J'ai
toujours ton cœur avec moi / Soffía
Bjarnadóttir ; traduit de l'islandais par
Jean-Christophe
Salaün. - Paris : Zulma, 2016. -
141 p. ;
19 cm.
ISBN
978-2-84304-764-0
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Flatey — l'île plate —,
se trouve au cœur du Breiðafjörður,
au nord-ouest de
l'Islande ; Hildur s'y rend pour les obsèques de sa
mère, Siggý : « Elle
était morte.
La femme qui m'avait mise au monde. (…) Elle
n'était plus
mon nord ni mon sud, ni mon est ni mon ouest »
(p. 16).
Si
l'île semble imposer des repères
évidents
— la maison jaune, le marin aux yeux vairons, Kafka
l'inconsolable —, elle est pourtant la
scène d'un
décentrement ou, plus précisément,
d'une
dérive brouillant autant l'échelle et l'ordre des
lieux que les
cycles du temps, heures saisons années,
générations, passé
présent futur.
Le
brouillard gagne insidieusement cette « histoire de
confins » (p. 92), mais il en sourd une
lumière
discrète, insistante, dérangeante quand se laisse
envisager un possible dévoilement.
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EXTRAIT |
La
jetée est déserte. Seule, mon sac à
l'épaule, je pense à l'homme-phare du bateau et
à
ses yeux lumineux. Je parcours du regard le chemin menant au
cœur
de l'île de Siggý. Sur Flatey aussi c'est
novembre. Je
m'étais toujours figuré cette île comme
la terre de
l'éternel été. L'hiver n'atteignait
jamais ces
côtes. Le royaume des oiseaux, des contes et de la
simplicité. Les oiseaux sont partis. Mais les
nuées
peuplant mon esprit ne m'ont pas quittées. J'ai bien
tenté de fuir, toutefois il me suffit de lever les yeux et,
au-dessus de ma tête, j'aperçois un volatile,
voire toute
une armée bourdonnante partant au combat
— alors, je
sais que Siggý ne disparaîtra jamais.
Même ici, sur
cette île hivernale désertée,
Siggý
représente tous mes points cardinaux. Elle a
trouvé
où mène la déviation. Lorsque je lui
posais des
questions auxquelles elle ne savait répondre, elle levait
les
yeux au ciel, comme si elle s'en remettait aux oiseaux
— car
il est certain que ce n'est pas à Dieu qu'elle s'adressait.
☐ p. 33 |
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- « Segulskekkja »,
Reykjavík : Vaka-Helgafell, 2014
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mise-à-jour : 26
janvier 2016 |
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