Voyage dans les Hébrides
[réunit Voyage dans les île occidentale d'Écosse
de Samuel Johnson et Journal d'un périple dans les
Hébrides de James Boswell] / Samuel Johnson et James
Boswell ; trad. de l'anglais et annoté par Marcel
Le Pape, avec la coll. de Marc Le Pape ; introduction de
Maurice Denuzière. - Paris : Éd. de la Différence,
1991. - 482 p. : ill., carte ; 23 cm. - (Outre-mers).
ISBN 2-7291-0695-2
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NOTE DE L'ÉDITEUR : La renommée littéraire
soude à jamais les destins de Samuel Johnson et de James
Boswell. L'irascible lexicographe anglais et son patient biographe
écossais apparaissent, pour les lecteurs de tous les temps,
comme d'inséparables duettistes. Chacun passe, aux yeux
de la postérité, pour le faire-valoir de l'autre.
Le premier n'a-t-il pas offert au second, par sa vie et ses œuvres,
matière à rédiger le modèle absolu
de la biographie ? Cette complicité inavouée
trouve peut-être sa meilleure illustration dans deux œuvres,
jusque-là inédites, dans leur intégralité,
en français : les comptes rendus juxtaposés,
et souvent discordants, du voyage que les deux hommes firent
ensemble, en Ecosse et aux îles Hébrides, du 18
août au 22 novembre 1773.
Ils imposèrent, cet été-là,
à leur amitié l'épreuve à laquelle
peu résistent : une cohabitation permanente de trois
mois dans l'inévitable promiscuité des étapes.
Quand ils entreprirent ce voyage, Samuel Johnson, célébrité
nationale, était âgé de soixante-quatre ans ;
James Boswell de trente-trois. L'un, lourd vieillard goutteux,
affligé de mélancolie cyclothymique, d'indolence
constitutionnelle, et maniaque de surcroît, n'avait aucun
goût pour l'imprévu. L'autre se présentait
comme un gaillard infatigable, hâbleur, curieux de tout
et jouisseur. Il avait visité la Hollande, l'Allemagne,
la France, la Suisse, l'Italie et la Corse, fréquenté
les princes allemands, Rousseau, Voltaire et Paoli.
Les voyageurs furent soumis aux
aléas de moyens de transport hasardeux : chaises
de poste, charrettes, barques, chevaux, poneys et, parfois, quand
leur bateau ne pouvait accoster, épaules de Highlanders
rustauds et dévoués ! Ils connurent, en parcourant
les Highlands et en visitant plusieurs îles — Skye,
Raasay, Mull, Coll, Ulva, Inchkenneth, et Icolmkill — des
aventures cocasses et beaucoup des « incommodités »
prévues et annoncées par Boswell. Ils durent accepter
la vermine des auberges, les soupes immangeables, les cabotages
dans la tempête, les longues chevauchées sur les
landes désolées et brumeuses, les pluies obstinées,
les vents cinglants. Ils se réjouirent parfois de festins
rustiques chez les lairds, seigneurs des îles, de réceptions
chaleureuses au foyer de modestes paysans, d'échanges
lyriques avec des bardes nationalistes et entendirent souvent,
un peu trop souvent au goût de Samuel Johnson, sonner les
cornemuses.
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EXTRAITS
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SAMUEL JOHNSON : Je désirais depuis si
longtemps visiter les Hébrides, ou îles Occidentales
d'Ecosse, que j'ai peine à me souvenir comment l'envie
m'en était venue. A l'automne de 1773, je décidai
d'entreprendre le voyage en compagnie de Mr Boswell, car je savais
que sa perspicacité me serait une aide dans mes recherches
et que la gaieté de sa conversation et l'agrément
de ses manières auraient suffi à contrebalancer
les incommodités d'une expédition dans des contrées
moins accueillantes que celles que nous allions visiter.
☐ « Voyage dans les
îles occidentales d'Ecosse », p. 37
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JAMES BOSWELL : Le Dr Johnson écrit dans
son « Voyage » qu'il ne savait plus trop
comment lui était venue l'envie de visiter les Hébrides.
Mais il me dit, dans le courant de l'été de 1763,
que son père lui avait mis entre les mains, alors qu'il
était très jeune, le récit de Martin 1
et que la lecture de cet ouvrage lui avait procuré un
grand plaisir. Nous savions que ce voyage n'irait pas sans incommodités
ni sans fatigue, voire même peut-être sans quelques
dangers ; mais nous étions persuadés que tout ce
qui se disait là-dessus était amplifié par
l'imagination. Etant à Ferney en 1764, je fis part de
notre projet à Voltaire. Il me regarda comme si j'avais
parlé de partir pour le Pôle Nord et dit :
« Vous n'insistez-pas pour que je vous accompagne ? »
— « Non, Monsieur » — « Alors,
je vous conseille vivement d'y aller ».
☐ « Journal d'un périple
dans les Hébrides », p. 167 1. | Martin Martin, « A description
of the western islands of Scotland », Londres : A.
Bell, 1703 |
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SAMUEL JOHNSON : Raasay a peu d'attrait pour le
voyageur, si ce n'est le laird et sa famille. Mais il n'en faut
pas plus. Une demeure aussi accueillante, au milieu des vents
et des eaux, fournit à l'imagination de délicieux
contrastes. Au-dehors, c'est le rude océan et les terres
rocailleuses, le fracas des lames et le hurlement des tempêtes.
Au-dedans, règnent l'élégance et la beauté,
le chant et la danse. Si j'avais rencontré Ulysse sur
Raasay, je me serais cru en Phéacie.
☐ « Voyage dans les
îles occidentales d'Ecosse », p. 82
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JAMES BOSWELL : Ici [à Raasay], l'on danse
chaque soir. La reine de notre bal était la fille aînée
de Macleod, une jeune fille élégante, bien élevée
et célèbre dans toutes les îles pour sa beauté
sous le nom de Miss Flora Raasay. Aucun signe de jalousie ou
de mésentente dans ces réunions où la gaieté
régnait si continûment que j'en vins à me demander si
les soucis pouvaient trouver place à Raasay.
☐ « Journal d'un périple
dans les Hébrides », p. 283
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- Samuel
Johnson, « A journey to the western islands of
Scotland », London : W. Strahan and T. Cadell, 1775
- James
Boswell, « The Journal of a tour to the Hebrides with Samuel
Johnson », London : Charles Dilly, 1785
- « Johnson
and Boswell in Scotland : a journey to the Hebrides »
ed. by Pat Rogers, New Haven : Yale university press, 1993
- « To the Hebrides : Samuel Johnson's Journey to the western islands of Scotland, and James Boswell's Journal of a tour to the Hebrides » ed. by Ronald Black, Edinburgh : Birlinn, 2007
|
- James Boswell, « L'île de Corse, journal d'un
voyage », Paris : Hermann, 1991
- James Boswell, « En défense des valeureux
Corses », Monaco : Éd. du Rocher (Anatolia),
2002
- James Boswell, « Doctor
Johnson & General Paoli » [extrait de Life
of Johnson, 1791], in : Méditerranéennes,
n° 12, août 2002
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- Roger
Hutchinson, « All the sweets of being : a life of James
Boswell », Edinburgh : Mainstream publishing, 1995, 2002
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mise-à-jour : 7 septembre 2010 |
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