Le chien de Tiepolo :
Poème à Camille Pissarro / Derek
Walcott ; trad. de l'anglais par Marie-Claude Peugeot. -
Monaco : Éd. du Rocher, 2004. -
188 p. ; 22 cm. - (Anatolia).
ISBN 2-268-05100-5
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Pissarro et Walcott sont
nés sous le même ciel, et le même
soleil ; ils ont connu les mêmes couleurs. Dans un
poème au long cours, Derek Walcott entreprend de
déchiffrer des itinéraires qui se croisent et d'y
relever l'emprise d'un temps dissocié de
l'histoire : « seul compte le
temps / qu'il fait, la roue des heures et ses
lumières ».
En suivant Walcott sur les
traces de Pissarro, jusqu'aux bords de l'Oise —
« et la douceur / du
brouillard qui enveloppe les coteaux le matin »
— on s'expose aux risques du chemin :
rencontres avec Cézanne ou Gauguin, haltes pour un Repas
chez Lévi. Les paysages s'estompent et, quand on
croit chercher le ciel, le poète nous confronte « à
toujours d'autres peintures des cieux ». De
Saint-Thomas à Pontoise, les mêmes
reflets requièrent l'attention du peintre et du
poète.
Mais c'est une
quête, une poursuite plus qu'une errance qui est
contée, et mène au-delà des rivages
caraïbes et des berges de l'Oise, jusqu'à Venise
où le poète tente de retrouver le chien
de Tiepolo, souvenir fugace imprécis et insistant,
détail
épiphanique : « entre Venise et
moi, la cuisse d'un chien (...) une page muette, mais aucun rayon de
lumière / n'accroche ma
mémoire : seule une touche de couleur pour la
cuisse d'un chien ! »
Aux dernières
lueurs du jour qui tombe sur Charlotte-Amalie (Saint-Thomas),
le poète peut conclure sur une note
apaisée : « toutes les
peines qui nous accablaient de leur poids, / les
échecs répétés, les
tâches baclées
précipitamment, / passeront ».
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NOTE
DE L'ÉDITEUR : Le
Chien de Tiepolo est une œuvre narrative qui
raconte la quête spirituelle de deux hommes des
Caraïbes. Camille Pissaro, un Juif séfarade
né en 1830, quitte son île natale, Saint-Thomas,
pour suivre sa vocation de peintre à Paris, tandis que le
poète lui-même languit de redécouvrir
un détail — « une touche de
rose à l'intérieur de la cuisse / d'un
chien blanc » — d'un tableau
vénitien repéré lors d'une
première visite à New York.
Ces deux voyages nous
entraînent dans une Europe dont le passé poursuit
le peintre et le poète, à la recherche d'un lien
entre le paysage perdu de l'enfance et celui, mythique, de l'empire. Ce
long poème est à la fois une biographie
spirituelle du grand peintre dans l'exil, une histoire en vers de la
peinture impressionniste et le témoignage du
poète et de son désir de capter le monde visuel
au-delà des mots.
❙ | Derek Walcott est né à Sainte-Lucie en 1930. Il a reçu le prix Nobel de littérature en 1992. Café Martinique, livre d'essais en partie autobiographique, paraît simultanément dans la même collection. |
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EXTRAIT |
Sorti du cratère des Antilles, chaque
récif
regarde les deux mers, les deux mondes : Pontoise —
Saint-Thomas,
et voit les deux côtés, les
deux temps, comme ce pont
formé par une chaussée de filaos olive.
Et c'est là que mon récit
doit s'interrompre un moment,
et mes vers marquer une pause, devant ce qui demeure entre nous,
non pas l'apanage de Paris ou les nuages au-dessus
de Pontoise,
ni les coques blanches et les fanions des marinas,
mais les mêmes reflets qui, au bruit
d'un arbre,
retenaient son attention, ou bien, en observant ceux-ci,
des souvenirs vacillants.
☐ p. 105
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- « Tiepolo's
hound » with 25 full-colour reproductions of Derek
Walcott's
own paintings, New
York : Farrar, Straus and
Giroux ; London : Faber and Faber, 2000
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- «
Le royaume du fruit-étoile »
éd. bilingue, Saulxures : Circé, 1992
- « Heureux
le voyageur » éd. bilingue,
Saulxures : Circé, 1993
- « Ti-Jean
et ses frères », Belfort :
Circé, 1997
- « Raisins
de mer », Essertines-sur-Rolle :
Éd. Demoures, 1999
- « Rêve
sur la montagne au singe »,
Essertines-sur-Rolle : Éd. Demoures, 2000
- « The Haitian trilogy »,
New York : Farrar, Straus and Giroux, 2002
- « Une
autre vie », Paris : Gallimard, 2002
- « Café
Martinique », Monaco :
Éd. du Rocher, 2004
- « La
lumière du monde » éd.
bilingue, Belval : Circé, 2005
- « Paramin »
peintures de Peter Doig, Arles : Actes Sud, 2016
- « Marie
Laveau » trad. du collectif Passages sous la dir. de Nicole
Ollier, Pessac : Presses universitaires de Bordeaux
(Horizons/théâtre), 2018
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- Jason
Allen-Paisant, « Théâtre dialectique
postcolonial : Aimé Césaire et
Derek Walcott », Paris : Classiques Garnier
(Études sur le théâtre et
les arts de la scène, 7), 2017
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mise-à-jour : 27 novembre 2019 |
Derek Walcott
est né à Saint Lucia en 1930 ; c'est là qu'il est mort le 17 mars 2017.
Poète
et homme de théâtre, il avait reçu le
Prix Nobel de littérature en 1992. |
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