Au jardin d'Eden / Jean de
Marignolli ; traduit du latin, présenté
et annoté par Christine Gadrat. - Toulouse :
Anacharsis, 2009. - 93 p. : carte ;
20 cm.
ISBN 978-2-914777-53-7
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NOTE DE L'ÉDITEUR :
De retour d'une ambassade en Chine au milieu du XIVe siècle, le
franciscain Jean de Marignolli s'arrête à Ceylan. Il
découvre là le paradis terrestre. Bible en main, tel un
entomologiste, il observe la faune, la flore et l'humanité de ce
monde des origines.
Lorsqu'il revient en Europe, il se livre dans une Chronique
universelle que lui commande l'empereur germanique, à une
relecture de la Genèse dont il a pu expérimenter la
véracité ; le présent livre est extrait de
cette chronique. La “ vigne ” biblique devient
pour lui le bananier, les mœurs des hommes vivant encore aux
abords de la première demeure d'Adam lui paraissent
inchangées depuis des millénaires et l'histoire du
peuplement de la terre par les tribus originelles fait l'objet de
considérations archéologiques d'un nouveau style.
De
son passage au Jardin d'Eden, Marignolli rapporte le souvenir
enthousiaste d'avoir posé le pied dans le monde des merveilles
vivantes, d'avoir goûté les fruits du paradis, et, tel un
Darwin aux Galapagos, sa conception du monde en fut changée. ❙ | Frère
franciscain du couvent de Santa Croce à Florence, Jean de
Marignolli [c. 1290-1358] est envoyé comme légat
auprès du grand khan du Cathay en 1338 par le pape
Benoît XII. Il est de retour à Avignon en 1353,
après être passé, à l'aller par Naples,
Constantinople, la mer Noire, l'Asie centrale, et au retour, par la
Chine du sud, l'Indonésie, l'Inde, Ceylan, Ormuz, Bagdad, Damas
et Jérusalem. Il rencontre alors l'empereur Charles IV de
Luxembourg, qui le prend comme chapelain à sa cour de Prague et
lui commande la rédaction d'une chronique. — Source : ARLIMA, Archives de littérature du Moyen Âge. |
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CHRISTINE GADRAT :
Plus qu'un voyage dans l'espace, c'est un voyage dans le temps [que
propose Jean de Marignolli], où les temps bibliques et
l'époque contemporaine se confondent : le voyageur a
traversé les quatre fleuves qui coulent du paradis, il a
mesuré la trace du pied d'Adam, il a pris un morceau de la tour
de Babel ; surtout, il a rencontré des hommes qui
descendent directement d'Adam et Ève, qui, comme eux, ne mangent
pas de viande et se vêtent de végétaux. Ce à
quoi Jean de Marignolli fut confronté lors de ses voyages, c'est
la beauté et l'actualité de la Création divine. Il
s'est promené en Orient la Bible à la main, ouverte sur
le livre de la Genèse, et il l'a lue en y reconnaissant les
paysages de l'Orient, ses ruisseaux, ses montagnes, ses arbres et leurs
fruits, et les hommes qui y vivent.
☐ Introduction, pp. 21-22
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EXTRAIT |
La veille de la fête de saint Georges, nous
subîmes une telle tempête que soixante fois ou plus, nous
fûmes engloutis par l'eau jusqu'aux profondeurs de la mer, en
réchappant uniquement grâce à un miracle divin,
tant nous vîmes de merveilles, comme la mer en feu, les dragons
cracheurs de feu volant et tuant les passagers des autres jonques dans
leur course. (…) En plein milieu de la tempête, nous
mîmes les voiles, nous confiant à la direction de Dieu et
nous préoccupant seulement de sauver nos âmes.
Mais
sous la conduite de la clémence divine, le jour de l'Invention
de la sainte Croix, nous nous trouvâmes perdus dans un port de
Ceylan, du nom de Pervily, en face du paradis. Y régnait
à la place du vrai roi, un tyran du nom de Coya Jaan, un
castré, un sarrasin très méchant, qui, en grande
partie, occupait le royaume en raison des immenses trésors qu'il
possédait. Il fit mine tout d'abord de nous recevoir avec
honneur, après quoi, sous couvert de procéder à
des échanges, il nous prit courtoisement soixante mille marcs
d'or, d'argent, de soie, de tissus brodés d'or, de pierres
précieuses, de perles, de camphre, de musc, de myrrhe et
d'épices que nous avaient donnés le grand khan et
d'autres princes, et les cadeaux envoyés au pape ; et nous
fûmes courtoisement retenus prisonniers pendant quatre mois.
☐ pp. 49-50
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Note sur la traduction |
La
chronique de Jean de Marignolli n'a, semble-t-il, pas connu un grand
succès à son époque. Seuls deux manuscrits nous la
conservent, dont un incomplet (l'un est conservé à Prague
(…), et l'autre à Venise (…). La présente traduction est basée sur l'édition de Joseph Emler (Kronika Janaz Marignoly, dans Fontes rerum Bohemicarum, t. III, 1882, p. 485-604), corrigée avec les variantes du second manuscrit (…). Ne
sont traduits que les chapitres de la chronique qui contiennent des
informations provenant de l'expérience en Orient de l'auteur.
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mise-à-jour : 7 avril 2021 |
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