La fin de
l'exotisme : essais d'anthropologie critique / Alban Bensa. -
Toulouse : Anacharsis, 2006. - 368 p. ;
20 cm.
ISBN 2-914777-24-8
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NOTE
DE L'ÉDITEUR : Les essais
rassemblés dans cet ouvrage balisent et condensent une
vingtaine d'années d'enquêtes ethnologiques, de
réflexions et de lectures au cours desquelles Alban Bensa,
spécialiste du monde kanak, a élargi
progressivement son champ d'investigation pour interroger les
fondements et les pratiques de l'anthropologie. Fort d'une
expérience à la fois scientifique et politique
très singulière, il a
élaboré une pensée
théorique originale, dont on pourra désormais,
pour la première fois, apprécier la
portée dans ce recueil de textes remodelés, mis
à jour, et enrichis d'essais inédits.
L'anthropologie traditionnelle
postule l'existence de communautés radicalement
différentes (autrefois
« primitives », jadis
« sauvages », et aujourd'hui
« premières ») et
subjuguées par une structure préexistante (voire
immémoriale), un postulat qui rendrait à soi seul
l'enquête ethnologique et la réflexion
anthropologique possibles. Alban Bensa teste la pertinence de cet
axiome en interrogeant tour à tour les grandes
thématiques du discours anthropologique autour de quelques
notions essentielles. Adoptant une position critique, sinon parfois
provocante, il s'interroge sur le contexte de la construction de
l'objet anthropologique, aussi bien que sur ce que rend possible une
interprétation circonstanciée, et non plus a
priori, des mythes et des récits,
« matière
première », s'il en est, du travail
ethnologique. De même, les usages du temps sont
explorés non seulement par la mise en question de
l'idée préconçue du
« temps des autres », mais aussi
par une réflexion approfondie sur les pratiques et principes
de la muséographie contemporaine —
réflexion encore d'actualité si l'on songe au
débat autour de l'ouverture prochaine du Musée
des Arts Premiers. Il en va de même dans ses
interrogations sur la question de l'individu et de sa place en
société, de ses sentiments, goûts et
envies, que l'on réduit trop souvent encore à une
nécessité
« traditionnelle » qui
commanderait souverainement aux modalités de son existence.
Ces mises en perspectives sont
menées jusqu'à leur terme dans une
série d'essais sur les pratiques, changeantes et diverses,
de l'ethnologie, dont Alban Bensa a pu expérimenter les
implications, depuis sa participation, avec l'architecte Renzo Piano,
à la conception du Centre Jean-Marie Tjibaou
à Nouméa, jusqu'à ses prises de
positions résolues pour l'indépendance de la
Nouvelle-Calédonie aux côté des Kanaks.
En accusant ainsi le trait, au cours de son parcours de recherche, de
la question de la contextualisation, de l'énociation, du
devenir et du singulier dans l'anthropologie, Alban Bensa propose un
décalement de la notion d'altérité,
une approche novatrice de la différence qui le conduit
à concevoir véritablement, loin de la
fossilisation des cultures, la fin de l'exotisme d'antan.
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ANDRÉ-MARCEL
D'ANS :
[...]
Ce n'est pas en
imprécateur isolé qu'Alban Bensa
s'élève contre “ [la]
réticence ancestrale à prendre en
considération la seule réalité (...),
moyennant le recours à un principe extérieur
à la réalité
elle-même ” déplorée
par Clément Rosset. Aux normativistes qui ne peuvent
raisonner le social sans recourir à des
régulations venues de l'extérieur, Bensa oppose
d'entrée l'irrévocable sentence de Jean Bazin,
son regretté compère :
“ Une règle n'est cause de
rien ”. Nombreux sont au surplus les auteurs sous
l'autorité de qui sa démarche se range :
Wittgenstein en général ; Bourdieu
aussi, très fréquemment
cité ; et surtout Gregory Bateson, ce pionnier de
l'anthropologie américaine qui, aux antipodes d'un Durkheim
obsédé par la volonté de
définir la Société en tant qu'instance
souveraine régissant les actions des hommes,
“ loin de réduire l'individu à
n'être que l'exécutant obéissant de
l'ordre social ”, s'est inlassablement
attelé à reconnaître en lui
“ un acteur riche d'expressions affectives et
intellectuelles ”. À ce titre, Bateson
apparaît en effet comme étant le meilleur parrain
possible dont puisse se réclamer le projet d'Alban Bensa de
ramener l'anthropologie dans le champ du politique, s'attachant
à saisir les faits comme des actes, et à
définir le social en tant que champ d'interactions
où sans cesse s'élaborent des significations
nullement préconçues, mais toujours historiques.
☐ La
Quinzaine littéraire, 926, 1-15
juillet 2006
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SOMMAIRE |
Avant-Propos
Première
partie : Retour au
réel
- Chapitre
I : L'anthropologie à l'épreuve de
l'histoire
- Chapitre
II : Actes de paroles. Dialogue anthropologique
- Chapitre
III : La raison graphique
- Chapitre
IV : De la culture et du mythe comme artefacts
Deuxième
partie : Pratiques et
fabriques du temps
- Chapitre
V : La fin des mondes ou le cénotaphe des cultures
- Chapitre
VI : Images et usages su temps
- Chapitre
VII : Les sciences sociales face à
l'évènement
- Chapitre
VIII : Paroles et mémoires. À propos du Centre
Tjibaou de Nouméa
Troisième
partie : Logiques de
l'acteur
- Chapitre
IX : Mauss dans la tradition durkheimienne, de l'individu
à la personne
- Chapitre
X : Sociologie et histoire des sentiments
- Chapitre
XI : Individu, structure, immanence. Grégory
Bateson et l'École française de sociologie
- Chapitre
XII : Les individus, les musées et l'histoire
Quatrième
partie : Pratiques
ethnologiques
- Chapitre
XIII : De la relation ethnographique à la recherche
de la juste distance
- Chapitres
XIV : Une ethnologie mimétique
- Chapitre
XV : L'ethnologue et l'architecte
Épilogue
Ouvrages
cités, Sources
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- « La
fin de l'exotisme : essais d'anthropologie
critique », Toulouse : Anacharsis, 2016
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- Alban Bensa, « Nouvelle-Calédonie,
vers l'émancipation »,
Paris : Gallimard (Découvertes), 1998
- Alban Bensa
et Jean-Claude Rivierre (éd.), « Le Pacifique, un monde
épars », Paris :
L'Harmattan, 1999
- Alban Bensa
et Isabelle Leblic (dir.), « En pays kanak »,
Paris : Maison des Sciences de l'Homme, 2000
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mise-à-jour : 19
avril 2017 |
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