Grand hôtel
du Pacifique / François-Olivier Rousseau. - Monaco :
Éd. du Rocher, 2003. - 176 p. ; 20 cm.
- (La Fantaisie du voyageur).
ISBN 2-268-04774-1
|
NOTE DE L'ÉDITEUR :
Quoi de commun entre la Callas, le roi de Tonga, un vieux cinéma
athénien et les mines d'opales australiennes ? Rien, me
direz-vous. Réponse fausse, et en tout cas par trop
hâtive, qui dénote la méconnaissance des
méandres aux multiples et insoupçonnées ressources
de François-Olivier Rousseau et de sa théorie de la vie
comme une suite de rendez-vous manqués. Fermement pris en main
par l'auteur, le lecteur, chemin faisant, croisera également
Bernanos, Somerset Maugham ainsi que des starlettes oubliées
depuis des lustres, sauf des collectionneurs assidus de la
défunte revue Cinémonde. À la fois profond et
caustique, personnel et universel, familier et exotique, cet ouvrage
sera pour le lecteur un compagnon fidèle propice à toutes
les évasions.
|
Voyageur atrabilaire, François-Olivier
Rousseau ne s'attarde pas en Nouvelle-Zélande : « la
théorie d'un univers fini impressionnait jadis ma jeune
imagination. Je me représentais cette finitude sous la
forme d'un mur et je me demandais ce qu'il y avait derrière
le mur. Aujourd'hui, je répondrais sans hésitation :
quelque chose comme la Nouvelle-Zélande » ;
en escale à Port-Vila (Vanuatu) il surprend l'envers
d'un exotisme taillé sur mesure à l'intention des
hordes touristiques et suggère un parallèle avec
les « coulisses de Mogador » ;
à Tonga, où l'on ne devrait vivre que pour « l'attrait
des joies oubliées du bon sauvage », les
résidents occidentaux qu'il approche sont jugés
sans indulgence : « s'ils sont venus pour l'innocence
et les joies, ils n'ont trouvé que l'avachissement et
l'alcool ».
Pourtant, cette longue errance
d'un voyageur qui veut se croire revenu de tout ménage,
à l'occasion, découvertes et rencontres — comme à Suva où l'aborde un vieux Canaque avec
qui il court les friperies locales en quête d'une Bula
shirt. À l'heure de quitter l'île, le misanthrope
note que ce compagnon d'un instant « avait acquis
une place définitive dans mes pensées ».
Ailleurs, des failles d'un emploi
du temps incertain surgissent des interrogations pressantes ou,
non moins insistants, des souvenirs de lecture : Joyce et
l'Irlande — Error-land —, Jean
Reverzy, Pierre Benoit, ou Katherine Mansfield malmenée
par Virginia Woolf. Achevant son voyage, François-Olivier
Rousseau tente de trouver une chambre au « Grand Pacific
Hotel » de Kuala Lumpur, mais l'établissement
est complet ... dernier échec apparent d'un parcours
où s'exprime, avec véhémence parfois, le
ressentiment vis-à-vis d'un monde dont les escales insulaires
n'ont pas réussi à faire oublier l'étroitesse.
|
EXTRAIT |
J'avais voulu partir le plus
loin possible, dans l'espoir d'en finir avec ces commotions intermittentes
que mettent, dans la vie, les voyages. J'ai suspendu mon geste,
je me suis repris et je suis revenu sur mes pas, par le même
chemin. Je n'ai pas voulu faire le tour de la terre en me disant
que l'illusion pourrait m'être encore utile. Je n'ai pas
trouvé le dépaysement ni l'évasion ni l'exotisme
qui sont des notions d'opérette. Si l'on est touché,
d'aventure, par la découverte de panoramas inconnus, ce
n'est pas parce qu'ils sont loin, mais qu'ils rendent l'écho
de quelque chose de très proche et d'insaisissable à
la fois.
Au fil de la plume, mon propos
en a croisé un autre qui l'accompagne et le complète.
Ma réminiscence des ailleurs lointains en est insidieusement
dédiée à cet autre ailleurs, inaccessible,
qu'est le passé.
☐ pp. 176-177
|
|
|
mise-à-jour : 12 septembre 2005 |
| |
|