Trésor
des livres de mer, de Christophe Colomb à Marin-Marie /
Michèle Polak et Alain Dugrand. - Paris : Hoëbeke,
2011. - 279 p. : ill. ; 32 cm. ISBN 978-2-84230-421-8
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Libraire
par goût autant que par tradition familiale, Jean Polak, le
père de Michèle, est l'auteur d'une Bibliographie maritime française
(1976) qui compte plus de 6 600 références et fait,
à juste titre, autorité bien au-delà des
frontières nationales. Après avoir apporté une
contribution décisive à un Supplément (1983) au travail de son père, Michèle Polak a pris la relève d'une librairie
qui ne cesse d'attirer bibliophiles et amateurs de littérature
maritime. Dans l'introduction au Trésor des livres de mer, Alain Dugrand donne la juste mesure de cette
passion exercée avec rigueur, discernement et enthousiasme.Fondé sur cette riche expérience, Trésor des livres de mer est
un florilège réunissant près d'une centaine
d'ouvrages maritimes exceptionnels, édités entre 1494
— Christophe Colomb — et 1957
— Marin-Marie ; on y trouve des
récits de navigateurs, de géographes ou de naturalistes,
des compilations — Ramusio (1563-1583) ou Hawkesworth (1773)
par exemple —, des
traités d'architecture navale ou d'hydrographie. L'ensemble est
présenté en suivant la chronologie des parutions et non
celle des voyages (la relation de tour du monde de Magellan par
Pigafetta est évoquée en 1801, date de la première
édition française complète).Chaque
ouvrage fait l'objet d'une notice descriptive
qui le situe dans l'histoire et en relève les principales
caractéristiques ; illustrations et extraits du texte
donnent à voir et à entendre la teneur de la rencontre
— stupeur, interrogation, fascination, mise à
distance, … Le déroulement chronologique met en
lumière l'évolution du regard porté sur les
“ découvertes ” et rencontres
ultramarines.
Au fil du temps, les expéditions se multiplient, l'inconnu se
fait plus rare, les contacts se recoupent et
s'enrichissent ; mais à l'évidence un écart
persiste entre ce qui s'est offert aux regards et ce qui est dit ou
montré (texte, illustrations) — signe d'une
altérité irréductible 1.De Christophe Colomb abordant les isles de la mer des Indes à la fin du XVe siècle au commandant Charcot navigant dans l'Antarctique à l'aube du XXe siècle, les îles occupent ici une place de premier plan. Le choc du divers
y est souvent ressenti avec une intensité qui avive le regard et
stimule la réflexion : il arrive que l'approche d'un de ces
microcosmes demeurés à l'écart des grands courants
d'échange soit l'occasion d'une rêverie ou d'une
méditation sur l'art de vivre en société dans le
cas des îles habitées, ou sur les interactions entre
l'homme et la nature dans le cas des îles désertes.
1. | De
nombreux récits, et les illustrations qui les accompagnent, ont
subi avant publication un travail de mise en forme qui,
délibérément ou non, accentue ou, au contraire,
tente d'atténuer cet effet d'altérité. |
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EXTRAIT |
(Îles
Malouines) Si la nature a refusé à cette contrée
les végétaux propres à la nourriture de
l'espèce humaine, elle l'a du moins dotée avec sorte de
luxe en graminées, qui offrent aux animaux du pâturage
abondant. Aussi, colons heureux de cette terre déserte, les
chevaux, les bœufs, les cochons et les lapins, déjà
répandus en tribus nombreuses, multiplient d'une manière
rapide au milieu de cette multitude d'oiseaux de différentes
espèces qui couvrent, pour ainsi dire, la surface du sol ;
de ces légions d'oies, de canards, d'huîtriers, de
cormorans, d'hirondelles, de bécassines, de vanneaux, qui
prennent leurs ébats sur le gazon des prairies, dans les
étangs ou sur les bords rocailleux d'une multitude de
criques ; de ces peuplades innombrables de manchots qui, tous les
soirs, du fond des habitations souterraines qu'ils se creusent sur les
îlots ou sur les grèves des anses abritées, font
retentir de leurs cris, parfaitement semblables au braiment des
ânes, les rives solitaires et les eaux silencieuses de la vaste
baie française. Il est triste de penser que la vie de tous ces
animaux s'écoulerait paisible et sans trouble, si l'homme,
armé contre tout ce qui respire, ne marquait de temps en temps
son passage par des incursions sanglantes.
Louis Isidore Duperrey, Voyage autour du monde exécuté par ordre du roi sur la corvette de Sa Majesté la Coquille pendant les années 1822, 1823, 1824 et 1825, Paris : Arthus Bertrand, 1826-1830 — extrait cité p. 175 |
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- Jean
Polak, « Bibliographie maritime française, depuis les
temps les plus reculés jusqu'à 1914 »,
Grenoble : Éditions des 4 Seigneurs, 1976
- Jean
et Michèle Polak, « Bibliographie maritime
française, depuis les temps les plus reculés jusqu'en
1914 : Supplément », Grenoble : Jean-Pierre
Debbane, 1983
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Librairie Polak
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mise-à-jour : 23 décembre 2011 |
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