Au large de Venise / Christine
Spianti. - Paris : Maurice Nadeau, 2002. - 186 p. ; 21 cm.
ISBN 2-86231-174-X
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Ils sont deux,
débarqués à Gira, une île au
large de Venise où s'est replié Arno,
leur ami peintre, déterminés à le
convaincre de reprendre sa place à leur
côté, mais « il est
là depuis cinq ans, il a inventé sa vie dans
l'île, pourquoi accepterait-il de [les] suivre, de retourner
dans [leurs] villes, [leurs] rues » ?
Christine Spianti
lève vite le doute sur l'issue du
débat : Arno, lucide sur la présence
irréversible du mal — en l'occurence les
promoteurs d'installations touristiques — au
cœur même de la retraite qu'il s'était
choisie, acceptera le retour vers le monde et ses villes, mais restera
fidèle aux motivations de son insurrection :
« je ne me repens pas de la liberté que
j'ai prise, d'être ici, de vivre, de créer,
d'être loin des autres, de leurs guerres et de leurs
massacres, de l'horreur réfléchie, je ne me
rétracte pas … »
A la veille du
départ Arno incendie la chapelle qui lui tenait lieu
d'atelier ; comme pour donner raison à
Cézanne, très présent dans les
discussions avec ses amis : « c'est
effrayant la vie ».
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LIBÉRATION, 4 avril 2002 :
Sous le soleil […], trois personnages poudroient dans la
proximité : « c'est
déjà beaucoup de ne pas avoir à dire,
et ce silence c'est l'amitié, cette invention de l'autre
à la mesure, cette fiction, l'inspiration qui nous vient de
l'autre et qui doit rester secrète ».
Ce troisième roman
de Christine Spianti (née en 1961) emmène en
quelque sorte le Dasein en vacances sur une
île toujours au large, dans l'attente de « venir
là où je suis ».
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EXTRAIT |
Maintenant l'île vient plus
près et s'offre, anse par anse, toute enjouée,
avance ses golfes et ses criques pour les donner, le
cimetière au bord, près de tomber avec toutes ses
âmes. Au loin il y a une seconde colline : ses
pelouses bleues se découpent dans l'azur du sommet. La
vedette longe les grèves, immobile, et la houle
amplifiée bouscule un bateau à voile rouge
amarré seul dans les parages. Les pins,
bouleversés dans la rafale veillent à l'ombre de
la sauvagerie de l'île. Rien ne manque. Arno et Sapia, ici
perdus, loin, y vivent et ne comptent que sur ce qui est là.
Il vient des forces par
l'éblouissement. Quelle joie venait dévider son
oracle dans les vagues, enfin, et guérissait de la nuit.
Joie, si tendue qu'elle devient une ligne droite, solide, presque une
vertu. Cette course ne menait donc pas à la mort. Un a un
les pins : tout le temps est là.
☐ p. 35
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mise-à-jour : 16
novembre 2005 |
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