Le paradis terrestre, un mythe
espagnol en Océanie : les voyages de Mendaña et
de Quiros, 1567-1606 / Annie Baert ; préface de
Christian Huetz de Lemps. - Paris : L'Harmattan, 1999. -
IV-351 p. : cartes ; 22 cm. -
(Mondes océaniens).
ISBN 2-7384-8205-8
|
NOTE
DE L'ÉDITEUR : Les voyages
de Alvaro de Mendaña y Neira et de Pedro
Fernández de Quirós dans la mer du Sud figurent
parmi les plus grandes aventures maritimes de tous les temps et parmi
les moins connues, en tout cas en France.
Ils firent progresser les
connaissances géographiques sur ce grand océan,
la dernière partie encore inexplorée de notre
planète, et considérés dès
lors comme un « lac espagnol ».
De plus, ils ouvrirent pour les Européens les
premières fenêtres sur l'existence de populations
océaniennes bien différentes de tous les peuples
« sauvages » connus
jusque-là. Cela donna une nouvelle vigueur aux mythes et
utopies d'inspiration géographique, économique,
religieuse, politique ou sociale, qui menèrent, deux
siècles plus tard, au Bon Sauvage et à la
Nouvelle Cythère, avec le succès que l'on sait.
Ce livre, tiré de
la thèse de doctorat de l'auteur, étudie les
trois expéditions menées au départ du
Pérou entre 1567 et 1606, qui
entraînèrent les premiers contacts entre les
Européens et les habitants d'archipels aux noms fabuleux
— les îles Salomon, les Marquises — qui
firent écrire à Quirós :
« J'ai découvert un Paradis
Terrestre ».
|
EXTRAITS |
L'histoire
de ces trois voyages est assez bien connue, tout au moins celle de
leurs événements, que nous pouvons
résumer
succinctement.
Les rumeurs sur les îles du roi Salomon se
multipliant au Pérou, Lope García de Castro,
gouverneur
du vice-royaume, décida d'y envoyer une
expédition de
découverte, qu'il confia à son neveu Alvaro de
Mendaña y Neira. Deux navires, achetés par les
finances
royales, quittèrent donc Callao le 19 novembre 1567. La
première terre fut aperçue le 15 janvier 1568 et,
le 7
février, ils arrivèrent devant Santa Isabel, la
première des îles Salomon.
Mendaña chargea son
chef-pilote, Hernán Gallego, de procéder
à une
reconnaissance systématique de l'archipel, grâce
à
la construction sur place d'un bateau à faible tirant d'eau,
ce
qui prit six semaines, pendant lesquelles furent organisées
des
expéditions d'exploration de l'intérieur de
l'île.
La première sortie de ce brigantin, qui fit le tour complet
de
Santa Isabel, dura du 7 avril au 4 mai, et permit en particulier la
découverte de Malaita, du groupe Nggela Sule et de
Guadalcanal.
A
son retour, les navires quittèrent Santa Isabel pour aller
mouiller à Guadalcanal, d'où ils repartirent en
exploration, du 19 mai au 5 juin, découvrant principalement
San
Cristóbal, où les deux naos vinrent jeter
l'ancre et restèrent du 1er
juillet au 11 août. Lors de sa troisième sortie,
qui fut
assez courte, puisqu'elle ne dura qu'une semaine, du 6 au 14 juillet,
le brigantin parvint jusqu'à
l'extrémité sud-est
du centre de l'archipel des Salomon et, pensant qu'il n'y avait plus
d'îles au vent, fit demi-tour : l'exploration
était
terminée. En tout, ses trois voyages avaient permis la
découverte d'une vingtaine d'îles.
La flotte leva
l'ancre définitivement le 11 août 1568.
Après une
traversée très éprouvant, au cours de
laquelle
Mendaña découvrit encore deux îles,
elle arriva en
Nouvelle-Espagne le 19 janvier 1569, et rejoignit finalement son port
de départ, Callao, le 22 juillet 1569, presque un an
après avoir quitté San Cristóbal.
☐ p. 5 |
Les
résultats concrets de [la première]
expédition ne
séduisirent pas les autorités de Lima,
occupées
ailleurs, et Mendaña dut négocier longtemps et
âprement avant d'être autorisé, en 1574,
à
organiser, à ses frais, un deuxième voyage, dont
le but
était d'installer une colonie espagnole aux îles
Salomon,
et qui ne put se faire qu'en 1595.
La flotte, dont le chef-pilote
était Pedro Fernández de Quirós, se
composait
cette fois de quatre navires et emmenait environ 400 personnes, dont
des femmes et des enfants. Elle appareilla de Callao le 9 avril 1595
(…) et arriva au groupe sud des îles que
Mendaña
baptisa Marquises le 21 juillet. Ce n'étaient pas les
îles
Salomon que cherchaient les Espagnols, aussi n'y
restèrent-ils
que deux semaines. Ils levèrent l'ancre de nouveau le 5
août, apercevant en route les îles de San Bernardo
et
Solitaria et, le 7 septembre, la flotte était en vue de
l'île de Tinakula, quand le navire-amiral disparut. Le
lendemain,
ils arrivèrent à Nendo, la plus grande de
l'archipel
nommé aujourd'hui Santa Cruz Islands.
Mendaña pensait
qu'il n'était toujours pas arrivé aux Salomon,
mais
décida de s'y arrêter, le temps de rechercher son
navire
perdu. En même temps, les futurs colons
commencèrent
à s'y installer et à construire un village
à
terre, où ils restèrent deux mois :
séjour
marqué par des crimes, des tentatives de mutinerie, et la
mort
de Mendaña lui-même, le 18 octobre.
Doña Isabel,
qui avait hérité de son mari la direction de
l'expédition, décida de renoncer provisoirement
à
cette installation et de rejoindre les Philippines, où elle
projetait de se réapprovisionner et de recruter de nouveaux
colons pour revenir ensuite à Santa Cruz. (…) La
capitane, désormais seule en mer, passa devant les
îles
Guam et Rota (dans les îles Mariannes), où les
marins
obtinrent quelques vivres frais, sans y faire escale, et atteignit les
Philippines le 14 janvier 1596.
☐ p. 8 |
Quirós,
fort de l'expérience acquise (…) voulut organiser
un
nouveau voyage destiné principalement à
l'évangélisation des Océaniens et
à la
recherche du fameux continent austral, dont toutes les îles
découvertes ne pouvaient être, à ses
yeux, que les
avant-postes. Mais cette fois encore, les autorités de Lima
ne
se montrèrent pas disposées à appuyer
une telle
entreprise. Il partit donc en Espagne, puis à Rome,
où
ses projets missionnaires lui valurent le soutien actif du Pape, ce qui
convainquit le roi Philippe III de lui faire confiance.
Trois
navires (…) partirent donc de Callao le 21
décembre 1605,
mirent le cap un peu plus au sud que lors des
précédents
voyages, sans rien voir puis, remontant vers le nord-ouest,
découvrirent d'abord deux îlots proches de
Pitcairn,
plusieurs atolls des Tuamotu et des îles Cook (…)
et
arrivèrent aux Salomon, non loin de Santa Cruz, à
Taumako, où ils passèrent dix jours.
Quirós mit de
nouveau le cap au sud, aborda au Vanuatu et, le 30 avril, arriva devant
la grande terre qu'il appela La
Australia del Espíritu Santo, et qu'il prit
pour la côte nord du Continent Austral.
Les
Espagnols y restèrent un peu moins de six
semaines :
Quirós envoya quelques expéditions d'exploration
à
l'intérieur des terres, qui se heurtèrent
d'emblée
à l'hostilité des indigènes, et fonda
symboliquement un ordre de chevalerie et une ville.
La flotte
repartit en exploration le 8 juin, mais les conditions de vent
— ou une mutinerie, les avis
divergent —
séparèrent les navires. Quirós prit
alors la
direction du Mexique et arriva à La Navidad le 21 octobre
1606,
ayant ajouté une vingtaine d'îles aux cartes de la
mer du
Sud.
☐ pp. 10-11 |
|
COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- « Les
Espagnols en Océanie ou le premier regard,
Mendaña aux îles Marquises »,
Bulletin de la Sté des Études
Océaniennes (Papeete), n° 256-257, 1992
- « Doña
Isabel Barreto, première femme gouverneur et marquise de la
Mer du Sud » : Tahiti Pacifique
(Papeete), n° 42 et 44, 1994
- « Premiers
regards espagnols sur l'Océanie : la découverte
des Marquises, Journal du capitaine Pedro
Fernándes de Quirós »,
Bulletin de la Sté des Études
Océaniennes (Papeete), n° 267, 1995
- «
Prémices de l'évangélisation dans le
Pacifique », in Claire Laux (dir.), Les
écritures de la mission dans l'outre-mer insulaire, Turnhout
(Belgique) : Brepols, 2007
- «
Marquises de la mer du Sud : les
premiers voyages espagnols en
Océanie », Papeete : Au Vent des
îles,
2011
- « À
travers le Pacifique : le capitaine Pedro Fernández
de
Quirós (1560-1615) », Paris :
L'Harmattan
(Portes océanes), 2018
|
- Lord Amherst
of Hackney & sir Basil Thomas (eds.),
« Alvaro de Mendaña : The voyage to the
Solomon islands in 1568 », London : Hakluyt
Society, 1901
- Pedro
Fernandez de Quirós, « Narrative of the
second voyage of the adelantado Alvaro de
Mendaña », London : Hakluyt
Society, 1967
- Shirley
Fenton Juie, « Tiger lilies : women adventurers in
the south Pacific », Sydney : Angus
& Robertson, 1990
- [collectif],
« Les Espagnols aux Marquises »,
Bulletin de l'association des historiens et géographes de
Polynésie française (Papeete),
n° 2, 1993
- Robert
Graves, « Les
îles de la déraison »,
Paris : Stock (Nouveau cabinet cosmopolite), 1995
- Pedro
Fernandez de Quirós, « Histoire de la
découverte des régions australes :
îles Salomon, Marquises, Santa Cruz, Tuamotu, Cook du Nord et
Vanuatu » traduction et notes de Annie Baert,
préface de Paul de Deckker, Paris : L'Harmattan,
2001
|
|
|
mise-à-jour : 30
avril 2018 |
|
|
|