Jean Paulhan

Lettres de Madagascar, 1907-1910, éd. par Laurence Ink

Claire Paulhan

Paris, 2007

bibliothèque insulaire

   
Madagascar
parutions 2007
Lettres de Madagascar, 1907-1910 / Jean-Paulhan ; éd. établie, annotée et présentée par Laurence Ink. - Paris : Claire Paulhan, 2007. - 534 p. : ill., cartes ; 22 cm. - (Correspondances de Jean Paulhan).
ISBN 2-912222-25-7
Aux premiers temps du XXe siècle, Jean Paulhan âgé de vingt-trois ans quitte la France pour Madagascar où durant trois ans il enseignera le français, le latin et la morale au collège pour garçons européens de Tananarive. En marge de son enseignement, Jean Paulhan se prend de passion pour le pays qui l'accueille, pour ses habitants, leur histoire, leur culture ; il apprend la langue avec ferveur au point d'être reçu, en octobre 1910, au brevet de malgache avec la mention très bien. Ainsi, comme beaucoup, il s'est ouvert au charme de la grande île ; mais, plus tard il saura, mieux que d'autres, “ rendre en mots ce je-ne-sais quoi malgache qui fait de Madagascar un pays bouleversant ” (Laurence Ink, Introduction, p. 10).

Derrière la relation du quotidien souvent banal d'un enseignant expatrié, les lettres que Jean Paulhan adresse à sa mère et à sa tante montrent l'éveil progressif d'un attachement solide et singulier — tout le contraire d'un engouement capricieux. Le brouillage des repères familiers oblige l'observateur à s'interroger sur lui-même autant que sur son nouvel environnement, dans un mouvement qui n'est pas sans analogie avec celui qui, ailleurs, anime Victor Segalen 1. Expérience marquante à propos de laquelle, trente ans plus tard, il évoquera un “ renversement de clarté ” (cité par Laurence Ink, Introduction, p. 23).

Très vite, se dessine un grand projet : recueillir, traduire et tenter d'approcher le sens des proverbes traditionnels malgaches, les hain-teny ; après une première publication en 1913, Jean Paulhan ne cessera de questionner le mystère pressenti lors de son premier contact avec les Malgaches, leur pensée et leur langue.
       
1. Le 9 juillet 1909, dans une lettre à sa tante, il note avoir acheté pour la bibliothèque “ à peu près tout ce [qu'il] veut … Ruskin, les Immémoriaux d'Anély etc ”.
EXTRAIT
14 sept. [1908]

(…)

Le soir vient un peu. Le soleil se couche et a l'air dans l'eau. Dans notre jardin le petit garçon d'à côté joue avec notre tortue, lui monte sur le dos et cherche à la réveiller. Mais elle dort bien. Il nous voit et vient nous dire poliment bonjour : il nous dit d'un air grave : « il est agréable de se promener maintenant ».

Et notre dîner est déjà prêt. Il y a du riz, des brèdes fraîches, du lait et un petit morceau de pain d'avant hier. Nous quittons notre maison et nous allons plus haut encore, sur un rocher. La route passe loin en bas. Nous avons deux arbres pour nous seuls. Nous lisons des contes malgaches ou des journaux ou la grammaire.

Pour aller au collège, je puis prendre un chemin qui passe sur des rochers. Il est long, mais il traverse l'hôpital. C'est l'ancienne maison d'un Prince ; il est en pierre blanche et entouré d'arbres. Et les hovas viennent s'asseoir sur le rocher, en attendant la consultation. Ils attendent sans impatience, au soleil. Ils ont mis leurs plus beaux lambas, roses et oranges ou pâles. Et comme leurs figures se voient à peine, c'est comme une grande étoffe de soie. Ils n'ont jamais de maladies qui les rendent laids.

Et ils le savent. Ils disent : « celui qui est malade est un andriane » ; cela veut dire qu'il ne travaille pas et qu'il devient un noble — Ils sont souvent malades. Ceux que l'on envoie en France meurent de la tuberculose et ici il y a plus de morts que d'enfants. C'est un peuple étrange, qui n'est ni noir, ni jaune, ni blanc et qui a l'air de venir d'un autre monde.

(…)

pp. 245-246
COMPLÉMENT BIBLIOGRAPHIQUE

mise-à-jour : 11 novembre 2007

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