Le bleu qui fait mal aux yeux,
et autres nouvelles inédites / Alex W. du Prel. -
Papeete : Au Vent des îles, 1999. -
162 p. ; 21 cm.
ISBN 2-909790-71-1
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MOHAMED AÏT AARAB :
Publié pour la première fois en 1988, Le
Bleu qui fait mal aux yeux d'Alex du Prel est de nouveau en
librairie dans une édition augmentée de quatre
nouvelles inédites. On connaît le regard de
l'auteur pour dénicher, sous l'apparence du quotidien et du
banal, le petit détail qui trouble ou qui fait sourire, qui
dérange ou qui réjouit. Les douze nouvelles de ce
recueil sont l'occasion d'un voyage dans l'espace — du Prel
entraîne le lecteur à travers tout le Pacifique,
de Rangiroa à Bora Bora en passant par les Samoa —
mais aussi dans le temps : on devine clairement la nostalgie
de l'écrivain pour cette Polynésie
peut-être disparue à jamais sous les coups de
boutoir de la
« modernité », pour
ces îles où « il
était bon alors de se promener le long du rivage et de
saluer tout le monde en passant devant les maisons ».
D'étonnants
personnages hantent les différents textes, à
l'instar de ce facétieux tupapau qui
donne bien du fil à retordre au directeur
métropolitain du Palace Hôtel, ou de ce Don Juan
italien qui parcourt des milliers de kilomètres dans tout le
Pacifique sud pour séduire « toutes
sortes de femmes. Des brunes. Des blondes. Des noires de Papouasie,
etc ». Si l'humour est souvent
présent […] le ton se fait parfois plus grave
pour rappeler que si le Paradis est parfois en folie, il est aussi en
grand danger, ainsi que le note un personnage : « Un
atoll est comme une petite planète. Un vrai miracle de la
nature, mais fragile. Chaque excès sera
irrévocablement suivi par un
désastre ». En ce sens, le
texte le plus poignant est, sans aucun doute, « La
Honte du vieux », nouvelle de deux pages
dans laquelle éclate toute la détresse, tout le
désarroi d'un vieil homme contemplant le monde nouveau qu'il
a contribué à édifier. Loin des
clichés à usage exotique, Alex du Prel
dévoile un univers authentique dont il sait partager les
douleurs, mais aussi les moments de joie. Alors, pour reprendre une
formule bien connue des lecteurs de ce magazine,
« à lire
absolument » !
☐ Tahiti Pacifique Magazine, 101, Septembre 1999
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EXTRAIT |
[…] nos îles sont
impitoyables avec ceux qui ne les respectent pas. Regarde les
îles Gambier avec leurs immenses cathédrales
vides. Regarde l'île de Norfolk avec son bagne en pierres
sculptées. Regarde le désastre de l'atoll de
Bikini. Regarde les statues de l'île de Pâques et
les marae tapu de Hawaii. Tous sont les
vestiges de rêves d'empire. Tous, sont aussi des monuments
à la souffrance d'un peuple doux et paisible.
Nos îles seront toujours fatales aux
arrogants et aux tyrans. Car dans ces univers fermés, ils se
retrouvent vite face à eux-mêmes. Comme pris dans
un piège. C'est inévitable.
Peut-être est-ce cette leçon
de modestie permanente qui est à l'origine de la douceur et
de la tolérance de la société
polynésienne.
[…]
☐ Le bleu qui fait mal aux yeux,
p. 161
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- « Le
bleu qui fait mal aux yeux », Moorea : Ed.
de Tahiti, 1988
- « Le
bleu qui fait mal aux yeux » éd.
révisée avec quatre nouvelles
rajoutées, Moorea : Ed. de Tahiti, 2002
- « Tahiti
blue, and other modern tales of the South Pacific »,
Moorea : Ed. de Tahiti, 1990
- « Tahiti
blue = Le bleu qui fait mal aux yeux »
éd. bilingue français-anglais, Moorea :
Éd. de Tahiti, 1994
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Sur
le site « île en
île » : dossier Alex du Prel |
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mise-à-jour : 29
mars 2017 |
Citoyen
américain naturalisé français en 1983,
Alex
du Prel s'était acclimaté à
Moorea (Polynésie française) où il est
mort le 14 mars 2017. |
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