Monologue
pour une scène vide / Gary Klang. -
Montréal :
Dialogue Nord-Sud, 2013. - 112 p. ; 21 cm.
ISBN
978-2-924107-04-1
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Les petits hommes éteignent les
flambeaux
Et font de l'ombre sur la terre
Il est grand temps
Grand temps vous dis-je
De rallumer les étoiles
☐
p. 41 |
Monologue
à lire comme on lit un roman — à
défaut de
l'entendre proféré sur une scène.
Haïti
— le Macoutistan —,
New York, Paris : où qu'il se trouve, Julien Freud jeune juif sans calotte venu
monologuer
sur une scène vide ne trouve d'issue ou de
parade à sa névrose
qu'à dénoncer la bêtise et le vice du
monde. Au fil du monologue la colère est sans frein, contre
Ubu dans ses multiples et contemporaines incarnations, et contre ceux
que Rimbaud appelait les assis, contre
tous les petits
hommes qui éteignent les
flambeaux.
Le
cours donné à cette colère pourrait
lasser si elle
n'apparaissait comme le revers d'un amour et d'un espoir
déçus et si déception et
colère ne nourrissaient
une ultime ressource : « Si
j'écris c'est
à cause d'un manque. Gloire donc au vide et à ses
pompes,
car si la vie me comblait, peut-être n'écrirais-je
plus ».
Quelques
éclats rompent
l'obscurité du monologue. Les souvenirs d'une enfance
haïtienne — ces
« paysans qui nous
accueillaient sans chichi » avec
« toujours un
café, un sourire et des paroles
aimables ». La
lecture d'auteurs intransigeants envers tares et
médiocrités : le monologue de Julien
Freud invite
à relire Rabelais, Shakespeare, Swift,
Beckett, Miller,
d'autres.
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EXTRAIT |
Les États-Unis, par exemple. (…) Voici
un pays
peuplé de millions de gens où tout le monde est
seul et
vit dans la peur d'être attaqué par Moustapha.
Vous
appelez ça une réussite ?
Le temps ne passe pas, il tourne
en rond.
Au
moins dans mon île, chauffée par le soleil la
haine et la
violence, personne ne souffre de solitude. Et c'est la
supériorité des pays pauvres. La seule fois
où les
Macoutins se sentirent seuls ce fut pendant le règne d'Ubu,
où ils ont fait silence. Ils éclataient
sous le poids
des mots qu'ils auraient voulu expulser, comme un acteur pris d'une
grosse envie mais devant se retenir pendant qu'il joue Hamlet sur une
scène vide. Les écrivains n'avaient le choix
qu'entre
chanter les louanges du tyran ou se taire. Ils se sont tus pour la
plupart.
Mais moi je suis
parti et c'est la poésie qui m'a sauvé.
☐
pp. 72-73 |
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- « Toute
terre est prison »,
Montréal : Mémoire d'encrier, 2010
- « Il
est grand temps de rallumer les
étoiles »,
Montréal : Mémoire d'encrier, 2007
- « Elle
n'avait peur de rien », in Une
journée haïtienne,
textes réunis et présentés par Thomas
C. Spear,
Montréal : Mémoire d'encrier ;
Paris :
Présence africaine, 2007
- « Les
chiens noirs », Montréal : Plume
et encre (Vous m'en direz des nouvelles, 7), 2006
- « Un homme seul est toujours en mauvaise
compagnie »,
Montréal : Mémoire d'encrier, 2005
- « Kafka m'a dit »,
Rosemère (Québec) : Humanitas, 2004
- « La
terre est vide comme une
étoile », Rosemère (Québec) : Humanitas, 2000
- « La
vraie vie est absente », Rosemère (Québec) : Humanitas, 2000
- « Je
ne veux pas mourir chauve à
Montréal », Rosemère (Québec) : Humanitas, 1999
- « L'adolescent
qui regardait passer la vie », Rosemère (Québec) : Humanitas, 1998
- « L'île
aux deux visages », Rosemère (Québec) : Humanitas, 1997
- « Moi
natif natal [suivi de] Le temps du vide »,
Montréal : Humanitas, 1995
- « Je
veux chanter la mer [suivi de] Les fleurs ont la saveur de
l'aube », Montréal : Humanitas,
1993
- « Ex-île », La Tronche : La Vague à
l'âme, 1988 ; Rosemère
(Québec) :
Humanitas, 2003 ; Montréal :
Mémoire d'encrier, 2012
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- Gary
Klang et Anthony Phelps, « Haïti !
Haïti ! »,
Montréal : Libre
expression, 1985 ; réédité
sous le titre
« Le massacre de
Jérémie :
opération vengeance »,
Montréal :
Dialogue Nord-Sud, 2014
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Sur
le site « île
en île » :
dossier Gary Klang |
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mise-à-jour : 6 mai
2018 |
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