DANY BÉBEL-GISLER : Une passion, un intérêt
très vif pour les bateaux ont amené Myriam Alamkan
à abandonner des études de biologie pour se consacrer
à la recherche sur l'histoire maritime des Petites Antilles
aux XVIIe et XVIIIe siècles.
C'est dans le cadre du projet
de l'UNESCO « La Route de l'Esclave » dont
je suis le responsable pour les départements français
d'Amérique que j'ai rencontré Myriam. Au vu de
ce livre passionnant et précis, documenté, ouvrant
des pistes à de nouvelles recherches, je me félicite
de l'avoir encouragée et soutenue.
En effet, non historienne de
formation, Myriam Alamkan, en plus de descriptions concrètes
et précises sur les connaissances des Caraïbes, l'appropriation
du domaine maritime, les types de bateaux utilisés, les
professions maritimes exercées, a su réunir une
somme considérable de documents, notamment le répertoire
des prises corsaires qu'elle a constitué à partir
des minutes du greffe. Dans un désir de valorisation de
ses ancêtres caraïbes et pour leur rendre hommage,
Myriam s'attache à décrire dans le détail,
tous les apports de ceux-ci aux premiers colons. Ces derniers
vont s'approprier les connaissances de la faune et de la flore
des Caraïbes, leur savoir-faire, leur mode de navigation
maritime, adapter leurs pirogues à leurs besoins, pour
ensuite les exterminer. Sans la présence des Amérindiens,
sans leur expérience multiséculaire de la mer,
les premiers colons n'auraient pas survécu.
Myriam Alamkan, sans ressentiment,
nous convie à un voyage sur la route de la construction
d'une tradition maritime créole. Elle nous invite à
regarder les pirogues, les gommiers, les « saintoises »
et leurs membrures européennes comme une production collective
originale d'hommes ayant surmonté la douleur de leur condition
sociale.
Le lecteur découvrira
le marronnage maritime, le mythe des origines bretonnes des Saintois,
les exploits des corsaires de Guadeloupe ou comment Victor Hugues,
de son propre chef, va déclarer la guerre aux jeunes Etats-Unis
d'Amérique.
Myriam Alamkan nous montre avec
rigueur et passion, l'importance croissante de la mer, de sa
maîtrise et de son exploitation dans les colonies.
Cette mer « en nous
tissée » (Saint-John Perse), « mer
mémoire », « mer omniprésente
reliant le présent au passé, le passé au
futur, témoin privilégié de l'histoire »
Derek Walcott a raison, « sea
is history », la mer est histoire. ❙
Myriam Alamkan est chercheuse en histoire maritime antillaise. Elle
publie régulièrement des articles dans des revues
universitaires et participe à des conférences
internationales aux États-Unis, au Canada et en France autour de
ces thématiques. Elle est membre fondateur de
l’association Trésors du Patrimoine qui s’occupe de
l’histoire et du patrimoine maritimes de l’archipel
guadeloupéen.
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