskin nous signale l'importance et que, sans lui, nous n'aurions
jamais aperçu ; ne pas se contenter de regarder
Venise
comme le décor qui inspira jadis à Daniel
Halévy
des pages exquises et dédaigneuses, mais comme une
cité
qui fut vivante, qui fut entre toutes les cités vivantes,
noble
et sage, et dont la noblesse, la sagesse et la vie sont encore visibles
et admirables dans ces pierres qu'elle ordonnèrent selon
leurs
lois. Sorte de musée intact et complet de l'architecture
domestique pendant le Moyen âge et la Renaissance
— le
sublime Moyen âge et la fatale
Renaissance, — que
d'enseignements inépuisables et merveilleux Venise va nous
donner, maintenant que Ruskin va faire parler ses pierres, et,
grâce à la superbe traduction de Mme
Crémieux, va
s'adresser à nous dans notre langue, comme un de ces
apôtres doués de glossolalie qui sont
figurés au
baptistère de Saint-Marc ! (…) Nous
aurions pu nous
fatiguer de la langueur de Venise et répéter
froidement,
à sa louange, les litanies du génie. Mais
maintenant, au
retour de nos pélerinages ruskiniens, actifs et laborieux
ceux-là, où nous chercherons la
vérité et
non la jouissance, la jouissance sera plus profonde, et Venise nous
versera plus d'enchantement d'avoir été pour nous
un lieu
d'études et de nous donner la volupté par
surcroît.
(…)
☐ « John
Ruskin, Les Pierres de
Venise, Traduction de Mme
Crémieux », La Chronique des arts et de la
curiosité, 5
mai 1906 ; rééd. in
« Contre Sainte-Beuve
[précédé de] Pastiches et
mélanges [et
suivi de] Essais et articles » éd. par
Pierre Clarac,
Paris : Gallimard (Bibliothèque de la
Pléiade), 1971
(pp. 521-522).
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EXTRAIT |
Si vous voulez vous bien rendre compte de l'esprit
dans lequel commença la domination de Venise et
d'où lui vint la force d'accomplir ses conquêtes,
ne cherchez pas ce que pouvaient valoir ses arsenaux ;
n'évaluez pas le nombre de ses armées ;
ne considérez pas le faste de ses palais ; ne
cherchez pas à pénétrer le secret de
ses Conseils ; mais montez sur le rebord rigide qui entoure
l'autel de Torcello, et là, contemplant comme le fit jadis
le pilote, la structure de marbre du beau temple-vaisseau, repeuplez
son pont jaspé des ombres de ses marins défunts,
et surtout, tâchez de ressentir l'ardeur qui
brûlait leurs cœurs, lorsque, pour la
première fois, les piliers édifiés
dans le sable et le toit leur cachant un ciel encore rougi par
l'incendie de leurs foyers, ils firent retentir, à l'abri de
ces murailles et accompagné par le murmure des vagues et le
tournoiement d'ailes des mouettes, l'hymne-cantique chanté
par eux à pleine voix.
La mer est à Lui et Il l'a
créée
Et Ses mains on préparé la terre ferme.
☐ pp. 52-53
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COMPLÉMENT BIBLIOGRAPHIQUE | - John
Ruskin, « The stones of Venice (I) The
foundations », London : Smith, Elder,
1851 ; New
York : J. Wiley, 1851
- John Ruskin,
« The stones of Venice (II) The sea
stories »,
London : Smith, Elder, 1853 ; New York : J. Wiley,
1853
- John
Ruskin, « The stones of Venice (III) The
fall »,
London : Smith, Elder, 1853 ; New York : J.
Wiley, 1853
| - John
Ruskin, « Les pierres de Venise » trad. de
Mathilde Crémieux, présentation, introduction et notes de
Jean-Claude Garcia, préface de Frédéric Edelman,
Paris : Hermann (Savoir), 2005
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mise-à-jour : 16 septembre 2020 |
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