Lettres
d'Islande / W. H. Auden et Louis MacNeice ; traduit de
l'anglais
par Béatrice Dunner. - Monaco : Éd. du
Rocher, 2006.
- 304 p.-[48] p. de pl. : carte ;
22 cm. -
(Anatolia).
ISBN
2-268-05830-1
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Les
îles sont des lieux à part d'où
l'Europe est absente. … Vraiment ? Le
monde est toujours là, le présent, le mensonge,
et l'étroite passerelle au dessus du torrent,
[…]
☐ Ch. II,
En route pour l'Islande, Lettre
à M. Christopher Isherwood, p. 24 |
Entrepris “ dans un esprit
de vacances
insouciantes ”, le
voyage en Islande de W. H. Auden et Louis MacNeice explore les
voies
permettant à deux poètes de déborder
la forme trop
convenue du récit de voyage. Le recueil donne à
entendre
alternativement ou simultanément les voix de chacun des deux
poètes qui, par ailleurs, ont multiplié tours et
détours en vue de brouiller points de vue et perspectives
— figurent au sommaire une longue Lettre à Lord Byron
en vers “ plutôt
libres ” et en quatre
parties, des lettres à des proches (Christopher Isherwood
entre
autres pour Auden), les recensions de récits
antérieurs,
tranches d'histoire islandaise et autres “ morceaux
choisis ”, une facétieuse lettre de Hetty à Nancy
où la farce et l'autodérision servent un regard
incisif (cf. extraits ci-dessous).
Les auteurs ne
prétendent pas livrer un document “ sur l'Islande ”, au mieux un
témoignage “ sur le voyage vers l'Islande ”.
Outre un regard
amical sur l'île, ce voyage permet un
retrait, une
mise à distance de l'Angleterre et, dans un sens plus large,
de
l'Europe dont la voix ne cesse pourtant de se faire entendre au
cœur de l'Églogue
islandaise. C'était
à l'été 1936, comment ignorer la
sombre
rumeur : “ le chômage
omniprésent, la
montée en puissance d'Hitler, la guerre mondiale de jour en
jour
plus inévitable — dont d'ailleurs le prologue, la
guerre
civile espagnole, a commencé cet
été-là,
pendant notre
séjour ” 1.
1. |
W. H. Auden, Avant-propos (1965). |
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EXTRAITS |
Après
le petit déjeuner, j'ai remonté la
Skammá sur une
centaine de mètres, et figures-toi que je suis
tombée sur
un rocher orné d'une faucille et d'un marteau peints en
rouge … j'avais l'impression d'être
Robinson
Crusoë quand il découvre sur le sable l'empreinte
d'un pied
humain.
☐ Hetty à Nancy, p.
216 |
Après
une heure de marche, nous sommes tombés sur quelque chose
d'inattendu — une barrière ! La
première que
nous voyions depuis Gullfoss ! Certes, c'était une
barrière bien modeste, qui fermait une clôture
quasi
inexistante. Mais enfin, c'en était bien une, et elle nous
parlait de civilisation.
☐ Hetty à Nancy,
p. 219 |
Maisie
et moi avons eu une grande conversation ce matin sur le sentiment
d'étrangeté que donne l'Islande. Nous sommes
parvenues
à la conclusion que, les paysages mis à part
— il
est impossible de les imaginer —, il n'y a que deux choses
véritablement bizarres dans ce pays :
premièrement les
noms, et, deuxièmement (j'en ai déjà
parlé), la nourriture. […] Cela dit, les gens
d'ici sont
dix fois moins étranges que les Irlandais, par exemple, ou
les
péquenots du Yorkshire. On ne les imaginerait jamais se
comportant comme des personnages de sagas, disant :
« Tu as trop parlé »
et abattant leur
interlocuteur d'un coup de pistolet. C'est décevant,
peut-être, mais si on veut voir des comportements un peu
extravagants, point n'est besoin de voyager …
tiens, toi,
par exemple, à Cambridge, tu es bien placée pour
ça.
☐ Hetty à Nancy,
pp. 223-224 |
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- «
Letters from Iceland », London : Faber &
Faber, 1937 ; New York : Random house, 1937
|
➝ Sara
Greaves,
« Harlequin’s Tailors : Letters from Iceland by
W. H. Auden and Louis MacNeice », Viatica, 3 | mars
2016 [en
ligne]
➝ Frédéric Regard,
« Sans bords : distance et
démocratie dans Letters
from Iceland de W.H. Auden et Louis
MacNeice », Études britanniques
contemporaines, 52 | 2017 [en ligne]
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mise-à-jour : 30
mars 2020 |
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