Zafimaniry
intime = Zaho Zafimaniry / texte bilingue français malgache de
Johary Ravaloson ; photographies de Sophie Bazin ;
préface de Juliette Ratsimandrava. - Le Tampon (La
Réunion) : Dodo vole, 2008. - 84 p. : ill. ;
21x21 cm.
ISBN 978-2-9522004-4-8
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NOTE DE L'ÉDITEUR
: Ce carnet de voyage bilingue français-malgache raconte dix
années de rencontres entre les auteurs et les sculpteurs du pays
zafimaniry, peuple des Hauts-plateaux malgaches dont le savoir-faire
est reconnu patrimoine immatériel de l'humanité par
l'Unesco.
Privilégiant les portraits, ce témoignage d'un auteur
malgache migrateur évoque les questionnements liés
à l'identité, au développement, à la
frugalité, en même temps qu'il nous entraine pour un
voyage dans l'espace et le temps.
❙ | Johary
Ravaloson est né à Antananarivo et vit à La
Réunion. Ses multiples formes d'expression (l'écriture,
l'art contemporain, le droit) sont traversés par le thème
des Dodos. Ces Dodos peuvent être malgaches, réunionnais,
mauriciens, … des humains qui, bien adaptés à
leur milieu naturel, perdent soudainement pied en étant
confrontés aux nouveautés venues d'ailleurs. |
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DOMINIQUE RANAIVOSON : […]
Bien plus qu'un carnet de voyage, ce récit témoigne de la
difficulté à s'extraire de soi-même pour vivre une
rencontre qui ne fige pas l'Autre dans une construction faite de
connaissances et de raisonnements ; il permet à chacun de
découvrir à la fois les ambiguïtés de ceux
que l'on croit être hors du temps et celles dans lesquelles
vivent ceux qui reviennent de la modernité. Ce livre prouve
aussi au lecteur charmé par la sincérité et la
candeur du ton l'intérêt de traduire en mots et en images
cette persévérante quête de soi qui passe par
l'Autre. Du sein de leur forêt lointaine, les Zafimaniry,
merveilleux sculpteurs, trafiquants de rhum, éternels demandeurs
de riz bientôt reliés par internet, auront fait
découvrir à tous que « comme la
vérité, un arbre droit ne se trouve qu'au milieu de la
forêt » (p. 34). Il faut souhaiter à ce
beau livre, publié à La Réunion mais accessible
par le site de son éditeur, de séduire tous ceux qui
marchent vers celle-ci.
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INCIPIT |
Les
Zafimaniry sont bien reliés au monde maintenant. Pour moi,
pourtant, aller chez eux c'est toujours aller hors du monde. Ils
habitent les dernières forêts des Hauts-Plateaux de
Madagascar.
A la fin du dix-huitième siècle, ils ont quitté
l'Imerina, ma région, plus au nord, et se sont
déplacés par migrations successives vers le sud-est, tout
en restant sur les hauteurs, à la poursuite de la forêt.
Il se trouve que cette époque, durant laquelle les
rizières aménagées et les longues collines de
pâturage remplacèrent l'économie forestière
dans le pays de mes pères, correspondait aussi à
l'organisation d'un Etat centralisateur, à l'émergence du
projet d'un royaume n'ayant de limite que la mer, et donc aussi pour
nous, gens de l'intérieur, l'ouverture à
l'Occident : une mutation métaphysique se préparait.
A ce moment-là, les familles qui s'appelleront Zafimaniry s'en
allèrent.
En raison de leur isolement et de la permanence de l'environnement
forestier au fil de leurs migrations, leurs descendants auraient
gardé le mode de vie des anciens. Je comptais sur eux pour
retrouver le moi que j'avais jeté pour le monde nouveau. Je
m'étais précipité dans la gueule de celui-ci,
hypnotisé par ses biens et sa puissance. Ces choses-là
arrivent. Une histoire d'images. De surcroît, j'ai changé
de résidence, de ville, de pays, d'hémisphère.
Très vite, en avion (mes racines coupées, je rêvais
d'ailes). La vitesse non seulement amnésie mais déplace.
Lorsque je disais qui j'étais, on me rétorquait
« Vous n'êtes pas d'ici ».
Traînant des réminiscences d'ancêtres
derrière moi, je reviens sur mes pas. A croire que la rencontre
se ferait rien qu'en tirant un fil qui ne demande qu'à se
dérouler du néant jusqu'à moi, et s'imposerait. Je
m'acharne à terrasser mon changement. Voilà le pourquoi
de ces voyages, de ces pied-à-terre.
Ceux qui m'ont précédé sur ces sentiers
escarpés et embrumés et ont tissé des liens avec
ce qui paraît en dehors du monde, mais qui en même temps ne
peut qu'en faire partie, savaient ou auront appris l'ambivalence. Les
Zafimaniry sont un prétexte au bout du voyage. |
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE
- « La porte du sud », Sainte Clotilde (La Réunion) : Orphie, 2003
- « Rumeurs de feu »,
in Dominique Ranaivoson (éd.), Chroniques
de Madagascar, Saint Maur-des-Fossés : Sépia,
2005
- « Antanarivo, ainsi les jours », Paris : Publie.net, 2010
- « Géotropiques », La Roque d'Anthéron : Vents d'ailleurs, 2010
- « Les larmes d'Ietsé », Le Tampon (La Réunion) : Dodo vole, 2012
- « Les nuits d'Antananarivo », Antananarivo : NoComment, 2016
- « Vol à vif », Le Tampon (La Réunion) : Dodo vole, 2016
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mise-à-jour : 14 mars 2016 |
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