Écrits intimes : quatre esquisses biographiques [suivi de] Voir Minorque / Clément Rosset. - Paris : Les éd. de Minuit, 2019. - 141 p. ; 19 cm. ISBN 978-2-7073-4564-6
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Clément Rosset qui se rendait fréquemment à Majorque éprouve un jour l'envie de voir Minorque — et ses monuments mégalithiques, torres, taules, navetes, …
Faute
de moyens, l'excursion est improvisée et limitée dans le
temps : rater le bateau du soir, ce serait “ passer
huit jours dans l’île avant de pouvoir regagner Majorque,
puis Barcelone ” et arriver à Paris
trop tard pour y passer un examen, perdre une
année scolaire, compromettre une “ carrière
future ”.
Or à peine sortis du port de
Barcelone, Clément Rosset et Burkard, l'ami qui a souhaité
l'accompagner, sont exposés à une tempête
mémorable. Quant à la visite de Minorque elle
semble compromise par le mauvais temps persistant et par la
difficulté d'aller d'un point à un autre de l'île.
Pourtant quelques éclats de bonheur arrivent
à rompre un enchaînement de catastrophes mineures qui
semblaient destinées à faire échouer le programme de
découverte. ❙ | Clément
Rosset (Carteret, Manche, 1939 - Paris, 2018). Ancien
élève de l'École normale supérieure,
agrégé de philosophie, il a enseigné la
philosophie à l'université de Nice. → Gilles Pétel, “ In memoriam Clément Rosset ”, 2 avril 2018 [en ligne] |
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EXTRAITS |
Le
bateau s’éloigne du quai. La vue d’ensemble.
C’était splendide ! Nous embrassons Palma du regard, la
baie illuminée. […] C’est cette
nuit-là, précisément, que le temps commença
à changer. Ce fut le début de cette fameuse tempête
qui ravagea la Catalogne … Le bateau tanguait un peu, il
pleuvait beaucoup. Nous n’avions pas de cabine et les rares
passagers étaient si malades que l’odeur irrespirable qui
régnait à l’intérieur du bateau nous en
rendait l’accès impossible. Nous aurions été
nous-mêmes immédiatement malades. Dans des moments pareils
on se dit qu’on a tort de voyager, qu’on est si bien chez
soi ! Au petit matin, nous aurions dû être en vue
de l’île. Mais nous voguions en plein brouillard et
à tel point que nous avons failli la manquer, cette île.
C’est de justesse que, le Commandant ordonnant une brusque
manœuvre “ arrière toute ”, nous
avons évité le phare de Mahon, brusquement apparu devant
nous, près à le toucher. Je dois dire que l’arrivée dans le port de Mahon est magnifique.
☐ pp. 130-131 |
Et
de nouveau, ce fut soudain le bonheur ! La pluie avait
cessé. Une lumière d’après l’orage
baignait la campagne où je voyais quantité de torres.
C’était l’endroit de l’île où il
y en avait le plus. Je l’appris plus tard. Quant à la
ville à laquelle je parvins, complètement
exténué, elle était extraordinaire. Perchée
sur une falaise circulaire, avec le port en contrebas, et rien que des
petites ruelles tournantes, imbriquées les unes dans les autres,
avec des hôtels particuliers et des églises en pierre
jaune-rose du XVIIIe siècle, et de grosses lanternes en fer
forgé à l’angle des maisons, dans un style
d’opéra mozartien.
☐ p. 138 |
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- Clément Rosset, « Récit d'un noyé », Paris : Les Éd. de Minuit, 2012
- Clément
Rosset, « Esquisse biographique » entretiens avec
Santiago Espinosa, Paris : Les Belles lettres (Encre marine), 2017
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mise-à-jour : 16 mars 2022 |
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