PATRICK et EDOUARD REITMAN : Le grand romancier français […] ne connaissait pas le Pacifique. Mais il était familier des récits de voyage qui lui permirent de situer une de ses œuvres dans le Pacifique tropical. — Une société anonyme propose chaque année aux milliardaires une croisière dans le Pacifique sur une île flottante [Standard-Island] de 18 km de tour. Ainsi visitent-ils les Hawaii, les Marquises, les Tuamotu, Tahiti, qui, sous la reine Pomaré IV, offre à ses visiteurs de splendides réceptions.

☐ « Bibliographie de Tahiti et de la Polynésie française », n° 9505, p. 840

HENRI LAVONDÈS : (…)

L'idée même qui est à la base du roman, celle d'une île flottante capable de se déplacer à la surface de l'océan, renvoie à un motif bien attesté dans les littératures orales du Pacifique, celui de l'île mouvante (« Wandering Island »). (…) Je m'efforcerai de retracer les traits les plus caractéristiques de l'image des archipels polynésiens visités par l'île à hélice au cours de ses pérégrinations dans le Pacifique, telle que Jules Verne l'a établie à l'usage de ses lecteurs. Je tenterai aussi de rendre manifestes les singulières convergences qui apparaissent dans le traitement du motif de l'île mouvante et dans les thèmes qui lui sont associés dans deux domaines de l'univers littéraire aussi éloignés qu'il est possible de l'imaginer : un roman composé par un écrivain français du XIX^e siècle, épris de rationalité et chantre du progrès scientifique d'un côté, et de l'autre une nébuleuse de mythes engendrés selon les processus obscurs de la mythogénèse par des chaînes de narrateurs anonymes polynésiens.

(…)

→ « Jules Verne, les Polynésiens et le motif de l'île mouvante », Journal de la Société des Océanistes, 1999, 99/2, pp. 131-139 [en ligne]

FRANK LESTRINGANT : Les Voyages extraordinaires dessinent un Insulaire fabuleux, où abondent les îles creuses, les îles flottantes, les îles qui dérivent et qui volent, celles qui s'entrouvrent comme des ventres pour en engendrer d'autres, celles qui émergent et celles qui sombrent. Il y a l'île flottante (…) la ville flottante (…) l'île à hélice, Standard Island, tout à la fois Eden pour milliardaires et terre en réduction qui se déplace à travers l'océan pour jouir du meilleur climat, mais qui, divisée entre Bâbordais et Tribordais, achève de se disloquer dans un cyclone.

☐ « Le livre des îles : Atlas et récits insulaires (XVe-XVIIIe siècles) », p. 376

EXTRAIT

Standard-Island arrive en vue de Taïti dès l'aube du 17 octobre. L'île se présente par son littoral du nord. Pendant la nuit, on a relevé le phare de la pointe Vénus. La journée eût suffi à rallier la capitale Papeeté, située au nord-ouest, au-delà de la pointe. Mais le conseil des trente notables s'est réuni sous la présidence du gouverneur. Comme tout conseil bien équilibré, il est scindé en deux camps. Les uns, avec Jem Tankerdon, se sont prononcés pour l'ouest ; les autres, avec Nat Coverley, se sont prononcés pour l'est. Cyrus Bikerstaff, ayant voix prépondérante en cas de partage a décidé que l'on gagnera Papeeté en contournant l'île par le sud. Cette décision ne peut que satisfaire le quatuor, car elle lui permettra d'admirer dans toute sa beauté cette perle du Pacifique, la Nouvelle-Cythère de Bougainville. ☐ p. 196