Vénus
Erotica / Anaïs Nin ; traduit de
l'américain par
Béatrice Commengé. - Paris : Le Livre de
poche,
1981. - 377 p. ; 17 cm. - (Le Livre de
poche, 5441).
ISBN
2-253-02521-6
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En
1940, Anaïs Nin (1903-1977) accepte d'écrire pour
un
collectionneur une
série de courts récits érotiques
— sans
analyse ni philosophie, dépouillés
de toute poésie ;
le client n'a qu'une exigence :
« concentrez-vous sur le sexe ».
Or si le recueil
publié un demi-siècle plus tard retient
l'attention c'est
parce que la volonté du mystérieux collectionneur
a
été délibérément
transgressée :
« c'était notre propre
aphrodisiaque, la poésie » (Préface,
p. 11).
En
écrivant, Anaïs Nin fait feu de tout
bois :
inventions, expériences vécues,
rêvées ou
fantasmées, souvenirs de lecture (du Kama-sutra
à Krafft-Ebing). Dans
« Majorque », le
cadre est familier à l'auteur qui a
séjourné
à Deià, « près du
monastère
où George Sand et Chopin avaient
séjourné » (p. 57).
Le récit
propose une variation sur les tensions entre insulaires et vacanciers
— travailleurs et oisifs, puritains et
libertins ;
pourtant l'écart des uns aux autres est, en partie au moins, affaire de circonstances
comme pourrait le suggérer la chute.
« Sirocco »,
autre récit érotique d'Anaïs Nin
— repris
dans « Les petits oiseaux
(Erotica II) » —,
évoque à
nouveau Deià ; c'est une histoire
rapportée :
sous l'effet du sirocco, « l'esprit devient un
tourbillon » qui pousse aux confidences une
étrangère en villégiature dans
l'île.
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EXTRAIT |
Les
femmes de Majorque étaient inaccessibles, puritaines et
très pieuses. Elles ne se baignaient qu'en maillot
à long
jupon et bas noirs comme on en portait il y a des années. La
plupart ne se baignaient pas du tout et laissaient ce passe-temps aux
Européennes sans pudeur qui passaient leur
été sur
l'île. Les pêcheurs aussi condamnaient les maillots
de bain
à la mode et le comportement indécent des
Européennes. Pour eux, les Européens
étaient des
hommes qui ne songeaient qu'à se mettre nus et à
s'allonger au soleil comme des païens. Ils
désapprouvaient
également les bains de minuit importés par les
Américains.
Quelques années plus
tôt, la fille de dix-huit ans d'un pêcheur du
village se
promenait au bord de l'eau, sautant de rocher en rocher, sa robe
blanche collant à son corps. Tout en marchant, perdue dans
ses
rêves et dans le spectacle des effets de la lune sur la mer
et
des petites vagues qui venaient lui lécher les pieds, elle
arriva à une crique cachée où elle
aperçut
quelqu'un dans l'eau. Elle ne pouvait voir que la tête, et
parfois un bras. Le nageur était très loin du
bord. Alors
elle entendit une voix douce qui s'adressait à
elle :
« Vient nager. C'est
merveilleux », en espagnol
avec un accent étranger. « Hello !
Maria », disait la voix. On la connaissait donc. Ce
devait
être l'une des Américaines qui
s'étaient
baignées ici pendant la journée.
Elle
répondit :
« Qui
êtes-vous ?
— Je
suis Evelyn, dit la voix. Viens nager avec
moi ! »
C'était
très tentant.
☐
pp. 57-58 |
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- « Delta
of Venus : Erotica », New York :
Harcourt Brace Jovanovich, 1977
- « Vénus
Erotica » Paris : Stock, 1978
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- « Les
petits oiseaux (Erotica II) »,
Paris : Stock, 1980
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mise-à-jour : 25
mai 2015 |
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