Parle-moi un
peu de Cuba / Jesús Díaz ; trad. de l'espagnol
(Cuba) par Jean-Marie de Saint-Lu. - Paris :
Métailié, 1999. - 233 p. ; 22 cm. -
(Bibliothèque hispano-américaine).
ISBN 2-86424-317-2
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NOTE DE L'ÉDITEUR
: Martinez est prisonnier sur une terrasse à Miami, il faut
qu’il soit brûlé par le soleil, il doit avoir
l’air du « balsero » pour pouvoir rester aux
USA. Martinez vivait à La Havane, il était dentiste et
amoureux de sa femme, danseuse dans un cabaret ; un soir son ferry
a été détourné par deux dissidents vers
Miami, mais Martinez ne pouvait envisager de vivre loin de Cuba et loin
de sa femme. Il a été le seul passager à refuser
de rester aux Etats-Unis. Il y avait pourtant retrouvé son
frère, un cadre du Parti devenu clown dans les fêtes
enfantines. Son frère lui a offert une bicyclette et il est
reparti pour La Havane. Là, personne n’a compris
qu’il revienne, sa femme s’était installée
avec un voisin et il était suspect. Martinez,
désespéré, a alors organisé sa fuite
méthodiquement.
Dans une écriture sèche et dépouillée,
Jesús Díaz raconte l’exil et les contradictions
auxquelles sont confrontés les Cubains, dans l’île
et hors de l’île.
❙ Jesús Díaz
est né à La Havane en 1941 ; il est mort en 2002
après avoir vécu en exil depuis 1991, à Berlin
puis à Madrid où il a fondé la revue Encuentro.
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RAPHAËLLE RÉROLLE : Une phrase [de Jésus Díaz]
signalait avec humour [ses] obsessions dans La Peau et le
Masque [Métailié, 1997] : « Voilà
trente-cinq ans que la politique, comme la mer, entoure,
lèche et pénètre Cuba de toutes part ».
À moins d'écrire sur une autre région du
monde, il n'est guère possible d'échapper
à ce poison d'autant plus tenace qu'il
joue presqu'autant sur l'amour et sur une certaine forme de nostalgie
que sur la haine. Même lorsqu'on habite en Espagne, comme
c'est le cas de Jésus Díaz. Parti de La Havane
en 1991, après que l'un de ses essais sur Cuba
eut été violemment attaqué en haut lieu, le
romancier continue de nourrir ses livres au rude lait
maternel. La Havane, ses bruits, ses odeurs, son langage
aussi sont les éléments essentiels d'une œuvre
où le regret le dispute à l'humour.
Le livre tourne autour d'une question
lancinante, que l'auteur s'est sans doute posée autant de fois
que son personnage : Faut-il partir, quand on
est sûr de ne jamais guérir d'un pays
si poignant ?
☐ Le Monde des livres, 8 octobre 1999
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EXTRAIT |
« La
patrie ou la mort », murmura-t-il sans emphase, et cette
expression, qui naguère encore lui semblait si familière,
lui parut étrange et aussi incompréhensible qu'une
énigme. Quel rapport pouvait-il y avoir entre ces deux choses,
la patrie et la mort ? Putain, ça n'avait pas de sens. Et
pourtant, sur la photo, à Cuba, la mort était toujours
avec la patrie, la liberté ou le socialisme, comme si
c'était le premier prix d'une émission de
télévision, la femme spectaculaire qui n'amèneriat
dans son lit que les vainqueurs morts au combat.
Les gens comme lui étaient condamnés à
courir d'u côté à l'autre en se cognant la
tête pour voir si par hasard ils arrivaient à sortir du
labyrinthe. Sauf que lui, il s'était trompé quelque part
en chemin, et c'était pour cette raison qu'il devait subir cette
insolation sur une terrasse dont la seule issue donnait sur un radeau
au milieu de l'océan.
☐ pp. 161-162 (dans l'éd. de 2011) |
| COMPLÉMENT BIBLIOGRAPHIQUE | - « Dime algo sobre Cuba », Madrid : Espasa, 1998
- « Parle-moi un peu de Cuba », Paris : Métailié (Suite hispano-américaine), 2011
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mise-à-jour : 20 janvier 2012 |
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