Ho Anh Thai

L'île aux femmes

L'Aube - L'Aube poche, 49

La Tour d'Aigues, 2000
bibliothèque insulaire
   
des femmes et des îles

parutions 2000

L'île aux femmes / Ho Anh Thai ; trad. du vietnamien par Janine Gillon et Phan The Hong ; préf. de Janine Gillon. - La Tour d'Aigues : L'Aube, 2000. - 138 p. ; 17 cm. - (L'Aube poche, 49).
ISBN 2-87678-562-5
NOTE DE L'ÉDITEUR : Une île dans l'archipel de la baie de Ha-Long — la huitième merveille du monde (…). Mais une île habitée par la souffrance de femmes isolées dans une ferme d'État, loin de tout, loin des hommes, loin de l'amour.

Quelques aventures de passage seront sévèrement sanctionnées, et seule la force de l'amitié sauvera du désespoir ceux qui tentent l'impossible rencontre du désir, de l'art et de la beauté. Un roman d'amour dans un cadre époustouflant, qui nous emporte au cœur des espérances et des contradictions des jeunes Vietnamiens d'aujourd'hui.


En refermant ce livre, le lecteur a perdu l'innocence ; et c'est avec un regard troublé qu'il pensera désormais à la merveilleuse baie de Ha-Long
.
       
❙ Ho Anh Thai est né à Hanoi en 1960. Traduit ici pour la première fois en français, il a gagné de prestigieux prix littéraires au Viêt-nam.
JANINE GILLON : […]

Ce livre est un livre militant et c'est ainsi qu'il faut le lire et en accepter les éventuelles faiblesses qui font sa force : c'est pour ébranler l'opinion (ou pour exprimer un courant sans doute très fort à l'époque) mais aussi pour amener le législateur à modifier une loi qu'il jugeait inique, que Ho Anh Thai a choisi la fiction (avait-il d'ailleurs d'autres choix ?).

Il faut savoir en effet qu'au Viêt-nam, en 1986, les lois sur la famille — promulguées en 1959 — ne reconnaissaient pas les enfants nés hors mariage : non seulement une mère célibataire était rejetée comme une fille perdue par sa famille, et devait subir les blâmes de rigueur, mais de plus son enfant n'avait aucune existence juridique.

Le roman de Ho Anh Thai se situe donc dans le courant de la « Doi Moi » 1 pour dénoncer une législation devenue inadaptée. Or, c'est en 1987, c'est-à-dire moins d'un an après la parution de ce roman, que les lois de 1959 ont été amendées ; les nouvelles lois sur le mariage et la famille mettaient enfin un terme à des situations intolérables. Aussi ai-je été très émue lorsque Ho Anh Thai m'a dit avec un sourire plein de modestie : « J'aime à croire que mon livre a été pour quelque chose dans ces réformes ».

[…]

Préface, pp. 5-6
       
1.Les réformes du Doi Moi (la rénovation) correspondent à une restructuration en profondeur du système économique et de la société vietnamienne. — Cf. Xavier Oudin, « Le Doi Moi et l'évolution du travail au Vietnam », Tiers-Monde, 40/158, 1999
EXTRAIT Une atmosphère de fête régna soudain sur la ferme : un décret avait fait de l'île une réserve naturelle ! La ferme, désormais, relevait de la direction des parcs nationaux. Jours de fête, jours de trêve … Toutes les ouvrières du groupe n° 5, revêtues de leurs plus beaux habits, se rendirent au siège pour participer aux cérémonies d'inauguration du nouveau parc national. Le dernier soir, après la projection d'un film, on alluma des torches pour les femmes du groupe n° 5, qui repartirent vers Viet Hoa.

Elles comprirent alors combien était cruelle et injuste cette vie à l'écart du monde, en pleine jungle, et elles se mirent à pleurer dans les bras les unes des autres : « Forêt réservée », « Accès interdit ». Ces mots, soudain, pour ces femmes, sonnèrent comme un glas. Désormais donc, il était « interdit » à quiconque de rôder dans la forêt pour chercher du bois ou pour chasser. Accès « interdit » ! jamais encore elles n'avaient ressenti aussi durement leur isolement et le poids de tous ces « interdits » sur leurs épaules.

Certes, elles se sentaient déjà coupées du monde et « interdites » d'accès avant le décret, mais dorénavant, avec ce nouveau titre pour l'île, elles avaient l'impression d'être prisonnières d'une invisible geôle, d'être cloîtrées comme des nonnes au fond d'un couvent.

Et cela dura ainsi toute une année. Jusqu'à ce jour mémorable où Luyen revint du siège avec une nouvelle incroyable, une nouvelle qui allait faire sensation dans le petit monde du groupe n° 5. Ce matin-là, quelques femmes étaient allées à la ferme avec Cuong, le magasinier, pour y chercher du matériel et des bleus de travail. Elles avaient profité de l'occasion pour se rendre jusqu'au bourg, afin d'y acheter des crabes et des crevettes, histoire d'améliorer pour une fois leur ordinaire, toujours si frugal et si monotone. Luyen était allée voir une amie à la société d'import-export et c'est là qu'elle avait appris la fameuse nouvelle, qui maintenant se répandait comme une traînée de poudre.
       — Écoutez ça : dans la vallée dans l'îlot de Bo Vang, il y a un nouveau venu. Il arrive de Hanoï. Il paraît qu'il est vraiment beau.

pp. 17-18
COMPLÉMENT BIBLIOGRAPHIQUE
  • « L'île aux femmes », La Tour d'Aigues : L'Aube (Regards croisés), 1997

mise-à-jour : 7 mai 2017
Ho Anh Thai : L'île aux femmes
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