L'usage
de l'île / Nathalie Bernardie-Tahir. - Paris :
Pétra,
2011. - 510 p.-XVI p. de pl. : ill.,
cartes ;
22 cm. - (Des îles).
ISBN
978-2-84743-035-6
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| … on
peut légitimement se demander,
face
à la débauche d'images et de textes qui la place
régulièrement sur le devant de la
scène :
pourquoi l'île ?
☐ Introduction, p. 8 |
Les
géographes, comme leurs lointains
prédécesseurs
(cosmographes, cartographes, …), ont toujours
porté un
vif intérêt aux îles et à la place
singulière
(p. 155) qu'elles occupent dans leur univers. Mais, depuis le
XIXe
siècle, cet engouement fait l'objet d'un questionnement qui
porte autant sur les îles, et leur éventuelle
spécificité, que sur les méthodologies
à
mettre en œuvre pour les décrire, les
étudier et
envisager leurs perspectives de développement. Ce
débat
reste ouvert, mais a le mérite d'avoir largement
diversifié le regard porté sur le monde
insulaire, tout
en contribuant au progrès de la discipline. La
première
partie de l'ouvrage rend compte de ces évolutions, des
enjeux
qu'elles révèlent et des acquis qu'elles ont
rendu
possibles.
Dans
une seconde partie, Nathalie Bernardie-Tahir
éclaire trois grands vecteurs de l'insertion des
îles dans
le cours général du système-monde
(p. 165) :- les
diasporas insulaires, leurs causes (démographiques,
économiques, politiques, …), les territoires
où
elles s'implantent, les réseaux qu'elles tissent et
l'évolution des relations qu'elles entretiennent avec leur
point
d'origine (évolution du lien culturel, transferts de
fonds, …) ;
- le
tourisme insulaire qui, s'il reste marginal dans l'économie
mondiale du tourisme (moins de 5 % en valeur), n'en constitue
pas
moins une source majeure de revenus pour de nombreuses îles,
au
point de constituer pour certaines le ressort principal de
véritables modèles de développement
— au
prix d'un risque significatif de disneylandisation
(p. 230) ;
- l'économie
avec la multiplication des zones franches (industrielles ou
commerciales) d'une part, des paradis fiscaux d'autre part ;
ces
choix, consentis ou imposés de l'extérieur,
constituent
une forme d'insertion dans l'économie mondialisée
qui
peut s'avérer profitable, mais s'établit souvent à la limite du monde
légal (p. 248), au point que certains analystes
ont évoqué la notion d'antimonde (Roger
Brunet, cité p. 249).
A
l'exception du tourisme qui n'a pu se développer
significativement dans les îles qu'avec la banalisation du
transport aérien, ces formes d'insertion des îles
dans le système-monde
ne font qu'adapter aux exigences de notre époque des
pratiques
anciennes où négoce, contrebande, piraterie,
traite
étaient parfois très étroitement
imbriqués,
souvent pour le plus grand profit de commanditaires
extérieurs
aux milieux insulaires concernés.
Alors que les
analyses précédentes ont
éclairé l'ancrage des îles dans le système-monde,
en leur contestant toute spécificité spatiale,
sociale ou
culturelle, la dernière partie de l'ouvrage interroge la
persistance d'un imaginaire qui renvoie
systématiquement à un lieu différent
(p. 301) : « on peut
même aller
jusqu'à dire que la force de l'image insulaire est
proportionnelle à celle du déni de
spécificité qu'offre la
réalité » (ibid.). Pour tenter
d'approcher
cette évidence fuyante, Nathalie Bernardie-Tahir examine,
notamment dans la littérature d'imagination
— où se conjuguent mythos et logos qui
traditionnellement s'opposent dans la pensée
géographique
(p. 342) —, des figures telles que l'île isolée
(p. 305), lieu privilégié des
robinsonnades, l'île
imaginaire (p. 328), l'île idéale
(p. 350) scène des grandes utopies ou l'île immobile
(p. 363) soustraite à l'emprise du temps. Ce
parcours
introduit une vigoureuse réflexion sur la construction
imaginaire de l'Ailleurs, lieu privilégié de la
rencontre
avec l'Autre.
Au terme de
l'exercice, l'auteur ne croit pas
pouvoir valider l'hypothèse d'une quelconque
spécificté insulaire
— îléiste ou insulariste —
et préfère désigner
« l'exemplarité du concept (…)
d'insularisation qui permet de lire et de comprendre, à
toutes
échelles, les réactions d'enfermement, de
différentiation ou de démarcation des groupes
sociaux et
des territoires » (p. 464). ❙ | Nathalie
Bernardie-Tahir est agrégée et professeur de
géographie à l'Université de Limoges.
Elle
étudie les différentes formes de la
mondialisation et de
la production identitaire dans les petits espaces insulaires. Elle
mène des recherches en Méditerranée
(Malte) et
dans l'océan indien (Zanzibar). |
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SOMMAIRE
(résumé) |
Ière Partie : L'île
et le géographe. Du terrain à l'objet
Terrains et catégories insulaires
- Un
terrain idéal(isé)
- Lieux
et catégories de la recherche sur les îles
L'île
dans la construction de la pensée géographique
française
- L'île
dans les épistémologies naturalistes en
géographie
- L'île
et la géographie nomothétique
- L'île
à l'heure des tournants
Conclusion : l'usage de l'île pour
enrichir la réflexion géographique |
2e Partie : L'île
et le monde. Un lieu de condensation de la mondialisation
Les îles de « la planète nomade
»
- Mondialisation
et diasporas insulaires
- Les
îles et le tourisme mondialisé
Les relais entre
monde et antimonde
- Mondes
et antimondes insulaires
- Antimonde
et insularité
Conclusion :
l'usage
de l'île pour lire et analyser la mondialisation |
3e Partie : L'île,
l'Ailleurs et l'Autre. Une allégorie de
l'altérité
L'île et l'Ailleurs
- L'île
isolée
- L'île
imaginaire
- L'île
idéale
- L'île
immobile
L'île
et l'Autre
- L'exotisme :
la construction de l'Autre insulaire
- Identifications
et différenciations insulaires
Conclusion :
l'usage
de l'île pour comprendre l'altérité |
Conclusion : De la
mondialisation de l'insularité à l'insularisation
du monde |
Bibliographie
Table des figures
Table des tableaux |
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- Nathalie
Bernardie, « Malte : parfum d'Europe,
souffle
d'Afrique », Talence : Centre de recherches
sur les
espaces tropicaux de l'Université Michel de Montaigne (Îles et archipels, 27), 1999
- Nathalie
Bernardie et François Taglioni (dir.),
« Les
dynamiques contemporaines des petits espaces insulaires : de
l'île-relais aux réseaux
insulaires »,
Paris : Karthala (Hommes
et sociétés),
2005
- Nathalie
Bernardie (dir.), « L'autre Zanzibar :
géographie d'une
contre-insularité »,
Paris : Karthala (Hommes
et sociétés),
Limoges : GEOLAB-Limoges, 2008
- Nathalie
Bernardie-Tahir et Camille Schmoll (éd.),
« Méditerranée, des
frontières à
la dérive », Lyon : Le Passager
clandestin
(Bibliothèque des frontières), 2018
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mise-à-jour
: 8 novembre 2018 |
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