Le
paradis tranquille des petites îles / Pierre
Cressard ;
préface de A. Moreux ; illustrations de Georges
Bourges. -
Rennes : Imprimerie bretonne, 1951. -
157 p. :
ill. ; 23 cm.
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« Il
y a des choses, comme dit à peu près un
personnage de
Conrad, … qu'on ne trouve pas dans les
livres »
et qu'on ne peut y enclore : la mer, le vent, la
lumière et
ce charme préservé, un peu farouche et toujours
secret
des petites îles. |
L'Ile-auxMoines
et l'île d'Arz, Houat et Hoedic, Belle-Ile, Groix, les
Glénan, Sein, Molène, Ouessant, l'île
Callot,
Batz, les Sept-Iles, Bréhat, les îles Chausey et
Serk
— l'audience des reportages de Pierre Cressard, parus en 1948
dans le quotidien Ouest-France, a poussé à la
réalisation d'un livre. La première
édition (1951)
connut un succès suffisant pour justifier une seconde
édition (1952), augmentée d'un regard sur les
îles
plus méridionales du golfe de Gascogne : Dumet,
Noirmoutier, Yeu, Ré, Oléron, Aix et
l'île Madame.
Athanase Moreux 1 exprime, dans sa préface, les qualités qu'il
trouve au
recueil : “ Ce que l'auteur a voulu, c'est
faire aimer
nos îles en révélant au touriste de
passage le
charme secret, la poésie latente qu'elles renferment
(…),
il nous les montre telles qu'il les a vues (…), telles enfin
qu'il faut les voir, précieux joyaux dont les
beautés
naturelles n'ont pas encore été
altérées
par l'urbanisme envahissant qui commence à
déshonorer nos
côtes … Hélas ! pour
combien de
temps ? ” (pp. 7-8).
De
fait, le reportage est éclairant et riche d'informations
souvent
pertinentes ; les choses vues n'y manquent pas. Mais il apparaît — avec le recul du
temps ? — que le propos de l'auteur porte au-delà du
simple témoignage sur les îles bretonnes et ceux
qui y
vivent. Dans la perspective ouverte par le titre, se devine le mirage
d'une échappée aux contraintes d'une
société qui s'emballe ; c'est ce
qu'exprime
ouvertement le préfacier : “ profitez de la
belle saison pour visiter nos îles bretonnes, lieux
d'élection, paradis tranquilles, hâvres de paix
où
le moins imaginatif des hommes souhaiterait de finir ses jours loin de
la foule, du bruit et de l'agitation des villes ”
(p. 9).
1. |
Ancien
rédacteur en chef d'Ouest-Eclair (l'ancêtre
d'Ouest-France), Athanase Moreux avait pris sa retraite sur
l'île
de Bréhat. |
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EXTRAITS |
Etait-ce parce qu'une légende raconte qu'une
vieille
fée y vécut, qui attirait les plus solides et les
plus
entreprenants marins pour en faire ses amants d'une nuit, avant de les
changer en poisson et de les mettre au vivier, en réserve
pour
le menu du prochain festin de noces, mais les Glénans
n'étaient plus qu'un paradis secret à peu
près
désert et délaissé, en dehors du
passage rapide de
quelques touristes d'été.
Mais voici que
des jeunes, à la fois épris de la mer, amateurs
de sports
et de pleine nature et pour avoir été
— les
fondateurs du moins — des volontaires de la
Libération, soucieux de ménager des contacts
utiles, ont
décidé d'établir sur Drennec, une des
neuf
îles de l'archipel, un centre nautique
d'entraînement
à la navigation à voile.
☐ p. 65
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Molène est une des rares îles bretonnes
qui
bénéficie des largesses de la fée
électricité, grâce à une
petite centrale que
dirige une femme, car ici les hommes ne veulent guère
apprendre
d'autre métier que celui de pêcheur. Depuis 1938,
la
claivoyance des édiles molénais a
donné à
Molène l'avantage sur Ouessant d'être
électrifié, ce qui fait un peu enrager les
Ouessantins,
au grand plaisir, sans méchanceté, des
Molénais.
Grâce à leur centrale et à
l'eau de leur
citerne, les Molénais, gens heureux et sans histoire,
continueront à mener une vie austère mais
agréable
sur leur kilomètre carré de paradis secret au
milieu de
l'Atlantique.
☐ p. 91
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Ceinturée par des petits
îlots nommés :
l'île aux Dames, l'île Verte, l'île
Noire, Ricart,
Beg lem qui servent de perchoir aux oiseaux de mer, Callot,
île
sans l'être, point marquée sur les cartes,
à qui
les guides ne consacrent que quelques lignes, qu'aucun poète
n'aura chantée, a belle allure à marée
haute dans
le soleil couchant : “ Elle flotte
à fleur
d'eau, a-t-on écrit, sur ses assises rouillées,
grumeleuses et déchiquetées, comme un vieux
crocodile
digérant ”.
Qu'il plaise à la mer qui, comme un rapace
insatiable, ne
cesse de la miner, de la ronger, de la grignoter, oui, qu'il lui plaise
de nous la conserver longtemps encore …
☐ p. 110
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- « Le
paradis tranquille des petites îles de l'Atlantique et de la
Manche » (nouv. éd. augmentée),
Rennes : Ed.
Ouest-France, 1952
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mise-à-jour : 27
janvier 2012 |
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