NOTE DE L'ÉDITEUR : Vairaumati no Ra’iatea est le pseudonyme d’une écrivaine polynésienne. Elle vit à Raiatea. Sagittaire chez les Européens, Cheval chez les Chinois, Arc dans l’horoscope gaulois, Vairaumati No Ra’iatea, plus souvent appelée Vai — eau en maohi — a bien été obligée d’obéir : elle vagabonde et tant de choses l’intéressent sur cette planète qu’elle ne sait souvent où donner de la flèche. Arioi est son premier roman publié ; il met en scène, dans l’île de Raiatea, au début du XIX^e siècle, quelques personnages que la marche de l’Histoire, inattendue, inéluctable réduira au néant. Derrière des destins individuels qui sont de l’ordre de la fiction, Vairaumati No Ra’iatea s’attache particulièrement à faire revivre ces femmes et ces hommes, si décriés, par les missionnaires, qu’ils seront les premiers à disparaître. C’est pourquoi ce roman reconstitue avec une grande minutie le peu que nous savons des Arioi, les artistes de ces îles qui s’appelleront La Société. L’écriture se veut être un hommage à leur beauté et à leur originalité. Rétablir la mémoire des Arioi pour que renaissent et se perpétuent tous leurs arts. Écrire, pour conserver la mémoire …

TAHITI PRESSE, 11 février 2002 : Les éditions Aux vent des îles, à Papeete, viennent de publier […] « Arioi », de Vairaumati no Ra'iatea, pseudonyme de l'auteur qui a désiré conserver l'incognito. Le thème du livre évoque un aspect des anciennes traditions polynésiennes dont le caractère quasi magique est renforcé par l'écriture et la construction de l'ouvrage.

Il s'agit de l'histoire douloureuse d'une jeune arioi (comédienne-danseuse des temps anciens) au moment de la révolution de la société traditionnelle par le christianisme, apporté par les missionnaires protestants de la London Missionary Society, au début du XIX^e siècle. La jeune femme qui devait tuer son enfant dès la naissance, selon les rites de la corporation des arioi, l'a gardé et se trouve retranchée du monde, menacée de mort.

EXTRAIT

Après les invocations aux dieux et les repas, vint le spectacle. Que le fils d'un des grands ari'i regardât Vahinetua avec passion, c'était là attitude trop banale pour la troubler. Elle haussa donc gentiment les épaules quand on lui glissa ces propos à l'oreille. Mais il advint, aux danses qui suivirent, que le mouvement complexe qu'elle devait faire des hanches et des pieds l'amena devant celui même dont on venait de lui parler. Les Arioi sont habitués à déchaîner les passions les plus diverses. Mais elle ne sut quel dieu l'aida à ne pas tomber. Une apparition, ce fut comme une apparition. Elle n'avait jusque là rien vu ni rien aimé … Comment retrouver la suite exacte des moments pour essayer de comprendre ? Elle retrouvait seulement, intacte au cœur, la saveur de ces jours-là. La grandeur sacrée de Ra'iatea se confondait avec la grandeur sacrée de ce qu'elle découvrait avec Teri'imaro'ura. Où se trouvaient la faille et l'errreur ? Où pouvait s'être dissimulée la tromperie ? ☐ p. 59