Monsieur
le Ministre Jusqu'au bout de la patience / Raoul Peck ;
rééd. avec une préface de Raoul Peck
et une
postface de l'ancien Premier ministre Rony Smarth. - Port-au-Prince,
Paris : Ed. Velvet, 2016. - 231 p. :
ill. ;
22 cm.
ISBN 978-2-913416-00-0
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NOTE
DE L'ÉDITEUR : Raoul
Peck a été pendant 18 mois ministre de la Culture
en
Haïti. Le 22 octobre 1997, il démissionne
collectivement
avec six de ses collègues ministres pour protester des
dérives du pouvoir des Présidents
Préval et
Aristide.
Ré-édité,
corrigé et annoté dans cette nouvelle version, Jusqu'au bout de la patience
est le récit d'une incroyable expérience
d'engagement
politique dans l'Haïti des années 90 à
2000. On peut
y lire très clairement les prémices des crises
profondes
d'aujourd'hui.
À
l'époque, écrire un tel
livre n'était pas sans danger. Risques, pressions, menaces,
n'ont pas empêché Raoul Peck, ancien ministre de
la
Culture d'Haïti, de parler des maux de son pays.
Recueil
de réflexions sur l'engagement politique, son livre est
aussi la
radiographie d'un formidable mouvement démocratique qui a
profondément changé le pays.
Utilisant
l'ironie et
la passion, Raoul Peck porte un regard lucide et sans concessions sur
les entrailles de « la
Bête ».
Il
règle ses comptes avec la classe politique et les dirigeants
du
moment, avec les intellectuels de son pays et avec le milieu culturel
dans son ensemble. Mais surtout, Raoul Peck règle ses
comptes
avec lui-même. Sorti meurtri, mais non vaincu, d'une
expérience qui n'est finalement qu'un passage vers d'autres
formes de combat, il laisse espérer d'autres pistes de
construction.
Jusqu'au bout de la patience
est le récit de l'expérience d'un artiste-citoyen
devenu
ministre mais refusant la langue de bois et le silence complice. Entre
colère et ironie, entre récit intime et regard
humoristique, Raoul Peck nous livre là un
témoignage
précieux.
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RAOUL
PECK :
[…] Monsieur le ministre
… Jusqu'au bout de la patience
[…] a été écrit dans
l’urgence comme
une bouée de sauvetage à laquelle
m’accrocher.
Cette urgence et cette célérité se
sont transmises
au texte. C’est pourquoi j’ai eu envie de reprendre
certains passages, d’en adoucir d’autres, mais
aussi de
préciser certains aspects que j’avais
préféré à
l’époque taire (par
exemple certains noms) parce que c’était soit trop
dangereux (c’était l’une des
périodes chaudes
Arisitidiennes) ou que cela pouvait leur causer du tort.
Aujourd’hui certains ont disparu, d’autres sont
devenus
inoffensifs. C’était une initiative personnelle.
Mais
j’ai toujours demandé à certains des
plus proches
d’écrire un jour sur leur expérience.
Jusqu’ici sans succès. J’ai
été
très heureux que l’ancien Premier ministre Rony
Smarth accepte d’écrire la postface de
cette
édition. C’est quelqu’un qui
préfère
travailler hors des projecteurs. Il m’a fait
l’amitié de nous confier ses pensées
sur la
situation actuelle et sur une partie de notre parcours commun.
[…]
→ extrait d'un entretien
recueilli par Élisée Décembre, Le
National | 13 décembre 2015 [en ligne]
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ISABELLE
POITTE
: Vous avez été ministre de la
Culture d'Haïti en
1996 et 1997, puis vous avez démissionné avec
plusieurs
membres du gouvernement. Comment cette expérience a-t-elle
nourri votre réflexion ?
RAOUL
PECK :
Cette expérience douloureuse, que
je ne regrette pas et qui m'a inspiré un livre [Monsieur le
ministre … Jusqu'au bout de la patience],
m'a permis de comprendre les difficultés d'un pouvoir dans
le
quotidien de la cité. Cela nettoie de tout
idéalisme
moral et sentencieux. Il n'y a pas de « tous
pourris ! », mais un nœud
très complexe de
rapports de puissance. On perd aussi l'idée, belle, qu'une
révolution ou qu'un homme peuvent tout changer. C'est plus
long
que cela et plus complexe. Une explosion peut crever
l'abcès,
mais après il faudra tout reconstruire ... avec
quasi les
mêmes, car aucun pays n'a un peuple de rechange, des juges de
rechange, des policiers de rechange. Beaucoup de politiciens de gauche
en Haïti, en France aussi d'ailleurs, ont gardé une
culture
d'opposition et de militantisme et n'arrivent pas à faire la
transition vers une démarche de prise de pouvoir, qui
implique
des alliances (voir Lula au Brésil) ... et des
compromis.
→ extrait d'un entretien
publié par Télérama | 3165 | 10 septembre 2010 (référence à l'édition de
1998) [en ligne]
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JAMES
R. MORRELL 1 : In this book,
a former minister of the Préval government leads us
relentlessly through the palace intrigue of Haiti. In doing so he
provides an invaluable inside look, available nowhere else, at the
phenomenon of divided government that is further immiserating the
poorest country in the Western Hemisphere.
The book is a personal memoir
— unabashedly so. Peck is not only partisan, he is
passionate. He comes down heavily on the anti-Aristide side of the
debate currently wracking Haiti and paralyzing its government. But he
did not begin that way, in 1996, when he was appointed. His personal
odyssey to that conclusion is a large part of the book.
So it is no course in political science that one
should expect here, even though it is a treasure trove of facts
invaluable to understanding how Haiti's politics have sunk to their
current low level. It will be up to the reader to decide whether the
author's passion has distorted his rendition of the facts. But if the
facts can be accepted, reading this book is indispensable for
understanding Haiti's political predicament and the clouded outcome of
a major policy commitment by the Clinton administration and the United
Nations. Without this book, you're running blind.
Raoul Peck, an internationally-renowned film
producer [Man by the shore, L'homme sur
les quais] served as minister of culture in the
Haitian government from March, 1996 until he resigned in October, 1997
to protest what he saw as an anti-democratic takeover by former
president Jean-Bertrand Aristide. He leads us through the skein of
events from the idealistic beginnings he shared with many other Haitian
professionals to the betrayals that took him to the
« end of patience ».
[...]
→ lire la suite du compte-rendu
(éd. de 1998) à l'adresse suivante : http://www.haitipolicy.org/archives/Publications&Commentary/peck.htm
1. |
Research
director of the Center for International Policy, former member of
President Aristide's advisory team at Governors Island. |
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- « Monsieur
le Ministre … Jusqu'au bout de la
patience »
préface de Russell Banks, Port-au-Prince : Ed.
Velvet, 1998
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- « J'étouffe », Paris : Denoël (Document), 2020
- « Exterminate all the brutes », Paris : Denoël (Document), Velvet Film, 2021
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ÉLÉMENTS
POUR UNE FILMOGRAPHIE DE RAOUL PECK
NB — entre
« documentaire » et
« fiction » la
frontière est parfois
incertaine … |
- 1982 | De Cuba traigo un cantar —
documentaire, Cuba
- 1988 | Haitian corner —
fiction, Haïti
- 1990 | Lumumba, mort d'un
prophète — documentaire
- 1993 | L'homme sur les quais —
fiction, Haïti
- 1994 | Haïti, le silence des
chiens — documentaire, Haïti
- 1994 | Desounen : dialogue
with death — documentaire, Haïti
- 1997 | Chère Catherine —
documentaire, Haïti (contemporain de la rédaction
de Monsieur le
ministre …)
- 1998 | Corps plongés —
fiction, Haïti
- 2000 | Lumumba —
documentaire
- 2001 | Profit & nothing
but ! or Impolite thoughts on the class struggle
— documentaire, Haïti
- 2010 | Moloch tropical —
fiction, Haïti
- 2013 | Assistance mortelle —
documentaire Haïti (l'intervention des ONG après le
tremblement de terre de 2010)
- 2014 | Meurtre à Pacot —
fiction, Haïti
- 2017 | Le jeune Karl Marx —
documentaire
- 2017 | I am not your negro —
documentaire (un ardent portrait de James Baldwin)
- 2021 | Exterminate all the brutes — série en quatre épisodes
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mise-à-jour : 6 février 2022 |
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