STANLEY
PÉAN et RODNEY SAINT-ELOI :
[…]
Ayibobo ! C'est (…) qu'il
existe une autre Haïti que celle des désastres
naturels ou politiques, une autre Haïti que celle des urgences
humanitaires et des luttes fratricides. L'Haïti des
mère-courage du quotidien, courage qui pousse des
mères de Cité-Soleil, l'un des plus insalubres
bidonvilles au monde, à revêtir leurs enfants
d'uniformes immaculés et empesés pour les envoyer
à l'école. Cette île de rêve
que les artistes ont peinte de couleurs vives et chaudes, qu'ils ont
peuplée d'animaux merveilleux tout droits issus d'une
Afrique lointaine. Cette terre dont les poètes ont
chanté les beautés, Ayiti cheri, pi bon
peyi passe ou nan pwen, non, il n'existe pas de plus beau
pays. L'amère-patrie dont Jacques Roumain rêvait
de gouverner la rosée, dont Jacques Stephen Alexis, fils des
Gonaïves, tenait à ce qu'on
célébrât tous les compères
général-soleil, dont Marie Chauvet pointait nos
amours, colères et folies, et dont Émile Ollivier
cherchait les rythmes de passage.
C'est de cette
Haïti-là qu'il sera question dans ce collectif.
Les écrivaines et
écrivains dont on a sollicité la collaboration
n'ont pas tous le même degré de connaissance du
pays. Il y en a qui n'y ont jamais mis les pieds. Qu'importe. Nous
avons opté pour la distance. Notre appel à la
solidarité les a touchés, de la même
manière qu'ils avaient sans doute été
touchés au préalable par Haïti, ce
symbole du combat quotidien contre les forces occultes. Nous leur avons
simplement demandé de traduire dans un texte de
création une image, un souvenir, un fantasme, une
idée que leur inspirait Haïti. En
manière de solidarité, tout simplement. De
Montréal à l'Afrique, de Paris à
l'île Maurice, elles et ils ont été
nombreux à répondre à notre appel.
Nous les en remercions au nom de celles et ceux qui, en Haïti,
gardent espoir de jours meilleurs envers et contre tous.
Quant à l'autre
Haïti, celle des cyniques et des vampires, celle des grands
mangeurs d'espérance et des esprits chagrins, celle de la
réclusion et de l'exclusion, celle de la
ségrégation et de l'indignité, nous la
laissons aux bons soins des journaux
télévisés et des éditoriaux
néo-libéraux.
☐
Liminaire,
pp. 8-9
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SOMMAIRE |
Liminaire, aux Haïtiennes et
Haïtiens de bonne volonté, Stanley
Péan et Rodney Saint-Eloi
- Le pays de Jacques Roumain, Théo Ananissoh
(Togo)
- Un voyage au Cap avec l'Oncle
Dé-à-coudre, David Homel (Canada)
- Le vieil homme à moitié
pierre,
Marie-Célie Agnant (Haïti)
- Mère-Miracle, Sami Tchak (Togo)
- État de rage, Ananda Devi (Maurice)
- Et moi aussi je ne sais rien de cette
île, Alain Mabanckou (Congo)
- Haïti 2004, Jean Morisset
(Québec)
- Pays chimérique, Yasmina Khadra
(Algérie)
- Lochard Clochard, Georges Anglade
(Haïti)
- Et si je n'aimais pas le soleil, Rodney Saint-Eloi
(Haïti)
- Elle n'avait peur de rien, Gary Klang (Haïti)
- Mémoire du premier Pas en
trèfle en Ayiti, Hédi Bouraoui (Tunisie)
- Ma Niña Estrellita, Stanley Péan
(Haïti)
- Deux cents ans de solitude, Tierno Monémembo
(Guinée)
- Corps en jachère, Jean-Luc Raharimanana
(Madagascar)
- La danse au lieu vide, Monchoachi (Martinique)
- Tante Denise, tu n'es pas gendarme, alors pourquoi
cette fusillade à tes funérailles ? Edwige Danticat
(Haïti)
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