Le 15 août 1908, le Pourquoi pas ?
du commandant Charcot quitte Le Havre pour une expédition
dans l'Antarctique ; il est en vue du Cap Horn le 20
décembre. Passé le détroit de Drake,
le Pourquoi pas ?
côtoie les îles Shetland du Sud, l'archipel Palmer,
l'île Wandel où l'équipage
fête le Nouvel An, l'île
Adélaïde et, plus au sud, l'île Peterman
— à peine un kilomètre de
diamètre — où est prise la
décision d'hiverner (1er février - 25 novembre 1909).
Le 25 janvier 1910, le Pourquoi pas ?
met cap au nord ; il est de retour au Havre au
début du mois de juin.
Deux chemins se sont croisés
à bord du Pourquoi pas ? :
ceux de Louis Gain (1883-1963), naturaliste au Museum d'histoire
naturelle et de Jules Rouch (1884-1973), officier de marine. Dans les
années qui suivent le retour en France, Louis Gain et
André Rouch participent séparément
à des missions d'exploration au large des côtes
d'Afrique occidentale. Quand, plus tard, Jules Rouch publie ses
souvenirs africains 1, il fait appel aux photographies prises par Louis
Gain dans les mêmes parages ; entre temps, en 1913,
Jules Rouch et Luce Gain, la sœur aînée
de Louis, se sont mariés, unissant le destin de deux
familles animées d'un même goût pour
l'exploration et la découverte.
En mai et juin 1914, Louis Gain et son
frère Gustave (1876-1945) sont au Turkestan russe. En
août 1936, André Gain (1907-1940), fils de
Gustave, embarque à Marseille sur un paquebot de la Cie des
messageries maritimes à destination de la
Polynésie française où il
séjournera près d'un an, entre Tahiti, les
îles Sous-le-vent, les Tuamotu, les Gambier 2 et les Australes. Jean Rouch (1917-2004)
enfin — “ il se disait l'enfant
du Pourquoi pas ? parce que
l'union de ses parents était née de la rencontre
de Jules Rouch et de Louis Gain sur le trois-mâts du
commandant Charcot ” : après une
jeunesse itinérante, au gré des affectations de
son père (Alger, Mayence, Casablanca,
Paris, …), il débarque à Dakar
en 1941, approchant un horizon qui sera le sien sa vie durant.
Marie-Isabelle Merle-des-Isles a renoué
les fils de ces parcours où, au bout du rêve, la
réalité se déploie dans sa
splendeur : Rouch ou Gain, tous ont recueilli aux
différentes étapes de leurs voyages des
récits, des photographies, des films qui constituent autant
de témoignage sur le monde tel qu'ils l'ont
rencontré, archives toujours vives dont le
meilleur est ici restitué. Les îles ont une place
de choix dans ce florilège, des terres solitaires de
l'Antarctique approchées par l'expédition Charcot
au début du XXe, siècle aux jardins des mers de
la Polynésie d'André Gain et aux
énigmatiques Bissagos 3 … 1. | Jules
Rouch, “ Sur les côtes du Sénégal et de
la Guinée ” avec des photographies de Louis Gain,
Paris : Sté d'éditions géographiques,
maritimes et coloniales, 1925 | 2. | Où
André Gain suit les pas de Victor Segalen, jusqu'à
photographier une “ église en ruine à
Mangareva ” dont l'auteur des Immémoriaux avait pris un dessin le 1er janvier 1904 (VS, “ Œuvres complètes ”,
p. 443 et “ Destins d'explorateurs ”, photogaphie
de la p. 139) ; la similitude est telle qu'on pourrait croire le
dessin de 1904 effectué d'après la photographie de 1937. | 3. | Sans
oublier ce clin d'œil : “ Au pays des mages
noirs ”, le premier film de Jean Rouch (1947), est
projeté dans les salles de cinéma en ouverture de
séance, avant “ Stromboli ” de Roberto
Rossellini. |
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- Jules
Rouch, « L'Antarctide, voyage du
Pourquoi pas ? (1908-1910) » ill.
de Louis Gain, Paris : Sté d'Editions
géographiques, maritimes et coloniales, 1926
- Jules
Rouch, « Sur les côtes du
Sénégal et de la
Guinée » avec des photographies de Louis
Gain, Paris : Sté d'éditions
géographiques, maritimes et coloniales, 1925
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