Aux îles de
lumière : Tahiti, Tuamotu, Marquises / Renée
Hamon ; préface [Présentation de
Renée Hamon] par Colette. - Paris : Ernest
Flammarion, 1940. - 246 p. ; 19 cm.
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EMMANUEL
BERL :
Renée Hamon, née sous le signe du cancer,
rêvait
d'aventure, mais avait besoin d'une carapace. (…) [Colette]
va
la faire sortir des limbes. Renée “ s'est
mise en
tête d'aller voir de l'autre côté de la
terre ”, et elle qui n'a jamais rien obtenu obtient
un passage
à
bord d'un bateau Marseille-Tahiti ; le bateau a pour
nom : la
Recherche.
Cette munificence des messageries maritimes, Renée la doit
à un journaliste. Il lui fait, en outre, commander par l'Intransigeant
un reportage, et lui donne une canne sculptée de Gauguin,
dont
elle va chercher les traces en Océanie. Il est difficile de
croire que Colette soit pour rien dans ces bonnes fortunes :
la
concordance des dates parle ici trop haut. C'est en avril 36 que
Renée devient l'amie de Colette, et c'est à la
fin de 36
qu'elle part pour “ les îles de
lumière ”.
Elle
laissera son M. Heyman à Tahiti, où il
restera ;
elle-même bourlinguant sur des goélettes
“ où il n'y avait parfois pas une seule
femme et pas
un seul blanc ”. De ses expéditions, elle
rapporte
un film
sur Gauguin et “ un butin de poète, des
fleurs
d'Océanie, des coquillages bourdonnants ”.
☐ “ Rachel
et autres grâces ” (1965)
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COLETTE :
Celle que je nomme, — et pour
cause — le “ petit
corsaire ”, ressemble devant moi à une
pensionnaire timide. […] Son destin est de voyager sur la
mer, d'aboutir à la terre pour reprendre la mer. Sa dure
tête de Bretonne a besoin de se polir sous le vent, et nul
souffle salé n'excède la capacité de
ses petits poumons, qui ne se résignent pas à
l'atmosphère minéralisée de Paris.
☐ “ Présentation
de René Hamon ”, préface aux
“ Iles
de Lumière ”, pp. 5-6
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THOR
HEYERDAHL :
Elle était petite et délurée, aussi
énergique qu'une lionne sous ses cheveux roux et touffus.
[…] Notre amitié naquit spontanément.
Mme Renée Hamon était une journaliste
française, arrivée la veille dans l'île
[à Hiva Oa, en 1937]. [Elle] était le type
même de la femme pleine de vie, qui dénouait
toutes les difficultés.
☐
« Fatu Hiva : le Retour
à la Nature », p. 209
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Après Tahiti et les
Tuamotu, Renée Hamon découvre les Marquises, les
îles de la mort lente. Elle y constate les
ravages du mal de vivre et des maladies, et s'indigne des moyens
dérisoires mobilisés pour contrer les effets de
ces fléaux importés d'occident : D'un
contact avec les Marquises, je défie qu'un simple voyageur,
comme moi, ne revienne pas ému autant que je l'ai
été. Le passant de bonne foi rêve pour
ces îles ce que je rêve
moi-même : Deux médecins, des infirmiers,
des dispensaires, une goélette munie d'un bon moteur, la
création d'un internat de garçons, la
reconstruction de la léproserie d'Hiva Oa, le
rétablissement des Chefs — un
par vallée — qui
surveilleraient la fabrication clandestine du
“ distillé ”. Enfin,
la lutte acharnée contre le moustique
“ propagateur du
féfé ” :
Débroussage des vallées, disparition des mares
stagnantes, et installation des conduites d'eau dans les villages (p. 241).
D'avoir exprimé son
émotion, Renée Hamon ne se tient pas
quitte ; dès son retour à Paris elle
alerte Georges Mandel, Ministre des Colonies, lui présente
un dossier argumenté, illustré
et … convaincant. En conclusion de son livre, elle
dresse un premier et rapide bilan :
1°
- Etablissement à demeure de deux Médecins dans
les groupes Nord et Sud des îles Marquises.
2° - Obtention du Parlement d'un crédit d'un million
pour “ Premier Équipement des
Iles ”, suivant le plan proposé au
Ministre par le Gouverneur.
3° - Service Interinsulaire médical
réalisé selon l'intelligente conception du
Docteur Hérivaux aux Nouvelles-Hébrides.
La guerre, malheureusement,
fera obstacle à l'entière application de ces
mesures.
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EXTRAIT |
J'ai un beau nom Marquesan. Un peu long tout de
même à porter :
“ Tahiaimi Métao
Koké ”, La princesse qui
chérit le souvenir de Koké. Pipito me l'a
donné.
Elle est la femme de Kopa qui me prête
son cheval. Pipito est trop jeune pour avoir connu Gauguin, mais sa
mère fut le modèle du peintre.
Dans la case de Kopa on parle souvent de
Koké.
— Avec
lui on n'avait jamais d'ennuis. Il nous protégeait du
gendarme. Triffe aussi est un bon popaa. S'il avait
été ici du temps de Koké, le pauvre
n'aurait pas eu autant de peapea.
☐ p. 203
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- « Gauguin,
le solitaire du Pacifique, à Tahiti et aux îles
Marquises » préface de Robert Rey,
Paris : Vigot frères, 1939
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mise-à-jour : 27
novembre 2015 |
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