Insulaires / Jocelyne Desverchère. - Paris : P.O.L, 2020. - 158 p. ; 18 cm. ISBN 978-2-8180-4937-2
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Boris accompagne
Hélène quand elle part en Corse
“ à la découverte de ses origines, d'une
partie d'elle-même ” (p. 18). Dans l'île,
les premières rencontres sont prometteuses, et le séjour
semble pouvoir concilier les exigences de la quête avec celles, plus
prosaïques, d'un circuit touristique
— “ la beauté du site nous rend
muets ” (p. 76) ; “ la
beauté nous suffit ” (p. 104).
Mais quand
Hélène et Boris se rapprochent du cœur de
l'île, pour y trouver réponse, la tonalité de
l'aventure s'infléchit progressivement avant un
dénouement brutal qui ravive de vieux clichés sur la
société insulaire. “ Ici finit la civilisation ” annonce Hélène peu avant le drame.
Mais les insulaires
ne sont pas seuls à porter le poids du désordre ;
l'esprit des lieux menace également les visiteurs comme
frappés d'ensauvagement
— à l'image de ces improbables hybrides :
“ deux vahinés montagnardes ”
(p. 117) en plein massif corse !
❙ | Jocelyne
Desverchère — née en 1968 — est
comédienne (cinéma, théâtre,
télévision). Elle a réalisé deux courts
métrages et publié deux romans chez P.O.L : Première à éclairer la nuit (2016) et Simon (2018). |
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EXTRAIT |
Angelo
donne des ordres pour installer la couche nocturne et demande à
Shean de se faire accompagner par Hélène pour aller
chercher des fougères : tapisser le sol de la bergerie de
branchages pour se protéger de l'humidité. […] Je
suis chargé de confectionner, à l'aide de pierres
récoltées aux abords du refuge, le foyer du feu qui nous
réchauffera à l'extérieur de l'habitacle. Angelo
s'active à la découpe de bûchettes pour
l'alimenter. […] Il manie l'engin à une vitesse
éclair et reviens les bras chargés, son corps
disparaît derrière les bois. Il s'amuse à gambader
autour de moi. Je ris. La danse dure. Je ne ris plus. Il stoppe
quand s'approchent vers nous deux arbustes en mouvement. Les filles
avancent camouflées derrière les feuillages, elles
pouffent. Quand elles arrivent à notre hauteur, d'un même
mouvement, elles abaissent les fougères découvrant leurs
poitrines nues, telles deux vahinés montagnardes avec leurs
shorts et leurs brodequins toujours. J'ai le temps de contempler les
seins d'Hélène et de Sean, de les comparer.
Hélène est campée, comme on dit chez moi, des
épaules carrées au-dessus de ses seins qui sont ronds et
menus, quand ceux de Sean sont lourds et s'affaissent, accrochés
à son buste étroit. […] Quand je relève la
tête, les seins des filles ont disparu derrière leurs
tee-shirts respectifs, je les devine encore. […] Est-ce que j'ai rêvé ?
☐ pp. 116-118
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mise-à-jour : 25 août 2021 |
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