Juan Frutos [suivi de] Archéologie de l'atelier / Gaelle
Chancerel. - Matoury (Guyane) : Ibis rouge, 2007. -
124 p. : ill. ; 33 cm.
ISBN
2-84450-299-5
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9ème
édition du Prix du Livre Insulaire : Ouessant 2007 |
livre en
compétition |
NOTE DE L'ÉDITEUR : Né
en 1951 à Mexico, Juan Frutos se définit
lui-même
comme le « fruit » des
années 1970,
né dans l'expérimental et animé d'une
infinie
curiosité face au monde qui l'entoure. Il fait sienne
l'idée de Joseph Beuys qui disait que les
« objets
doivent être regardés comme des stimulants pour la
transformation du concept de sculpture ».
À
23 ans il
quitte son pays pour la France. Ses rencontres avec des intellectuels
et écrivains comme Max-Pol Fouchet, Michel Butor, L.
Ferré ou Kenneth White... font de lui un amoureux des mots.
C'est d'ailleurs souvent un texte ou une phrase qui est à
l'origine de l'impulsion créatrice de Juan Frutos. Ainsi
chacune
de ses œuvres se lit et se relit sans fin à la
manière d'un recueil de poésie.
❙ | Née
en 1972 à Brest, Gaëlle Chancerel suit des études
d’histoire de l’art avant de se tourner vers
l’archéologie. Auteur d’articles scientifiques sur
le néolithique armoricain, elle s’installe ensuite en
Guadeloupe où elle conduit plusieurs études sur des
vestiges précolombiens issus de fouilles. Sa rencontre avec
Juan Frutos en 2002 la ramène au domaine de l’art par le
biais assez inattendu de l’archéologie avec un projet de
fouille de son atelier. La complicité née de cette
expérience pour le moins inédite a tout naturellement
conduit Gaëlle Chancerel à consacrer une monographie
à l’artiste et son œuvre. |
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EXTRAITS |
Juan
Frutos
— Quand je suis arrivé en Guadeloupe, j'ai
commencé
à travailler sur la ferraille. Sous le climat
caribéen,
le papier vieillit mal. Il fallait une ressource locale, un
matériau adapté. Ça me fascine
d'ailleurs
d'utiliser ce qui émane de chaque lieu. Pour moi c'est
presqu'une obligation. Si je squatte le pays bigouden, il faudra que je
fasse quelque chose avec les bigoudènes [rires]. Si je vais
en
Angleterre, je ferai un truc avec les briques. C'est ça la
mission géopoétique.
Gaëlle
Chancerel
— C'est un concept vaste et transdisciplinaire puisque, sous
ce
signe, des poètes, des philosophes et des scientifiques se
sont
rencontrés et se rencontrent aujourd'hui. A mon avis ton
travail
exprime l'enjeu géopoétique de rendre la Terre
à
nouveau intéressante alors que les
« zones
blanches » sur les cartes n'existent plus et que
« le divers
décroît ». Le peintre
voit la lumière sur les choses, alors que les autres voient
leur
fonction avant tout. Recueillir comme tu le fais les objets du rebut
avec, à chaque fois, l'expérience du lieu
où tu te
trouves pour les décoder ou les encoder dans une
œuvre,
est-il un acte géopoétique ?
Juan
Frutos
— La géopoétique je la pratique tous
les jours sans
y penser comme le faisaient André Breton et Antonin Artaud
quand
ils étaient au Mexique dans les années 30,
puisque
Kenneth White n'avait pas encore inventé le concept. Cela
implique le voyage. Si on va en Russie c'est dommage de ne pas
goûter la vodka Raspoutine, non ?
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Discussion entre amis,
p. 86 |
Gaëlle
Chancerel
— Yves Klein disait : « Le Bleu
n'a pas de
dimension, il est hors dimension ». Ton
œuvre est loin
d'être monochrome, mais même avant ta
série Effervescences
azules,
cette couleur avait une place prépondérante. On
pourrait
peut-être même, à l'instar du rose,
parler de bleu
mexicain.
Juan
Frutos
— C'est le bleu de l'albañil, du
travail mal fait ; c'est l'outil du maçon. Au
Mexique, si on dit albañil,
c'est très péjoratif. En 1989, quand on m'avait
invité à exposer au Mexique lors d'une rencontre
d'artistes mexicains expatriés, quelqu'un m'a dit que je
faisais
du travail d'albañil. Pour moi,
c'était un beau compliment. Un albañil
n'utilise
que du bleu, il te peint tout en bleu, même les
chiottes … Ça veut dire que tu ne sais
pas faire
autre chose que du bleu. Je suis amoureux du bleu, je ne sais pas
pourquoi.
Mais moi
qui suis né dans le super urbain — je suis un rat
des villes de Mexico — j'ai découvert la nature
quand je
suis devenu adulte. Ici en Guadeloupe le Bleu s'impose, la mer est
là, le ciel … Bien sûr,
j'avais les
références de l'Ecole de Nice. Klein, c'est le
même
équivalent, dans un autre registre, que Beuys, il nous a
laissé la ligne, le fil d'Ariane.
☐
Discussion entre amis,
p. 88 |
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mise-à-jour : 8
octobre 2007 |
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