Bornéo :
la diagonale vert jungle / Catherine Samson et Jacques
Raymond ;
préface de Bernard Sellato. - Lascelle : Ed. de la
Flandonnière, 2008. - 223 p. : ill.,
carte ;
33 cm.
ISBN
978-2-918098-00-3
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Quelle
joie,
Traverser
à gué la rivière en
été,
Les
sandales à la main !
☐ Yosa
Buson (1716-1783) |
BERNARD SELLATO
: Une grande diagonale verte. C'est un bien beau voyage,
dans des
régions que je connais bien. Cette traversée des
monts
Müller fut tentée en 1825, dans le sens Est-Ouest,
par le
major Müller, qui y laissa sa tête et son nom, et
réussie bien plus tard, dans l'autre sens, par le bon
docteur
Nieuwenhuis. Si ce n'est sans doute pas « un des
treks les
plus difficiles au monde », comme le
suggère l'auteur
d'un guide de voyage, je garde personnellement, pour avoir longuement
sillonné ces montagnes dans les années 1970, le
souvenir
ébloui d'une forêt splendide, aux arbres immenses,
aux
ruisseaux limpides, aux sangliers dodus.
La première
traversée depuis le Mahakam vers le haut plateau d'Apo Kayan
fut
accomplie par le même Nieuwenhuis en 1900, afin de prendre
contact avec les Kenyah, groupes guerriers alors
incontrôlés. Quant au sentier du col d'Apo Napu,
il fut
ouvert dans les années 1920, lorsque l'administration
coloniale
néerlandaise eut pacifié la région.
Rarement
pratiqué, mal entretenu, il demeure difficile. On est
là,
entre Pujungan et Mahakam, dans une des régions les plus
isolées de Bornéo, pour cause de dangereux
rapides, et
dont les habitants, que j'ai fréquentés au long
des
années 1990, sont parmi les plus hospitaliers,
malgré
leur tenace réputation de féroces coupeurs de
têtes.
(…)
Catherine
et Jacques ont donc rencontré Bornéo. Avec
curiosité, avec largeur d'esprit, avec tendresse. Ils la
décrivent, la grande île, par la plume et par
l'image, en
parallèle : ses forêts et ses villes, ses
massacres
à la tronçonneuse et ses recoins inaccessibles,
ses
grands-mères à longues oreilles et ses ados
à
moto. Ils la décrivent comme ils l'ont vue, comme elle est,
sans
tricher, montrant les toits de tôle ondulée, des
parapluies en quantité, des bottes de caoutchouc, des
peintures
à l'acrylique, l'exploitation forestière et
autres
activités modernes. L'antenne parabolique, le
téléphone portable, Internet et Coca-Cola sont
déjà là. Les Dayak veulent devenir des
citoyens du
monde : ils le sont déjà, pour partie.
En
contrepoint, toujours, pourtant, au-delà des costumes de
fête ou de folklore, les humbles besognes quotidiennes et
immémoriales de l'écobueur, du pêcheur,
du
chasseur, du piroguier, de la mère de famille sont
restées les mêmes, saisies avec beaucoup
d'humanité. Dans le jeu de couleurs et de reflets de ces
photos,
dans ces superbes portraits, dans ces innombrables sourires, la vie
traditionnelle transparaît sous la modernité. Ces
Dayak
bottés, qui semblent avoir oublié leurs pieds,
sont
encore vraiment des Dayak.
On ne
chantera jamais assez
l'éloge du pied. C'est à leurs pieds, qui ont
tant
souffert, que Catherine et Jacques doivent d'avoir pu capturer la
richesse de cette nature exubérante et de ses
résidents.
(…)
☐ Préface :
Vert
diagonal, ou l'Eloge du pied, pp. 4-5
❙ |
Un millier de kilomètres
— à vol
d'oiseau ! — séparent Tanjung
Selor au Nord-ouest de Pontianak au Sud-Est. Au long de cette diagonale,
Catherine Samson (journaliste) et Jacques Raymond (phtographe) ont
rencontré une chaîne montagneuse dont les sommets
culminent à plus de 2 500 mètres, la
forêt équatoriale, de nombreux et
impétueux cours d'eau … Le
périple (en bus, en voiture, en pirogue et surtout
à pied) a duré près de trois mois. |
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EXTRAIT |
L'arrivée à Sungai Barang est
saisissante.
L'impression est résumée de cette expression :
havre de
paix. C'est le contraste entre la puissance de la forêt dans
laquelle les hommes s'échinent à entretenir un
chemin et
la sérénité qui émane du
lac de barrage sur
la Barang qui doit donner cette sensation d'harmonie. Les maisons de
bois sont bâties sur pilotis tout autour du plan d'eau. Les
habitants devisent sur le pas de leurs portes, des enfants se baignent,
des jardins potagers luxuriants entourent le village, puis c'est la
forêt, ressource inépuisable de bois de chauffage
et
où le gibier abonde. Au centre du bourg se trouve
le balai, la
grande maison commune décorée de nombreuses
peintures et
sculptures, qui sert de salle de réunion pour les jeunes et
pour
toutes les autres manifestations telles que
répétitions
de chants, de danses, conseils de village … Calme
et
douceur de vivre : c'est la sensation qui prévaut
d'autant
plus que l'altitude tempère la chaleur étouffante
du
climat équatorial.
☐
p. 127 |
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE
d'autres regards sur
Bornéo |
- Margaret
Brooke, « Reine
des coupeurs de tête : ma vie à
Bornéo », Genève,
2000
- C.S.
Godshalk, « Kalimantaan »,
New York, 1998
- Judith M.
Heimann, « The
most offending soul alive : Tom Harrisson and his remarkable
life », Honolulu : University of
Hawai'i press, 1998 ; « Le Dernier des
Derniers : la vie extraordinaire de l'anthropologue Tom
Harrisson », Toulouse, 2005
- Tineke
Hellwig and Eric Tagliacozzo (ed.), « The Indonesia
reader : history, culture, politics »,
Durham (North Carolina) : Duke university press, 2009
- Ida
Pfeiffer, « Ma
tête à couper : une puritaine ches les
cannibales 1851-1853 », Paris, 1993
- Troub's,
« Le
paradis … en quelque sorte (90 jours à
Bornéo) », Paris, 2008
|
- Bernard
Sellato, « Nomades et sédentarisation
à
Bornéo : histoire économique et
sociale », Paris : Ecole des hautes
études en
sciences sociales (Etudes
insulindienne, Archipel, 9),
1989
- Bernard
Sellato, « Innermost Borneo : studies in
Dayak
cultures », Paris : Seven Orients,
Singapore :
Singapore university press, 2002
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mise-à-jour : 19
novembre 2009 |
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