Paul
Gauguin vu par les photographes / Georges Beaute ;
préface
de Paul-René Gauguin. - Lausanne : Edita, 1988. -
127 p. : ill. ; 30 cm. - (Archives
photographiques).
ISBN
2-88001-240-6
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En
suivant les
grandes dates de la vie de Paul Gauguin, l'ouvrage juxtapose, des
photographies d'époque et un texte qui emprunte largement
aux écrits et
aux lettres du peintre. L'ensemble manque de rigueur, quant au choix
des illustrations, quant au texte et quant à l'effet
d'écho entre ces
deux volets.
L'ouvrage
mérite pourtant l'attention ; il est en effet
préfacé par Paul-René
Gauguin, l'un des petits-fils du peintre. On y discerne la tentative de
porter un regard dépassionné sur une aventure
qui, en deçà de son
rayonnement universel, a profondément marqué la
sphère familiale — et
ce, bien que Paul-René n'ait jamais rencontré son
grand-père.
Ce
pourrait être un témoignage de circonstance, mais
la personnalité de
Paul-René Gauguin confère à ces
brèves pages une portée qui dépasse
l'anecdote.
❙ | Fils
de Pola Gauguin, Paul-René est né à Copenhague en
1911. Il est connu comme peintre, graveur, illustrateur et sculpteur,
comme décorateur de théâtre et comme traducteur :
il a traduit en norvégien le roman d'Hemingway For whom the bell tolls — Klokkene ringer for deg (1946) — et, surtout, pour la première fois dans cette même langue, le roman de Stendhal — Le rouge et le noir — Rødt og sort (1974). | ❙ | Walter
Benjamin a rencontré Paul-René Gauguin à Ibiza en
1933. Dans une lettre à son amie Gretel Karplus, il esquisse un
rapide portrait : “ J'étais sur le point de
partir pour une marche solitaire au clair de lune vers le sommet de
l'île, l'Atalaya de San José, quand je tombai sur un ami
de passage à la maison, un gars de Scandinavie qui ne se montre
que rarement dans les endroits où il y a des étrangers et
habite un village perdu dans la montagne. C'est du reste le petit-fils
du peintre Paul Gauguin et il s'appelle exactement comme son
grand-père. Le lendemain, je fis plus ample connaissance avec
cette figure tout aussi fascinante que son village de montagne
où il est l'unique étranger. (…) Mon compagnon
était l'homme rêvé pour une région comme
celle-là. Tout aussi peu civilisé, tout aussi
cultivé. (…) Il n'y a personne que j'aurais cru aussi
spontanément s'il m'avait expliqué qu'il luttait contre
une influence qui lui viendrait des tableaux de Gauguin. Chez ce
garçon, je pouvais comprendre exactement ce dont il
parlait. ” — San Antonio (Ibiza), vers le 10 juin 1933. |
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EXTRAIT |
L'échec
dans le domaine familial l'aide sans doute par contrecoup à
se
libérer d'un monde où il n'a rien à
faire,
— même s'il eût
été bien capable
de s'y adapter par ses qualités d'intelligence et
d'énergie. Mais il ne faut pas oublier non plus que ces
facultés, il les apporte à cette autre
tâche qu'il
avait à accomplir et dont la réalisation ne se
conçoit pas sans ces qualités. Il ne deviendra
réellement lui-même que lorsqu'il aura
largué ses
amarres, malgré que cette solution de continuité
dans sa
vie soit plus apparente que réelle : sa route
était
tout aussi probablement indiquée déjà
dès
son enfance, par son héritage et ses
antécédents.
Et c'est son sort voulu et accepté, malgré toutes
les
misères dont il l'accable.
Si
la personnalité de Paul Gauguin nous paraît plus
vraie
maintenant à la lumière des documents et des
recherches,
dépouillée de quelques oripeaux d'une
légende
à bon marché — et
même d'une
légende qu'il mit quelque soin à
échafauder lui
même (…) — ce paysage
où se trouve
Gauguin ne perd rien de sa grandeur. Et le drame de l'homme dans ce
paysage de sa création n'en devient pas moins
émouvant
— au contraire. (…)
Il
restera toujours la part de mystère : cette
persévérance à voie unique qui semble
prescrire un
destin inévitable, cette volonté et cette
honnêteté foncière envers les exigences
de
l'œuvre qui est la marque du génie. Parlons moins
du
martyre, et moins de cette auréole dont il aimait parfois
s'affubler — elle appartient à
l'inventaire de son
époque — et insistons plus sur cette
volonté
consciente qui devait le conduire à son terme. Il y a
insisté lui-même, et il ne se doutait pas de la
valeur de
la tâche.
☐ Paul-René Gauguin, Préface, p. 9 |
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- Walter
Benjamin, « Rastelli
raconte ... et autres récits »,
Paris : Seuil (Points, P13), 1995
- Gretel
(Karplus) Adorno et Walter Benjamin, « Correspondance
(1930-1940) », Paris : Gallimard (Le Promeneur), 2007
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mise-à-jour : 15
octobre 2014 |
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