« lettres des îles », février 2002
utopies insulaires ?
   

La prochaine édition du Salon du Livre Insulaire (Ouessant, 22 au 25 août 2002) mettra au premier plan les utopies insulaires. L'Utopie de Thomas More — texte fondateur — a été publiée en 1516, un quart de siècle après le premier voyage de Christophe Colomb et c'est d'un navigateur, Raphaël Hythlodée, que l'auteur affirme tenir les éléments de son récit. Autant dire que, pour être de nulle part, l'utopie a toute sa place non seulement dans l'histoire mais aussi dans la géographie. Derrière l'apparent paradoxe, c'est une constante du genre ; on ne compte plus les textes, tenus pour utopiques et qu'il a fallu requalifier en récits de voyages — François Leguat à Rodrigues, et comment ne pas penser à l'accueil réservé à la relation des voyages de Pythéas ? —, ceux auxquels on a fait effectuer un parcours inverse — l'épisode de Libertalia à Madagascar —, ceux encore qui laissent subsister le doute, comme pour Evhémère chez qui il est parfois difficile de faire la part de l'observation, directe ou indirecte, et de l'affabulation plus ou moins délibérée. Entre le rêve insulaire et la réalité, la ligne de démarcation est poreuse, ce que démontrerait s'il le fallait encore l'énergie déployée par tous, en Haïti ou à Cuba par exemple, pour vivre au jour le jour des utopies que le reste du monde juge pour le moins déraisonnables. Les conférences du 4ème Salon du Livre Insulaire exploreront les questions soulevées par cette résistance, qu'elle s'exprime dans les livres ou dans la réalité.

Autre sujet inscrit au premier plan du programme de cette prochaine édition : la Nouvelle-Calédonie. La dimension utopique de l'histoire de la Grande-Terre est incontestable ... Elle marque la littérature qui se construit, riche des apports croisés de deux cultures — culture endogène de la parole, culture exogène de l'écrit. Sans forcer le trait, il est encore possible d'entendre un vif écho du rêve îlien d'une vie meilleure dans la bienveillante attention portée par Henri Queffélec — on célébrera cette année le dixième anniversaire de sa mort — aux communautés insulaires des côtes armoricaines : « ces petites îles bretonnes sont aussi des terres rares, où l'on respire un air unique. Non seulement macareux, hérons-butors, pétrels-fulmars, phoques, marsouins, peaux-bleues, etc., ont depuis le début aimé ces îles, mais des hommes les ont adoptées pour y vivre » (Aimer les îles bretonnes, 1991).

en guise de voeux tardifs ...

... les premières semaines de l'année 2002 ont été marquées par la parution de trois « livres insulaires » remarquables et qu'il faut lire !
Aux antipodes du roman exotique, c'est à la Nef des fous ou à une nouvelle Danse macabre que fait irrésistiblement penser « Soupir », le sixième roman de la mauricienne Ananda Devi.
Et, de l'archipel caraïbe, nous arrivent presque simultanément deux autres chefs-d'oeuvre : un court récit du haïtien Lyonel Trouillot, un long roman du martiniquais Patrick Chamoiseau.

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