Les îles / Philippe
Lançon. - Paris : JC Lattès, 2011. -
459 p. ; 21 cm.
ISBN 978-2-7096-3513-4
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NOTE
DE L'ÉDITEUR :
C'est l'histoire d'une femme élégante et
éduquée de Hong-Kong qui devient folle lors d'un
voyage
à Cuba.
C'est l'histoire des raisons pour lesquelles elle y est
allée.
C'est
l'histoire de l'effet de cette folie sur celui qui la raconte,
l'imagine : ses souvenirs, ses amours, ses amis, ses
rêveries.
C'est
l'histoire d'un homme dont le cœur est vissé
à ces deux îles où rien
n'aurait jamais dû le conduire, sinon l'obscur et capricieux
désir de
vivre l'instant, de n'en plus sortir, de l'écrire et d'aimer.
C'est
l'histoire de gens qui vivent à Hong-Kong, à
Paris,
à Cuba, en Inde. Ils sont seuls et voyagent parce qu'ils
sont
seuls.
Ce sont eux, les îles.
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Two
roads diverged in a yellow wood,
and
sorry I could not travel both.
Robert
Frost, The
road not taken
— cité p. 166 |
L'éditeur
suggère de trouver les
îles en-dehors du cadre géographique où
se
déploie le roman ;
précisément dans la profuse
distribution des personnages : “ ces gens
qui voyagent parce qu'ils
sont seuls. Ce sont eux les îles ”.
Insularité pour isolement — la
métaphore s'impose.
Mais,
à prendre en compte le mouvement, les rencontres et les
échanges qui se suivent de page en page, on peut avec
autant de pertinence culbuter la proposition et citer John
Donne : “ No man is an
island ” 1.
Reste que les îles — Hong-Kong et
Cuba —
occupent fermement le premier plan du
récit, qu'elles sont
dessinées d'une plume vive et sans complaisance 2 ;
leurs traits respectifs s'éclairent par contraste, reflet ou
contamination :
“ Cuba est une île
désœuvrée ”
(p. 48), Hong-Kong
“ une Cuba qui aurait réussi, une Cuba
efficace et
sans Fidel Castro ” (p. 80).
Hong-Kong ou
Cuba. Faut-il choisir ? au risque de laisser une porte se
refermer ou, dans le cas contraire, de se perdre, comme Jad
— femme
élégante et éduquée de
Hong-Kong —
en fait à Cuba la douloureuse expérience.
1. |
“ No
man is an island entire of itself ; every man is a piece of
the
continent, a part of the
main … ” — Devotions upon emergent
occasions, Meditation XVII (1624) |
2. |
Ces images ne sont pas de celles qu'affichent les
agences pour racoler les touristes … |
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EXTRAIT |
J'avais
parlé à Jad de Cuba huit ans plus tôt,
à
Hong-Kong. Ou plutôt, je n'avais pas eu besoin de lui en
parler : Marilyn, qui était encore ma femme, aussi
cubaine
que française et aussi française que cubaine,
s'était chargée de vendre l'île par sa
seule
présence. Marilyn était toujours heureuse
à
Hong-Kong. Même si tout était
différent, tout lui
rappelait son île : la mer, les bruits, les odeurs,
l'énergie, la chaleur, la prodigieuse restauration, le
perpétuel et industrieux bricolage des Cantonais, leur
humour et
leur côté bon vivant. Hong-Kong était
pour Marilyn
une Cuba qui aurait réussi, une Cuba efficace et sans Fidel
Castro. Elle lui rappelait accessoirement les épiciers
chinois,
généralement cantonais, qui n'avaient
commencé
à quitter l'île qu'à partir de la fin
des
années soixante, quand Castro, devenu un bavard omnipotent
tout
enivré de son génie rhétorique,
s'était
pris pour le destin économique et social de tous et de
chacun.
Le rire pétaradant de Marilyn, ses fureurs soudaines, sa
gourmandise et curiosité, sa
spontanéité violente
et orgueilleuse, tout en elle pouvait respirer dans les rues de
Hong-Kong et, en retour, donner à ceux qu'elle y croisait
l'envie de connaître l'île où
certains de
leurs ancêtres avaient été
attirés ou
déportés par les esclavagistes espagnols. On
pouvait dire
que Marilyn était une promesse qui ne mentait pas :
les
gens vivrait ce qu'elle leur annonçait malgré
elle, par
sa simple présence, et sans jamais faire la moindre
publicité. Elle pouvait aussi (était-ce
contradictoire ?) les effrayer — mais Jad
n'avait pas
été effrayée. Leur entente avait
été
immédiate, alors même que tout aurait dû
les rendre
indifférentes, voire hostiles, l'une à l'autre.
Il faut
parfois aller au bout du monde pour avoir de ces surprises sans
explication.
☐ pp. 80-81 |
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- « Les
îles », Paris : J'ai lu (10329),
2013
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- « L'élan »,
Paris : Gallimard, 2013
- « Le
lambeau », Paris : Gallimard, 2018
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mise-à-jour : 8
janvier 2020 |
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