Minoru / Jean-Michel Neri. -
Alata : Colonna Edition, 2015. - 240 p. ;
20 cm.
978-2-36984-024-4
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Renfermées pour
certains, les îles sont exposées à tous
les vents et savent d'expérience accueillir. Quand un samouraï
en rupture de ban se risque à quitter son île de
Kyushu en compagnie
d'un jésuite et que, fraîchement
débarqué
à Gênes, il fait la connaissance d'un jeune Corse,
il
mesure difficilement la portée de la rencontre
— le
nouveau cours de sa vie, les liens qui vont se
nouer … une
nouvelle famille presque.
Jean-Michel Neri relate avec naturel
cette rencontre improbable dont il tire profit pour disserter sur
l'insularité, pour évoquer la figure et le projet
de
Pascal Paoli ; la trame romanesque met en lumière
l'appétit de liberté exalté par le Babbu di a Patria,
mais aussi la rigueur de sa politique quand, par exemple, il entend
mettre un terme aux pratiques de la vendetta
et, enfin, les pesanteurs auxquelles il s'est heurté, la
trahison de trop nombreux possédants, la convoitise de la
France
qui souhaite supplanter Gênes.
La défaite
historique de Ponte Novu marque un terme pour tout un peuple ;
pour ceux des héros de Jean-Michel Neri qui survivent elle
est
l'occasion d'un nouveau départ et la promesse d'autres
rencontres.
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NOTE
DE L'ÉDITEUR : 1767. Le Japon vit sous le règne
intransigeant du shogun
Tokugawa. Un samouraï
en rébellion est contraint de s'expatrier. Ses
pérégrinations le conduisent vers la lointaine
Sérénissime République de
Gênes. Il y
rencontre d'autres exilés, dont une famille corse ayant fui
la Ghjustizia Paolina. Le
destin entraîne ces personnages en Corse, au moment de la
troisième et définitive intervention de
l'armée
française dans l'île … Leur
odyssée
s'achèvera en 1769, après la bataille de Ponte
Novu, qui
sonne le glas du jeune État démocratique voulu et
instauré par Pasquale Paoli.
❙ | Jean-Michel
Neri vit en Corse, où il a exercé le métier
d’élagueur pendant plus de vingt ans. Il est
aujourd’hui consultant dans le domaine de la préservation
du patrimoine arboré et des oliveraies anciennes. Son
précédent livre La peau de l’olivier, paru en 2012, donnait la parole à un vénérable olivier millénaire. |
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EXTRAIT |
Face
à l'ébullition qui agitait la Corse, le Petru
paysan
vibrait à l'idée inédite, promue par
Paoli, d'un
peuple souverain. Un peuple qui décidait, par la voix de ses
représentants élus, de son propre destin.
Il
expliqua, enflammé, tout cela à Minoru. Il lui
raconta
l'île, ses espoirs et son combat farouche. Le portrait
idolâtre qu'il lui fit du héros national rappela
à
Minoru celui d'un honorable Daimyo
que
jadis, cela semblait une éternité, il servit
lui-même sans réserve. Le Japonais, insulaire de
l'autre
bout du monde, homme fier dont l'honneur était la
respiration,
entendit et comprit au-delà même ce dont le jeune
Corse
espérait le convaincre.
Ils partageaient tous deux cette
conscience aiguë d'appartenir à une terre dont les
contours
se voient. La frontière de l'eau aide à ce
privilège. Ex-îliens exilés, ils se
sentaient en
transit sur la terre qu'on disait ferme. Le terme consacré,
en
ces temps, pour définir le continent par rapport
à une
île n'était pas anodin et il induisait, plus qu'un
bras de
mer qui séparait deux lieux, une façon
différente
de vivre son endroit.
L'île ne s'oppose pas à la « Terraferma »
par
sa consistance ni sa mobilité mais par ses limites. Elle est
perçue par ses occupants comme un navire à
l'ancre,
figé au large. Son pont est son aire et sa coque, son
intégrité. Tous, à ce bord immobile
entouré
par les flots, essuient les mêmes grains et vivent un
même
destin.
☐ pp. 103-104 |
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- « La peau de l'olivier
», Biguglia : Sammarcelli, 2012
- « Corse, les questions qui dérangent », Fouesnant : Yoran, 2017
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mise-à-jour : 19 janvier 2022 |
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