Les
carnets méditerranéens de Friedrich Nietzsche /
Philippe
Granarolo. - Alata : Colonna édition, 2017. -
198 p. ; 19 cm.
ISBN 978-2-36984-061-9
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Ubi pater
sum, ibi patria.
Là
où je suis père, là est ma patrie.
☐ Aurore (473) |
Friedrich Nietzsche
a très tôt subi
l'impérieuse emprise de la
Méditerranée
— lumière, paysages, climat, vie sociale,
pensée. Plusieurs de ses œuvres expriment cet
irrésistible attrait ; il y revient dans sa
correspondance et dans la conversation avec ses proches.
Philippe Granarolo a réuni dans ces Carnets
Méditerranéens les
traces de cette prédilection ; en brassant des
sources
éparses, il reconstitue une trame (auto-)biographique 1
qui suit le philosophe depuis les premiers enchantements à
Gênes et dans
le golfe de Naples jusqu'en en Sicile, à Venise,
à Nice.
Dans ce fervent itinéraire, les îles
occupent une place prééminente par la richesse et
la
qualité des arrière-plans qui y sont
associés
— instants d'intense bonheur, fulgurances de la
pensée :
Venise où Nietzsche à
séjourné à
plusieurs reprises, la Sicile où il tente de mettre ses pas
dans
ceux d'Empédocle,
Capri brièvement visitée, Ischia
aperçue à
l'horizon de
Sorrente ; la Corse enfin, cible de rêveries et
même
de projets d'installation avec son ami Heinrich Köselitz (Peter Gast).
L'anecdote ne masque jamais
l'essentiel : la pensée en marche
— la
vie qui se consume dans la passion de penser. Il suffit,
pour s'en convaincre, d'évoquer l'empreinte de Venise dans
la gestation d'Aurore
— le recueil aurait pu s'intituler Ombra di Venezia —
ou l'empreinte de Gênes, de Naples et de la Sicile dans celle
du Gai Savoir où,
parmi les poèmes des dernières pages, sont repris
six des Idylles de
Messine 2 écrites
et publiées sous le charme du printemps sicilien de 1882.
Philippe Granarolo a enseigné la philosophie en
Corse de 1971
à 1984, puis à Toulon de 1984 jusqu'à
sa retraite.
Sa fréquentation du corpus nietzschéen pendant
plusieurs
décennies lui a permis de soutenir en 1991 une
thèse de
Doctorat d'Etat ès-Lettres
— « Le futur
dans l'œuvre de
Nietzsche » — et de publier
entre 1993 et aujourd'hui pas moins de cinq ouvrages sur l'auteur du Gai Savoir ainsi
qu'un nombre considérable
d'articles.
1. |
À
la différence de Guy de Pourtalès qui, visant un
objectif
similaire, avait écrit un récit strictement
biographique : « Nietzsche en
Italie »
— Bernard Grasset (1929). |
2. |
« Idyllen aus
Messina », Internationale Monatsschrift, Bd. I,5.
Chemnitz, 1882, S. 269-275 |
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EXTRAIT |
3 avril 1882
Homère
avait décrété que la Sicile
était la terre
du bonheur. Quatre jours m'ont suffi pour partager son jugement.
Comment les anciens Grecs avaient-ils acquis une aussi parfaite
connaissance des rivages de la
Méditerranée ? Quels
fabuleux marins devaient-ils être, le récit de l'Odyssée apportant
la plus éclatante démonstration du fait qu'il y a
près de trois millénaires ils avaient parcouru
d'Est en
Ouest et d'Ouest en Est cette vaste mer et qu'ils en avaient
repéré les moindres golfes, les plus infimes
rochers, les
caps les plus dérobés.
J'ai trouvé à
me loger dans un petit hôtel situé sur une place
ombragée, à l'écart de l'agitation de
la ville,
où je jouis d'une merveilleuse tranquillité qui
m'a
permis d'écrire plusieurs poèmes dont j'avais eu
l'idée à Gênes ces dernières
semaines. Au
lieu d'incorporer ces poèmes à un texte en prose
comme je
l'ai fait jusqu'à présent, je les
réunirai
probablement dans un recueil qui pourrait avoir pour titre
« Idylles de Messine ». Ici j'ai
le sentiment que
mes pensées deviennent plus légères,
qu'elles ont
laissé derrière elles toute pesanteur, qu'elles
ont
appris à danser.
☐ pp. 87-88 |
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- Friedrich
Nietzsche, « Ainsi
parlait Zarathoustra »
textes et variantes établis par Giorgio Colli et Mazzino
Montinari, trad. de l'allemand par Maurice de Gandillac,
Paris :
Gallimard (Folio essais, 8), 1985
- Friedrich
Nietzsche, « Aurore, pensées sur les
préjugés moraux » textes et
variantes
établis par Giorgio Colli et Mazzino Montinari, trad. de
l'allemand par Julien Hervier, Paris : Gallimard, 1970
- Friedrich
Nietzsche, « Dernières
lettres », Paris : Rivages
(Petite bibliothèque), 1989
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- Philippe
Granarolo, « En chemin avec
Nietzsche »,
Paris : L'Harmattan (La Philosophie en commun), Paris, 2018
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site internet de Philippe Granarolo |
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mise-à-jour : 15
octobre 2018 |
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